Mme
Koroutoumou Ouattara, ancienne directrice générale de l'hôpital
de l'amitié de Koudougou, a été nommée à la tête du Centre hospitalier
régional de Ouahigouya en novembre 2001. C'est à un moment où la
direction générale et les structures syndicales ne parlaient plus
le même langage. Le centre hospitalier était dans une sorte de léthargie.
Le boycott des activités, le refus d'engranger des recettes ...
étaient devenus le menu quotidien. Aujourd'hui, la situation s'est
apaisée, les services techniques ont repris du service. La nouvelle
directrice générale explique comment le dialogue a été réinstauré.
Elle aborde aussi des contraintes et ses ambitions qui sont entre
autres, la délocalisation du Centre hospitalier de Ouahigouya.
En
décembre 2001, vous avez été nommée à la tête du centre hospitalier
régional de Ouahigouya à un moment où l'établissement rencontrait
d'énormes problèmes. Quelle lecture peut-on faire maintenant de
la situation ?
Koroutoumou
Ouattara : Selon les travailleurs que nous avons rencontrés le 1er
mai chez le haut-commissaire, le climat est assaini. On y note un
bon esprit de travail et tout se déroule bien.
Quel
était le problème majeur que vous avez trouvé au centre hospitalier
?
Ouahigouya
tout comme les autres hôpitaux ont traversé la crise nationale ayant
affecté leur fonctionnement. Cela a conduit à une rupture de communication
; l'administration et les services techniques ne pouvaient plus
travailler. Les différents mouvements qu'il y a eus au niveau du
ministère puis les différentes politiques entreprises au niveau
national ont contribué un tant soit peu à apaiser les cœurs. Nous
sentons à l'heure actuelle des équipes qui travaillent. Les réunions
fonctionnent très bien. Pour les recettes aussi, nous avons fait
des merveilles. La situation à mi-parcours nous laisse présager
des recettes de plus de 100 millions de nos francs. Une chose qu'ils
n'ont jamais eue. A l'occasion, nous avons attribué des lettres
de félicitations, ce qui motive davantage les agents à travailler.
Nous avons ainsi pu faire des réunions, des rencontres de sensibilisation
et d'organisation des services. Nous avons même mis des outils de
gestion en place pour aboutir à ces résultats.
Il s'agit de quel genre d'outils de gestion ?
Nous sommes autour d'un projet d'établissement où tous les acteurs
hospitaliers doivent adhérer. Nous ne pouvons pas parler d'adhésion
sans rencontres, ni équipes de travail. Les équipes sont bien en
marche, les réunions se font bien. Les différentes réflexions se
font ensemble, ce n'est pas seulement la direction qui travaille.
Ce sont ces concertations qui ont abouti à des résultats, à mi-parcours,
très positifs. Au niveau du Centre hospitalier de Ouahigouya, la
direction générale et les syndicats ne parlaient pas du tout le
même langage.
Où en est-on ?
Aujourd'hui,
il n'y a plus de problème. Les travailleurs l'ont avoué au haut-commissaire.
On a quelques petits problèmes liés aux infrastructures qui sont
devenues très vétustes. Nous nous attelons à notre projet d'établissement
pour réunir les moyens afin de mettre les différentes politiques
en exécution.
Votre
établissement aussi avait des difficultés inhérentes à l'absence
de spécialistes dans certains services ?
Au
niveau national, il y a un problème de personnel (médecins et spécialistes).
Nous avons des alternatives au niveau des coopérations décentralisées
où les hôpitaux ont une coopération technique avec leurs homologues
du Nord. Cela nous amène à renforcer les compétences techniques
de nos médecins. Ainsi, nous réussissons à faire du travail remarquable.
Nous avions reçu dans nos locaux, une équipe chirurgicale de Chambéri
qui s'intéressait aux maladies comme les hémorroïdes, les goitres,
chose que nos hôpitaux régionaux n'avaient pas l'habitude de faire.
Maintenant, nous, le faisons et j'ai confiance en l'équipe.
En
parlant en termes d'indicateurs, qu'est-ce qui prouve que tout marche
bien au Centre hospitalier de Ouahigouya ?
Nous
avons des indications techniques, les performances techniques de
la structure que nous voyons. Nous voyons aussi des indicateurs
financiers. A ce niveau, nos états financiers, nos états des recouvrements
montrent que nous sommes en nette progression. Nous ajouterons le
fonctionnement des différentes instances, cela montre que le système
de communication marche bien. L'ensemble de ces aspects ont permis
d'améliorer la qualité de nos prestations, en ce sens qu'il y a
maintenant moins de plaintes. Nous avons ouvert une communication
avec les communautés pour voir leurs besoins en matière de santé,
les contraintes et ce qu'elles reprochent à l'hôpital. En cela,
nous avons fait une analyse situationnelle de notre environnement
pour adapter les prestations aux besoins des populations.
Quelle
réalisation vous tient à cœur pour le Centre hospitalier régional
de Ouahigouya ?
Bon
(rires) ; j'ai des ambitions, celles de pouvoir améliorer de façon
considérable, les performances de cet hôpital. J'ai également des
contraintes liées à la structure parce que l'hôpital est logé dans
une enceinte de 5 à 6 hectares. Or, pour un hôpital régional, il
nous faut environ 15 hectares. Nous parlons aujourd'hui de délocalisation
comme Kaya, Banfora pour pouvoir permettre l'aménagement de l'espace
de travail. Notre structure est très vieille, elle est ouverte depuis
1954 (je n'étais pas née encore), ce qui fait que les infrastructures
sont dépassées. Pour l'organisation du travail, adapter les soins
aux besoins, cela pose des problèmes. Notre souci est qu'on nous
donne une parcelle assez bien, à l'intérieur de la ville, accessible
aux populations. Ainsi, nous allons essayer de construire notre
projet d'établissement sur cette parcelle plutôt que de dispenser
nos efforts. Pour le moment nous sommes à cette phase de réflexion.
Les décisions ne se prennent pas à notre niveau, mais avec les acteurs
techniques et politiques. Vous avez parlé des acteurs techniques
et politiques sans financiers.
Les
fonds sont-ils déjà acquis ?
Mais,
quand on parle de politique, les finances suivent. S'il y a une
volonté politique, il y aura l'aménagement budgétaire pour nous
amener à réaliser nos ambitions. C'est pourquoi, je parle de politique,
parce que tout doit être basé sur cela pour pouvoir faire quelque
chose. Ce n'est pas l'Etat seulement qui va financer ce projet d'établissement,
il y a les partenaires au développement qui peuvent être intéressés.
L'essentiel est de présenter des projets corrects et convaincants.
Il faut qu'on se comprenne sur ce qu'on veut, où on veut aller ...
Je pense que si cela est un acquis et est soutenu politiquement
dans notre démarche, en principe les partenaires au développement
pourront s'intéresser à notre projet.
Cela est une ambition à long terme, mais à court terme, qu'est-ce
qu'il faut réellement ?
C'est
ce que nous sommes en train de faire. On a réfléchi, il faut réorganiser
et même organiser les soins. Cela prend en compte l'espace du travail,
la maîtrise de l'activité des soins. Ce qui nous gêne, c'est l'état
des infrastructures qui ne sont plus adaptées. Je pense que d'ici
à là, selon les échos qui nous parviennent, les prestations connaîtront
davantage une amélioration. Avant, les gens se plaignaient de la
propreté. Aujourd'hui, ils viennent dire que les choses ont changé.
Il y a aussi l'amélioration des conditions de travail que nous percevons
à présent. Peut-être, c'est cela qui a amené les travailleurs à
adhérer à nos principes. En fait, si on leur dit de recouvrer, c'est
pour eux-mêmes. Maintenant ils sont contents, nous sommes à un niveau
de recouvrement très, très visible.
Nous
tirons vers la fin de notre entretien ... ?
Je veux lancer un appel à la population. Il y a ce que les acteurs
hospitaliers peuvent faire et ce que les populations peuvent faire.
Les gens ne viennent pas dans les formations sanitaires à temps,
alors que notre hôpital est un hôpital de référence. Les patients
laissent les soins au niveau des districts, des CSPS, pour venir
à l'hôpital où les soins sont très coûteux. Quand ils arrivent,
ils font des calculs comparatifs pour finalement dire qu'ailleurs
c'est moins cher. Nous sommes en train de mettre un plan de communication
avec l'extérieur pour qu'on puisse mieux nous comprendre. Interview
réalisée à Ouahigouya par Emmanuel BOUDA
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l'article original : www.sidwaya.bf/sid03_07_02/société_8.htm
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