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L'actualité de la santé en Afrique

"L'efficacité scientifique des préservatifs n'est pas de la compétence du cardinal" - L'express - Madagascar - 09/03/2004

En visite de deux jours à Madagascar, le docteur Peter Piot, directeur exécutif de l'ONUSIDA, a rencontré hier l'ensemble des autorités de l'île concernées par le sida, à commencer par le président Ravalomanana. Il a accepté d'accorder une interview exclusive à l'Express. Situation de Madagascar vis-à-vis du sida, polémique avec le Cardinal Razafindratandra, charlatanisme avec le professeur Zaranaina … le docteur Piot aborde sans retenue tous les sujets qui fâchent.

Madagascar, avec ses 1,1% de prévalence, est-elle une exception ? Est-ce miraculeux ?

Docteur Peter Piot : Je ne suis absolument pas convaincu qu'il existe une exception malgache. Vous avez ici une bombe à retardement. J'ai appris de mon expérience au cours des 20 dernières années que ce n'est pas parce qu'on a pas de problème aujourd'hui qu'on n'en aura pas demain. Ici, à Madagascar, le taux de prévalence a été multiplié par 10 en 3 ans, c'est énorme. Et puis, votre taux d'infections sexuellement transmissibles (15% NDLR) est une preuve flagrante qu'à Madagascar, il existe une activité sexuelle non protégée, qui ne respecte pas la morale officielle ! C'est un cocktail de comportements à risque, de normes dans la société malgache. Si vous n'agissez pas, la bombe à retardement va exploser.

Est-il déjà trop tard pour enrayer ce fléau à Madagascar ?

Docteur Peter Piot : Non, il n'est pas trop tard pour bien faire. Prenez par exemple l'Afrique du Sud et la Thaïlande. En 1990, ces deux pays étaient à 2% de prévalence. Aujourd'hui, l'Afrique du sud, à cause surtout de ses tergiversations politiques, en est à 28 % ! La Thaïlande, elle, a réussi jusqu'à aujourd'hui à contenir l'infection à 2%, grâce à une politique très volontariste, qui a, peu à peu, changé les mentalités. Mais dans les pays qui se sont vraiment investi à fond dans l'information-communication, nous savons qu'il leur a fallu de trois à cinq ans pour percevoir un changement de comportement sexuel à grande échelle

Qu'est-ce qui fait pencher la balance d'un côté ou de l'autre ?

Docteur Peter Piot : Dans tous les pays, c'est la même chose. Il faut une forte volonté politique. Vous l'avez avec le président Ravalomanana et son gouvernement. Il me l'a démontré à chaque fois que je l'ai rencontré. Mais, ça ne suffit pas. Il faut également énormément informer sur la maladie, pour que chaque personne puisse comprendre le risque et changer son comportement. Vous, les journalistes, avez un vrai rôle à jouer. Je dis souvent que les journalistes peuvent sauver plus de vies que les médecins.

Le cardinal Gaëtan Razafindratandra, la plus haute autorité catholique de Madagascar, a déclaré à plusieurs reprises, être contre l'utilisation des préservatifs. Non seulement il est contre moralement, mais en plus, il affirme que scientifiquement, les préservatifs sont "percés" et qu'ils n'empêchent pas le sida de passer ! qu'en pensez-vous ?

Docteur Peter Piot : Sur le côté scientifique, le cardinal, et l'église en général, ne sont pas compétents pour juger de l'efficacité des préservatifs, comme moi je ne suis pas compétent en théologie. Le virus ne passe pas par le latex, cela a été démontré maintes et maintes fois. Ce que dit le cardinal n'est pas acceptable, parce qu'en disant cela, il met la vie des personnes en danger. Sur l'aspect moral, je respecte la position officielle du cardinal. Sexualité au sein du mariage et fidélité absolue des deux époux, abstinence pour les non-mariés. On ne peut pas être contre, mais on sait que la réalité est différente, y compris pour les catholiques. Je ne demande pas à l'église de faire la promotion du préservatif. Je souhaite juste qu'elle n'en parle pas, et surtout pas qu'elle en dise du mal. Il faut faire attention de ne pas répandre des messages anti-scientifiques.

Vous allez lui dire votre façon de penser ?

Docteur Peter Piot : Je lui proposerais de travailler ensemble. Vous savez, l'église a un rôle extrêmement important pour changer les mentalités. Soyons complémentaires, c'est ça que je lui dirais. Je peux vous citer de nombreux exemples dans le monde, où les religieux nous aident. En Ouganda, c'est un évêque catholique qui est à la tête de comité national de lutte contre le sida. En Afrique du sud, l'archevêque Desmon Tutu a déclaré que l'utilisation des préservatifs était acceptable car elle sauvait des vies. En fait, plus le pays est infecté par le sida, plus les religieux sont ouverts !

Dix centres de dépistage gratuits pour 17 millions de malgaches, est-ce suffisant ?

Docteur Peter Piot : C'est insuffisant, c'est clair. Quand on est conscient du risque, il faut avoir la possibilité de savoir. Mais, attention, avoir des centres de dépistage sans pouvoir soigner les personnes porteurs du virus, c'est dangereux. Il faut avancer sur tous les fronts en même temps. Vous savez, le sida est encore un sujet tabou, plein de honte, de rejet. Attention à l'exclusion sociale. Ce qui a un impact énorme, ce sont les présidents de la République ou d'importantes personnalités reconnues dans leurs pays, qui sont photographiés, filmés avec des personnes porteurs du virus ou déjà malade du sida.

Vous conseillerez donc au président Ravalomanana de serrer la main d'une personne infectée ?

Docteur Peter Piot : Nous en parlerons sûrement. A Madagascar, j'ai l'impression qu'il y a encore beaucoup de choses à faire pour la compréhension et l'acceptation de la maladie. Il faut briser le silence. C'est là que le leadership d'un président est important.

Un tradi-praticien malgache, M. Zaranaina, dit avoir trouvé un remède à base de plantes pour soigner le sida. Est-ce un charlatan ?

Docteur Peter Piot : Cet homme est un charlatan ou un malhonnête. Il est irresponsable d'offrir un traitement qui n'a pas été vérifié scientifiquement. Il faut qu'il donne les preuves scientifiques que ça marche. Il existe des protocoles scientifiques proposés par l'ONUSIDA, qui sont disponibles. Vous savez, dans tous les pays au monde, ce genre de personnage existe. Ils sont parfois écoutés car les gens sont tellement désespérés qu'ils s'accrochent à toutes lueurs d'espoir. Malheureusement, il faut être très clair. Aujourd'hui, il n'y a pas de guérison possible du sida, et il n'y en aura peut-être jamais. Il existe quand même un traitement (anti-rétroviraux NDLR), qui a un effet spectaculaire sur la santé du malade. Tout le reste n'a jamais été prouvé.

Propos recueillis par Faniry Ralevazaha

Bibliographie : Directeur exécutif de l'ONUSIDA depuis sa création en 1995 et Secrétaire général adjoint des Nations Unies, le Dr Peter Piot a suivi une carrière universitaire et scientifique prestigieuse axée sur le SIDA, ainsi que sur la santé des femmes dans le monde en développement. Né en Belgique en 1949, le Dr Piot est l'auteur de 15 ouvrages et de plus de 500 articles scientifiques. Il a reçu de nombreuses distinctions pour ses réalisations dans le domaine de la science et de la société, et a été fait baron par le Roi Albert II de Belgique en 1995. Il est membre de l'Institut de Médecine de l'Académie nationale des Sciences des Etats-Unis et de l'Académie royale de Médecine de Belgique, et membre du Collège royal des Médecins de Londres (Royaume-Uni).

Lire l'article original : http://www.lexpressmada.com/article.php?id=19375&r=4&d=2004-03-09


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