Wal
Fadjri :
Comment se fera l’implication des familles dans la lutte contre
le sida ?
Charlotte
Fatim Ndiaye :
Toutes les composantes de la famille, que ce soit le père, la mère,
mais aussi la famille au sens élargi, doivent se sentir concerner.
Parce qu’il peut arriver qu’un membre de la famille tombe malade
et qu’un autre soit concerné par cette pandémie. Il s’agit de faire
bloc autour de lui, de ne pas le rejeter, de le comprendre et de
l’aider à supporter cette maladie. En fait, le sida ne doit pas
être considéré comme un tabou, mais comme le cancer, la tuberculose,
etc. La communauté scientifique est venue à bout de ces maladies-là.
Par rapport au sida, les scientifiques sont d’accord pour dire qu’il
faut l’implication des communautés. Il faut que nous nous engagions
plus. Il faut que le père et la mère de famille arrivent à parler
à leur enfant, à lui parler de sexualité, à lui dire comment prévenir
cette maladie. On dit souvent que le sida n’arrive qu’aux gens qui
se taisent. C’est pour cela qu’il faudrait que la famille arrive
à dialoguer. Une famille, une bonne famille est celle qui communique,
qui se retrouve autour d’un repas, qui échange et développe des
stratégies d’information et d’éducation. La lutte contre le sida
passera par la famille qui est l’unité de base de notre société.
Wal
Fadjri : En parlant de la famille, vous avez surtout mis l’accent
sur les femmes. Est-ce une façon de dire que les hommes ont quelque
part échoué ?
Charlotte
Fatim Ndiaye : Non
! Mais tout le concept nouveau est de centrer les programmes de
lutte autour de la femme. C’est la femme qui éduque, c’est la femme
qui est mère. C’est également la femme qui est épouse. C’est la
femme qui accompagne souvent la personne malade. C’est la femme
qui est patiente, qui a de la tendresse. C’est pour cela qu’on pense
que pour lutter, pour que la famille soit mieux impliquée, il faut
que les femmes soient davantage autonome, informées et éduquées.
Tous les programmes de lutte contre le sida qui se veulent efficaces
doivent passer par les femmes. Et ici au Sénégal, les femmes ont
eu à montrer de quoi elles sont capables de faire lorsqu’il s’agit
de protéger leurs enfants, leurs familles et aussi la communauté.
Certes, les hommes n’ont pas échoué, mais nous les femmes, nous
devons leur apprendre à mieux comprendre que s’ils nous rendent
plus autonomes et nous donnent des pouvoirs capables de recevoir
des informations d’éducation, nous pourrions préserver la société
et pourquoi pas le pays.
Wal
Fadjri : Au niveau de la Swaa, avez-vous
dégagé des programmes qui militent dans ce sens ?
Charlotte
Fatim Ndiaye : C’est
toute l’approche communautaire que développe la Swaa. Par rapport
à la prise en charge, par exemple des orphelins, nous avons prouvé
qu’il ne faut jamais sortir un enfant de son milieu naturel. Nous
avons par ailleurs prouvé qu’au Sénégal, il y a des cousins élargis,
cette famille élargie qui est capable de recevoir cet enfant, de
lui donner de l’amour. La Swaa développe aussi un projet de parrainage
pour faire connaître le concept de famille, pour que nos valeurs
perdurent et restent. Donc, on doit se mobiliser. Parce qu’avec
ce thème, les partenaires ont compris que la riposte est globale
et communautaire. Et c’est comme ça qu’on aura des programmes efficaces
de lutte. Propos recueillis par Penda MBOW
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l'article original : www.walf.sn/archives/article2.CFM?articles__num=9455&unelocale__edition=3050
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