Les directeurs nationaux chargés de la gestion officielle
du médicament de quinze pays francophones d'Afrique de l'Ouest
et du Centre ont débuté, hier à Dakar, une
rencontre avec les représentants de l'industrie pharmaceutique
française pour discuter de plusieurs questions touchant ces
produits, "pièce maîtresse" du développement
de la santé des populations africaines, du fait que leur
pays dépendent à plus de 90% du marché extérieur
d'Europe, surtout de France, mais aussi un peu d'Amérique.
Cette rencontre, devenue annuelle depuis le choc de la dévaluation
du Franc Cfa en 1994, devrait permettre de réfléchir
sur les possibilités de coopération en faveur du développement
des médicaments essentiels génériques (MEG)
sur lesquels l'OMS et les pays en voie de développement misent
pour favoriser leur accès au plus grand nombre et, du coup,
réduire les dépenses en soins de santé. D'ailleurs,
ils ne sont pas les seuls à pénétrer cette
voie "salutaire" des génériques, dans la
mesure où même les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni,
l'Allemagne, la Belgique et tant d'autres pays dits développés
en font leur promotion, confrontés qu'ils sont à des
"trous" financiers énormes fragilisant de plus
en plus leur système de santé.
L'accès "libre" aux brevets de médicaments
pouvant soigner des maladies touchant une grande partie de la population
mondiale et causant chaque année des dizaines de milliers
voire des millions de morts par an, afin de produire leurs génériques,
sans attendre la fin des droits de vingt ans, est au centre, depuis
plusieurs mois, d'âpres négociations au sein de l'Organisation
Mondiale du Commerce (OMC). Pour le Pr. Mamadou Keith Badiane, directeur
de la Pharmacie et du Médicament (DPM) du Sénégal
: "il s'agit de faire le point sur la situation du marché
et les besoins africains".
"Nous devons voir, dans cet ordre d'idées, comment collaborer
avec les industriels, afin de pouvoir disposer dans les pays africains
d'outils technologiques de contrôle de la qualité des
médicaments provenant de l'extérieur, mais aussi de
développer des campagnes de promotion des médicaments
génériques en direction des populations africaines,
pour contrecarrer la contrefaçon et le commerce illicite
des produits pharmaceutiques", a dit le Pr. Badiane.
Durant les dernières rencontres, les sujets comme la disponibilité
de médicaments de qualité, l'accessibilité
financière, la promotion des MEG qui, elle-même devrait
déboucher sur le droit à la substitution des spécialités
pharmaceutiques très chères par des génériques,
plus abordables pour la grande masse, avaient été
abordés. "Le générique n'est pas un sous-médicament,
mais un médicament qui a les mêmes principes actifs
que les spécialités", a déclaré,
M. Gérard Peyrat, responsable du LEEM (les entreprises du
médicament) de France. Il a précisé que les
pays africains de la zone franc ont souvent soulevé les difficultés
qu'ils ont pour disposer de génériques de qualité
et qu'ils doivent voir comment dégager des voies et moyens
sur ce sujet crucial.
Le Pr. Seydou Aboubacar Badiane, conseiller technique du ministre
de la Santé, qui présidait l'ouverture des travaux,
s'est félicité du travail effectué en 2001
à Ouagadougou sous l'égide de l'UEMOA et à
Kigali (Rwanda) sur les achats groupés. Il a plaidé
pour l'option de création d'unités de production sous-régionales,
voire régionales. Il a indiqué la politique de son
ministère de la Santé, qui est de tendre prochainement
vers l'ouverture de comptoirs génériques classiques
en dénomination commune internationale (DCI), à côté
des génériques de marque et des spécialités.
"Ce qui doit être le seul moyen d'éviter l'exclusion
des populations économiquement faibles", a-t-il assuré.
La République démocratique du Congo vient de rejoindre
cette instance de concertation pharmaceutique "franco-africaine",
qui regroupe maintenant une quinzaine de pays dont la France, le
Sénégal ; le Gabon, la RCA, la Guinée Conakry,
le Mali, le Bénin, le Burkina Faso, le Congo, le Cameroun,
le Niger, la Mauritanie, la Côte d'Ivoire et le Togo.
Fara Diaw
Lire l'article original :http://fr.allafrica.com/stories/200302080521.html
|