Les difficultés que rencontre la pratique de la chirurgie en Afrique
étaient, hier, au centre de l'ouverture solennelle des travaux de
la réunion scientifique de l'Académie nationale de chirurgie de
France (ANCF) et des chirurgies d'Afrique francophone, présidée
par le ministre de la Santé, de l'Hygiène et de la Prévention, le
Pr. Awa Marie Coll Seck.
Le ministre a, à la suite du Pr. Cheikh Tidiane Touré, Chef de
la clinique chirurgicale de l'hôpital Aristide Le Dantec, déploré
l'insuffisance des ressources humaines et matérielles à laquelle
le développement de la chirurgie est confronté dans les pays en
voie de développement, et particulièrement ceux d'Afrique. Le ministre
Awa Marie Coll Seck a souhaité que cette réunion scientifique de
l'illustre Académie de chirurgie de France et des praticiens africains
puisse être l'occasion d'une réflexion profonde en vue d'ouvrir
des pistes de solutions pragmatiques et adaptées en faveur de la
chirurgie et de ses différentes spécialités dont les pays en voie
de développement ont grandement besoin.
Devant une forte délégation de membres de l'ANCF et plusieurs personnalités
du monde médical et pharmaceutique, de représentants de l'Organisation
internationale de la Francophonie (OIF), le ministre de la Santé
a indiqué que les pays africains, comme le Sénégal, ont de grands
besoins en chirurgiens et que des réflexions prospectives devraient
permettre de renforcer les stratégies en cours en faveur de l'accroissement
des compétences médicales et chirurgicales et de l'amélioration
du plateau technique, à tous les niveaux du système de santé.
Le Pr. Touré est allé plus loin en relevant des insuffisances financières,
le caractère obsolète de certains équipements, la pénurie de chirurgiens
et de structures aptes à accueillir et faire prospérer la pratique
chirurgicale. Il a annoncé la création prochaine d'une association
des chirurgiens d'Afrique francophone, qui devra favoriser la promotion
de cette discipline à travers l'amélioration constante de la formation
initiale et la mise en place de programme de formation continue".
Il a reconnu que des compétences existent pour la formation de
personnels qualifiés et déploré le fait que le primat est toujours
accordé aux secteurs dits prioritaires dans l'allocation des ressources
; la chirurgie étant encore traité en "parent pauvre". Pourtant,
le ministre a annoncé récemment une subvention de 600 millions de
Fcfa pour des investissements en faveur de l'hôpital Aristide Le
Dantec, dont les services chirurgicaux, rappelle-t-on, avaient reçu,
il y a peu d'années, de fortes subventions du Japon en vue de leur
rénovation et leur rééquipement, après une fermeture de plusieurs
mois.
DEMOTIVATION DES PRATICIENS
Par ailleurs, grâce à la mise en oeuvre du Programme de développement
intégré de la Santé (PDIS), plusieurs hôpitaux et centres de santé
ont pu être construits, puis dotés de blocs chirurgicaux, en plus
de formation pour les soins obstétricaux d'urgence dans la lutte
contre la mortalité maternelle.
Le Pr. Cheikh T. Touré a souligné l'écartèlement moral que les
chirurgiens subissent dans l'insuffisance de moyens, devant les
malades. Il a, enfin, indiqué, pour révéler une des causes de perte
de motivation et la désaffection des jeunes pour la discipline chirurgicale,
que "les chirurgiens font douze ans de formation après le baccalauréat,
dont sept pour avoir le doctorat de médecine et cinq autres pour
la spécialisation, le tout, sans rémunération".
De son côté, le Pr. Ives Chappuis, président de l'Académie française
de chirurgie, a plaidé pour "un partenariat formel en vue d'échanges
scientifiques larges, assidus et suivis avec les praticiens des
pays en voie de développement dont la majeure partie est issue de
l'école française de chirurgie". Il a insisté sur la compétence,
la probité, l'habileté et la technicité qui sous-tendent "l'art
chirurgical" ; des éléments que tout praticien doit méditer en tout
temps, du début de sa formation à la fin de sa carrière.
Fara Diaw
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Soleil
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