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Une association veut relancer la sensibilisation sur la dépigmentation artificielle - Le soleil - Sénégal - 12/01/02

Les conséquences du “khessal” ou la dépigmentation artificielle de la peau tendent à devenir, au Sénégal, une question de santé majeure. C’est justement d’un groupe de Sénégalais et de Sénégalaise qui, lasses de parler entre eux des méfaits du “ khessal ” et d’en constater l’ampleur dans leur vie professionnelle, a décidé de créer une association de sensibilisation sur les dangers de cette pratique.

La dépigmentation artificielle de la peau ! Le “ khessal ” ! Beaucoup de pages de ce journal, “ Le Soleil ”, ont été… noircies sur le sujet sans parvenir à décourager les Sénégalaises à…blanchir leur peau. La dépigmentation artificielle de la peau, le “ Khessal ” pour parler comme les wolofs, ne fait plus la une des journaux et les titres des radios FM. On s’habitue à tout, même au pire. En effet, malgré tout ce qui a été écrit et dit sur le sujet, les choses n’ont apparemment pas beaucoup évolué. Les Sénégalaises sont de plus en plus nombreuses à faire du “ khessal ”, à vouloir s’éclaircir la peau au risque de leur santé. Les médecins s’en alarment et constatent, avec effroi, aujourd’hui, dans le secret de leur cabinet, les dégâts causés par plus d’un quart de siècle de pratique intensive de la dépigmentation artificielle de la peau. Une pratique qui est désormais “ responsable d’une morbidité importante ”, affirment des médecins, spécialistes des maladies de la peau. Leurs confidences donnent la chair de poule. Doctement, ils vous expliquent que leurs patientes usent “ de produits comme cosmétiques alors qu’il s’agit de médicaments ”. Les produits utilisés n’obéissent à aucune réglementation. Confidence d’une dermatologue : “ on ne connaît souvent ni la composition ni la teneur des substances constituant les produits ”. La législation n’est pas adaptée pour combattre le commerce de ces produits dangereux pour la santé.

COMPLIMENTS ET CONSEILS DES AMIES

Beaucoup de Sénégalaises se ruinent donc la santé pour s’éclaircir la peau. Le plus grave est qu’elles n’en sont pas souvent conscientes. En effet, la grande majorité des adeptes du “ khessal ” ont une seule préoccupation : se faire belle. Elles veulent juste s’éclaircir la peau. La mode les incite à le faire de même que les conseils insistants et les compliments des amies. Les baptêmes et les mariages sont des “ évènements mondains déclenchant ”, révèlent une enquête. Toutes les couches sociales sont concernées par la dépigmentation. Toutefois, on a le “ khessal ” de sa bourse. Le noir fait manifestement peur aux noires au pays de Senghor, le poète qui a tant chanté la peau couleur d’ébène. Pourtant, la pratique du “ khessal ” n’est pas toujours acceptée par la famille et les conjoints. Des maris en font des motifs de divorce.

Tout a presque été dit pour expliquer ce penchant de Sénégalaises à avoir une peau claire : complexe du colonisé qui considère le blanc comme “ un modèle supérieur ”, effet de mode, mimétisme, une affaire des couches défavorisées, etc. Ferdinand Ezembe, psychologue à Paris spécialisé dans la psychologie des communautés africaines parle même de “ profond traumatisme post-colonial ” et du “ joug d'un culte de la blancheur ”. (Lire interview de Ferdinand Ezembe, psychologue à Paris spécialisé dans la psychologie des communautés africaines du 21/11/00 dans Afrik.com)

UN PROBLEME DE SANTÉ

On peut convoquer d’autres experts d’Afrique et de la diaspora puisque le “ mal ”, avec la mondialisation, fait également des ravages en Europe et en Amérique. En revanche, pour ce qui est de l’Afrique, le “ khessal ” tend à devenir une question de santé majeure. C’est justement l’avis de quatre dames : Dr Fatimata Ly, Dr Ndèye Nguénare Diop-Niang, Dr Awa Boye et Dr Khadidiatou Ndoye-Ndir. Lasses de parler entre elles des méfaits du “ khessal ” et d’en constater l’ampleur dans leur vie professionnelle, elles ont décidé, avec d’autres ami (e) s de créer une association de sensibilisation sur les dangers de cette pratique. Un des buts visés par l’association est son éradication par l’implication des autorités sanitaires, des leaders d’opinion. Un autre objectif est la “ reconnaissance par l’OMS des complications de cette pratique comme un problème de santé ”.

L’association devrait, le 19 janvier prochain à l’issue de l’assemblée générale qui se déroulera à l’ENDSS à partir de 09 heures, en présence notamment du Pr Bassirou Ndiaye, dermatologue, chef de la clinique dermatologique de l’hôpital Aristide Le Dantec. “ L’association est ouverte à toute personne de bonne volonté sensible au phénomène ”, déclare Dr Fatimata Ly. Celles-ci et ses amis s’empressent de préciser que l’association est “ apolitique ” et qu’elles mêmes ne veulent pas juger ou condamner. Elles veulent informer et sensibiliser sur les risques liés à la pratique du “ khessal ”. Elles reconnaissent volontiers que “ la tâche ne sera pas facile ”. C’est vrai.
El Bachir SOW

Lire l'article original : www.lesoleil.sn/archives/article.CFM?articles__id=10601&index__edition=9487

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