Une telle situation plonge souvent une certaine catégorie sociale
dans une pauvreté totale, les veuves, par exemple, étant privées
des bras valides de l’époux. C’est ce qu’a fait remarquer Catherine
Thérèze Gabrielle Diouf* qui présentait son étude, “ La situation
psychologique, sociale et financière des veuves et orphelins infectés
ou affectés par le VIH/Sida ”.
C’était lors des journées d’information et de sensibilisation sur
le programme de petites subventions de l’Union pour l’étude de la
population africaine (UEPA), et dissémination des résultats de recherche
sur la population africaine ”. En effet, un polygame qui meurt laisse
autant de veuves qu’il avait d’épouses. Mais, souligne l’UNICEF,
selon elle, si “ la femme, la veuve, en particulier, et les enfants
semblaient être à la périphérie du sida, aujourd’hui ils sont et
doivent être au centre des préoccupations ”, à cause de leur vulnérabilité
qui intéresse différents aspects de la vie, a-t-elle souligné. Ainsi,
la première conséquence de la maladie, au sein de la Famille, est
d’ordre psychologique.
Car soutient-t-elle, la connaissance du statut sérologique, les
manifestations extérieures la douleur physique et physiologique,
sont autant d’éléments qui affectent la vie affective, non seulement
de la personne atteinte, mais également tous les membres de la famille
qui lui sont rattachés, en particulier les enfants. Ces derniers
sont généralement déscolarisés, comme l’illustre la chercheur selon
qui, 53 sur 181 d’entre eux ont abandonné l’école. La perte de la
capacité physique du principal pourvoyeur de ressources, sa souffrance,
la connaissance par la femme de sa propre infection éventuelle,
a poursuivi Catherine Thérèze G. Diouf, l’angoissent. C’est parce
qu’elle se sait en sursis et qu’elle assiste, impuissante et sans
aucun espoir.
La tranche de 25-40 ans prédomine
Pour minimiser les conséquences négatives de la mort de l’époux,
l’entraide familiale peut prendre le relais et revêtir plusieurs
aspects, indique la chercheur. “ Mais ce système d’entraide connaît
des carences, du fait de la pauvreté et de la connotation sexuelle
de la maladie qui suscite parfois des réactions négatives des membres
de la famille et de la communauté, et cela entraîne la détérioration
des relations sociales entre le malade et sa famille ”.
Thérèse G. Diouf, les veuves du sida sont caractérisées par leur
jeunesse, avec une moyenne d’âge de 34 ans et des extrêmes de 17
à 54 ans. “ La tranche de 25-40 ans prédomine, ce qui veut dire
que ces femmes se situent à une période propice à leur épanouissement
corporel et à la procréation et où l’opportunité de contracter un
second mariage leur est offerte ”.
70 sur 82 veuves, selon Mme Diouf sont infectées et ont une progéniture
très nombreuse, d’autant plus que l’étude, 67 femmes dans cette
situation ont donné naissance à 181 enfants de moins de 16 ans,
dont 28 vivent avec le VIH. Pour elle, les enfants en subissent
parfois les conséquences, négligés qu’ils sont par leurs tuteurs
légaux qui avaient rejeté et abandonné leurs parents. “ Lorsque
le soutien est manifesté à travers l’adoption des orphelins, les
tuteurs sont généralement les grands-parents maternels qui se sacrifient
malgré la modicité de leurs ressources pour entretenir leurs petits-enfants.
” C’est ce qui explique que le sida est particulièrement générateur
d’orphelins infectés et très affectés, a encore souligné Catherine
Thérèze G. Diouf.
Une telle situation plonge veuves et orphelins dans la vulnérabilité.
Sur le plan alimentaire, cette catégorie sociale est souvent privée
de nourriture. Or l’ importance d’ une bonne alimentation en quantité
et en qualité n’est plus à démontrer dans l’infection à VIH sida
qui favorise la malnutrition et facilite la survenue des affections
opportunistes, indique Catherine Gabrielle Diouf. “ Le déficit alimentaire
précipite la mort de beaucoup de malades par la faim, non par leur
état sérologique comme nous avons été témoin dans notre travail
d’ assistante sociale. ”
Une alimentation de qualité
Toutefois, des veuves essaient tant bien que mal de pallier ce
manque en adoptant des stratégies certaines, comme le fait de confier
les enfants et de demander des restes de repas aux voisins. Ce qui
dénote l’état d’extrême pauvreté dans laquelle elles vivent. À ces
difficultés s’ ajoute celle ayant trait à leur incapacité de s’assurer
et d’assurer à leurs enfants des soins médicaux corrects et réguliers.
“Le traitement des infections opportunistes les plus courantes
et les plus bénignes leur pose problème, à cause de leur caractère
récidiviste, et ne leur permet pas d’en supporter les coût. Même
si au Sénégal des efforts importants ont été faits pour l’ accès
aux antirétroviraux (ARV), leur coût demeure élevé pour la plupart
des personnes vivant avec le VIH/SIDA”. Pourtant souligne, par ailleurs
Catherine Gabrielle Diouf, des veuves infectées s’évertuent à trouver
des ressources pour accéder aux ARV, en temps opportun, pour reculer
leur échéance. Toutes les personnes infectées ne sont pas mises
sous ce traitement, parce que cela correspond à une certaine étape.
C’est pourquoi, estime Mme Diouf, une alimentation en qualité et
en quantité assortie d’une petite prise en charge médicale peut
augmenter l’espérance de vie des personnes infectées au VIH/sida.
*Catherine Thérèse Gabrielle Diouf est une assistante sociale lauréate
2003 des chercheurs juniors de l’étude de la population africaine.
C’était dans le cadre du Programme des petites subventions lancé
par l’Union pour l’Etude de la population africaine (UEPA)
Saer Gueye
Lire l'article original : http://www.lesoleil.sn/archives/article.CFM?articles__id=27543&index__edition=9900
|