Ils
soutiennent souffrir d’un paludisme chronique alors que la
goutte épaisse n’en révèle pas la présence.
Tout comme le sérodiagnostic de Vidal et Félix ne
mettra pas à nu une fièvre typhoïde. Pourquoi
ne pas en avoir le cœur net en faisant le test de dépistage
du VIH ? Jamais ! Ils préfèrent ne pas savoir, se
voilant ainsi la face. Cette réalité n’est peut-être
pas propre à la seule région du moyen Comoé,
mais ce sont des témoignages de médecins exerçant
à Abengourou et à Agnibilékrou. Deux départements
que la ministre déléguée auprès du Premier
ministre chargée de la lutte contre le sida, Mme Assana Sangaré
Ouattara, a visités du jeudi au dimanche dernier dans le
cadre de la toute 1ère étape d’une caravane d’information
et de sensibilisation qui fera le tour de la Côte d’Ivoire.
Au cours de cette visite, Mme Assana et son équipe ont rencontré
jeunes et vieux, chefs religieux, rois de l’Indénié
et du Djuablin, autorités politiques et administratives,
associations, etc. pour leur tenir le langage de vérité
sur cette pandémie dans tout le pays en général
et dans le Moyen Comoé en particulier : “ Le sida est
une réalité et les clignotants sont au rouge…
”.
En effet, au CHR d’Abengourou où nous avons rencontré
le docteur N’Guetta Olivier du service de médecine,
le Vih/sida est là, mais les gens aiment à se voiler
la face. A preuve, sur les 200 à 250 consultations assurées
par mois par le docteur N’Guetta, 20% au moins présentent
des signes suspects du Vih/sida. Mais les patients eux préfèrent
ne rien savoir de leur sérologie du VIH, jusqu’à
ce qu’ils se retrouvent dans l’un des 25 lits du service
d’hospitalisation ou qu’ils disparaissent de la ville
pour se réfugier au village. Quelques demandes de tests de
sérologie du VIH ( face visible de l’iceberg) sont tout
de même faites au laboratoire du CHR. Un laboratoire qui ne
connaît plus de rupture de réactif depuis que le projet
RETRO-CI assure son approvisionnent. C’est ainsi que dans la
semaine du 18 au 24 mars, 18 demandes de tests ont été
adressées au laboratoire du CHR selon M. Somé You,
l’un des trois laborantins que nous avons rencontré.
Des demandes émanant du centre antituberculeux, de la PMI,
de la maternité du CHR, de même que des patients qui
y sont hospitalisés. Au dispensaire de Dioulakro, le docteur
Leaman Moussa Jean, Médecin-chef était le vendredi
22 mars lors de notre passage à sa 41e demande de sérologie
du VIH depuis le mois de septembre 2001. Les patients à qui
il a été demandé de faire une sérologie
du VIH sont essentiellement des jeunes de 18, 22 et 31 ans. Et des
41 cas suspects du Vih/sida, 39 se sont révélés
positifs. Devant de telles réalités, le docteur Leaman
souhaite que Abengourou soit un centre accrédité ou
un centre de suivi, afin que ces malades aient accès aux
antirétroviraux.
Bondoukou, choisie comme centre de suivi, est plus éloignée
d’Abengourou que ne l’est cette dernière ville
d’Abidjan. Bref Abengourou connaît le Vih/sida. Agnibilékro
aussi. Même si, le test de dépistage du VIH réalisé
seulement par une pharmacie de la place à 6500F est un frein
à la connaissance de l’état, sérologique
des populations. Mais malgré ce fait, le docteur Anon Adoh
Barthélémy, Médecin-chef du service de médecine
à l’hôpital général d’Agnibilékro
et responsable du centre de diagnostic et de traitement intégré
de la tuberculose soutient que le sida est une réalité
en milieu hospitalier. Une réalité basée sur
une étude qu’il réalise depuis 1999 sur les causes
des décès enregistrés dans la structure où
il travaille.
En effet, les résultats préliminaires de cette étude
encore inachevée montrent que le sida est responsable de
15% des décès survenus à l’hôpital.
Au 31 décembre 2000, Abengourou comptait 4606 cas cumules
de sida et la prévalence était depuis 1998 à
11,96% . La semaine dernière, lors du sida tour qui a démarré
par cette région, les populations du moyen Comoé ont
appris avec émotion, selon les exposés faits sur la
situation épidémiologique récente de la pandémie
du siècle dans notre pays, que ce taux est passé à
14,6%, soit une augmentation de 2,64%.
Pour la ministre Assana Sangaré Ouattara, il y a urgence,
le clignotant est au rouge. Et elle l’a signalé aux
populations en demandant aux jeunes d’adopter ce slogan et
de le traduire en comportement :“ l’abstinence jusqu’au
mariage et après le mariage la fidélité. ”
Même si aux populations de l’Indenié et du Djuablin,
il a été également proposé “ la
solution capote ” avec la troupe “ Mamboya ” et ce
message “ jeunes du Djuablin attention sida : clignotant au
rouge. Clignotant au vert possible avec AFP ( abstinence, fidélité
et préservatif ) ”, Mme Assana Sangaré a insisté
sur l’abstinence et la fidélité. “ Pourquoi
les jeunes de maintenant ne développeraient pas ces vertus
puisque nos parents l’ont fait ” ? s’est-elle interrogée.
Toujours est-il que rois, chefs traditionnels et religieux, autorités
administratives et politiques ont promis soutenir la lutte contre
le sida en épaulant le délégué départemental
installé par Mme Assana à Agnibilékro, le docteur
Anon et celui qui le sera par le préfet à Abengourou.
Et pour les populations, ensemble, ils organiseront l’urgence
qu’est devenue le Vih/sida dans le moyen Comoé. Envoyée
spéciale B. ZEGUELA
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l'article original : www.fratmat.co.ci/story.asp?ID=10199
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