La malnutrition chez les enfants préoccupe les acteurs du monde de la santé. Plusieurs facteurs expliquent ce fléau. Et comme premier remède, les spécialistes de l’allaitement proposent l’Allaitement Maternel Exclusif (AME) jusqu’à l’âge de 6 mois. Etat des lieux au Burkina Faso et conseils pour un bon allaitement.

Le retard de croissance constitue un problème majeur de santé publique au Burkina Faso. Selon les résultats de l’Enquête Nutritionnelle Nationale (ENN) de 2014, les prévalences de la malnutrition chez les enfants de moins de 5 ans sont : malnutrition chronique : 29,1%, insuffisance pondérale: 20,1%, malnutrition aiguë: 8,6 %. Dans certaines régions, en référence à l’ENN-2014, la proportion des enfants de 0-5 mois bénéficiant de l’Allaitement maternel exclusif (AME) reste encore faible. Dans les Cascades, l’on enregistre 28,6%, 30,5% dans la Boucle du Mouhoun et 31,0% dans le Centre-Sud.

La mise au sein précoce dès la première heure qui suit la naissance n’est pratiquée que par 41,6% des femmes. Le fait de donner de l’eau en plus de l’allaitement au sein se révèle être un des facteurs qui limite le plus la progression de l’allaitement exclusif.

En plus, l’introduction précoce d’aliments de complément également avant 6 mois est un frein à l’allaitement maternel exclusif. Selon un rapport de 2007 de l’UNICEF, 9,2 millions d’enfants de moins de 5 ans décèdent chaque année dans le monde. Environ 53% des décès sont liés à la malnutrition aiguë sévère. La conséquence est que le risque de décès est de 5 à 20 fois supérieures par rapport aux enfants correctement nourris.

Impacts de la malnutrition

Selon l’outil Profiles (2000-2010) sur le Burkina Faso, la malnutrition revêt plusieurs inconvénients au plan socio-économique.
D’abord sur la mortalité, il faut noter que ce sont 480.000 décès d’enfants de moins de 5 ans qui sont enregistrés chaque année. Sur l’éducation, l’on déplore 87% de déficit intellectuel, sur le développement économique, c’est la réduction de la productivité due au retard de croissance à savoir 193 milliards de francs CFA qui sont à regretter.

Ces indicateurs viennent prouver que les mauvaises pratiques d’Alimentation du Nourrisson et du Jeune Enfant (ANJE) sont en partie les causes directes de la malnutrition.

Les pratiques néfastes d’ANJE

Plusieurs raisons empiètent sur la bonne pratique de l’Alimentation du nourrisson. Il s’agit des pratiques néfastes de l’ANJE. Ces pratiques sont liées aux croyances. Celles-ci font croire que le colostrum est du lait sale, qu’il faut le jeter. Certains pensent qu’il faut donner des tisanes aux nouveaux-nés et aux jeunes enfants pour les protéger et pour les rendre plus forts, d’autres racontent que les enfants qui mangent des œufs deviennent des voleurs. Outre ces croyances, il y a des connaissances inadéquates. Le fait de dire que l’enfant ne peut pas rester sans boire de l’eau dans la période 0-6 mois, surtout au Burkina Faso parce qu’il fait trop chaud, que le lait maternel ne suffit plus avec la croissance de l’enfant dans la période d’âge 0-6 mois et qu’il faut lui donner des aliments de complément. Alors on a recours à des bouillies à base uniquement de céréales non équilibrées, pauvres en aliments d’origine animale. Or, l’allaitement exclusif de 0-6 mois et l’alimentation complémentaire adéquate entre 6-23 mois affectent directement et positivement la croissance de l’enfant. C’est pourquoi, il est clairement dit dans The Lancet-2008, que la fenêtre d’opportunité de 1 000 jours permet de réduire la malnutrition et ses effets néfastes. A en croire les spécialistes, la vie se bâtit sur une bonne nutrition. En concentrant les efforts sur l’apport d’une bonne nutrition pendant les 1000 premiers jours de la vie, c’est-à-dire, de la période de gestation jusqu’à l’âge de deux ans, les institutions, les programmes de santé, les ONG et les PTF peuvent contribuer à établir les bases qui permettront à un enfant de devenir un adulte en bonne santé.

La solution du gouvernement

Le Burkina Faso a développé un plan de passage à l’échelle des interventions d’ANJE qui s’avèrent nécessaires suite à notre adhésion en 2011 au Mouvement "Scaling Up Nutrition" (SUN), qui se fixe entre autres objectifs de réduire de 40% d’ici à 2025 le nombre d’enfants de moins de 5 ans ayant une malnutrition chronique et de porter le taux d’allaitement exclusif à au moins 50% d’ici à 2025. Ce plan devrait non seulement faciliter la mobilisation de ressources en faveur de la prévention de la malnutrition d’une manière générale, mais aussi guider la mise en œuvre des interventions d’ANJE. L’objectif général est d’augmenter le taux de pratique d’allaitement exclusif chez les enfants âgés de moins de 6 mois de 38 % en 2012 à au moins 60 % en 2025.

Avantages de l’AME

L'allaitement maternel exclusif sauve des vies. C’est l'intervention la plus efficace pour prévenir les décès d'enfants, encore moins de 40% des nourrissons de moins de 6 mois reçoivent les avantages de l'allaitement maternel exclusif dans le monde. La diarrhée et la pneumonie sont les principales causes de décès chez les nourrissons dans les pays en développement. Or, les nourrissons de moins de 2 mois, qui ne sont pas allaités exclusivement sont six fois plus susceptibles de mourir de diarrhée ou d'infections respiratoires aiguës que ceux qui sont nourris au sein. Selon les professionnels du domaine, plus de 800.000 décès pourraient être évités chaque année si les taux d'allaitement maternel exclusif atteignent 90%.

Le lait maternel, en particulier le premier lait épais jaune appelé colostrum, contient des agents antibactériens et antiviraux et des niveaux élevés de vitamine A qui protègent les nourrissons contre la maladie. Il favorise la récupération de l'enfant malade. L'allaitement maternel fournit un aliment nutritif, digeste quand un enfant malade perd son appétit pour d'autres aliments. La poursuite de l'allaitement pendant la diarrhée réduit la déshydratation, la gravité et la durée de la diarrhée et le risque de malnutrition.

Le lait maternel est une source hygiénique des aliments avec la bonne quantité d'énergie, protéines, lipides, vitamines et d'autres nutriments pour les nourrissons au cours des six premiers mois. Il ne peut pas être dupliqué. Le lait maternel est la seule source de nourriture sûre et fiable pour les nourrissons en cas d'urgence. Il répond à toutes les exigences de l'eau. Le lait maternel contient 88% d'eau.

Des études ont montré que les nourrissons en bonne santé allaités exclusivement au sein pendant les 6 premiers mois n'ont pas eu besoin de fluides supplémentaires, même dans les pays avec des températures extrêmement élevées et à faible humidité.
Il faut dire qu’offrir de l'eau avant 6 mois d'âge réduit l'apport de lait maternel, interfère avec l'absorption complète des nutriments du lait maternel, et augmente le risque de la maladie à partir de bouteilles d'eau et d'alimentation contaminées.

Le lait maternel optimise la croissance et le développement physique et mental d'un enfant. Les bébés nourris de lait maternel montrent des indices de développement plus élevés que les tout-petits et un quotient intellectuel plus élevé que les enfants que ceux qui ne sont pas nourris de lait maternel. Le lait maternel fournit les nutriments-clés qui sont essentiels pour la santé, la croissance et le développement.

Avantages pour les Femmes

L’allaitement a beaucoup d’avantages pour la santé maternelle. Il réduit le risque d'hémorragie du postpartum notamment le cancer du sein et de l'ovaire de la mère avant la ménopause. En effet, un allaitement fréquent et exclusif contribue à un retard dans le retour de la fertilité et aide à protéger les femmes contre l'anémie en conservant le fer.
L'allaitement fournit une interaction fréquente entre la mère et l'enfant, favorise des liens affectifs, procure un sentiment de sécurité et stimule le développement du cerveau du bébé.

Gaspard BAYALA
Source: Alive and Thrive

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