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Revue de presse de Santé tropicale

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Le calvaire des femmes fistuleuses

Iwacu | Burundi | 20/10/2022 | Lire l'article original

Mépris, mauvaises odeurs, douleurs physiques, discrimination sociale… Les femmes atteintes des fistules obstétricales souffrent. Après un accouchement difficile, elles se sont retrouvées fistuleuses. La majorité n'a pas pu sauver leurs bébés. Le centre Urumuri, à Gitega, tente de leur venir en aide. Reportage.

L'hôpital régional de Gitega, au centre du pays. 10 heures, il fait frais. Des motos, des vélos, ramènent toujours des malades. Quelques ambulances font aussi des navettes. Munis de stéthoscopes, en uniformes blancs ou bleues, des médecins font le tour dans les chambres d'hospitalisation. On entend des enfants pleurer.

Dans la cour intérieure de cet hôpital, un nouveau bâtiment à trois niveaux se démarque des autres. Juste au mur de son niveau supérieur, on peut lire : « Centre Urumuri financé par la Fondation Bonne Action Umugiraneza. » Les lettres sont en majuscules. C'est là que se trouvent les femmes souffrant des fistules obstétricales.

Juste en bas, certaines d'entre elles font le lézard. Elles attendent leur rendez-vous d'être « réparées. » Des échanges, des murmures. Mais, quand on les approche, c'est le silence. Elles essaient de dissimuler leurs visages. Elles doivent avoir entre 18 ans et 30 ans. Devant elles, chacune a un petit seau. Une fiche médicale aussi. Elles semblent avoir honte. « Comment allons-nous aborder des femmes dans cet état ? » On s'interroge. Nous sommes deux journalistes hommes. Mais, le métier oblige, on se lance comme d'habitude. On sort nos badges. On évite de prendre des photos. Après un « bonjour » un peu timide, le contact est établi. Mais la réserve reste de mise. Un soulagement. Et puis, miracle, pour elles, notre présence est la bienvenue. « Ce n'est pas souvent qu'on a une visite de journalistes ici pour recueillir nos témoignages. Soyez les bienvenus. On va parler même si nous souffrons beaucoup. »

En fait, elles ne parlent pas. Elles se déchargent, déversent un trop-plein de douleur. « Je suis venue pour me faire soigner des fistules obstétricales. J'ai eu un problème lors d'un accouchement. Je suis partie vers un centre de santé et l'enfant n'est pas sorti. La situation s'est compliquée et on m'a transférée vers un hôpital. Mais, là aussi, ils n'ont pas pu sortir mon enfant, il est mort », raconte Valérie, la trentaine, native de la commune Buhinyuza, à Muyinga.

Les yeux inondés de larmes, la jeune femme avoue qu'elle a trop souffert pendant ses transferts d'un endroit à un autre : « Les douleurs étaient insupportables. J'étais entre la vie et la mort. Et ça a été peine perdue. Je n'ai pas pu tenir le bébé dans mes mains. » Sur ses mots, elle craque.

On se tait. Après quelques minutes de silence, elle essuie ses yeux avec son pagne avant de reprendre difficilement le récit de son calvaire : « Après la mort de mon enfant, j'ai été hospitalisée pendant deux semaines : c'était très difficile de marcher. »

C'est par après que les médecins vont lui annoncer qu'elle souffre de la fistule obstétricale. Et elle a été transférée vers le Centre Urumuri.
A cette époque, Valérie a été réparée. « Je suis rentrée guérie. Et pour le moment je suis revenue pour une nouvelle consultation parce que j'ai constaté que des écoulements ont repris. Et j'attends le docteur pour me traiter encore une fois », confie-t-elle.

Victimes de discrimination

Indexées, ces femmes sont même rejetées par ceux-là qui devraient être proches d'elles, manifester plus d'empathie : leurs maris. C'est ce qui est arrivé à Domithile, la cinquantaine, native de Bururi. Elle aussi attend d'être soignée. Elle vit avec cette souffrance depuis plus de 30 ans :« 1993, c'est l'année où ma vie a basculé. C'était lors d'un accouchement à un centre de santé. Et le travail a trop duré. J'ai tout fait pour que mon enfant sorte, en vain. Et finalement, après des heures, mon enfant est mort. » Par après, elle a été transférée vers un hôpital pour pouvoir sortir le corps de son bébé mort : « C'est de cette façon qu'ils ont pu sauver ma vie. »

Cette femme indique que c'est de là qu'elle a connu ce problème de fistule obstétricale. De retour à la maison, son époux commence à se tenir à l'écart. Et depuis lors, raconte-t-elle, les relations amoureuses ont cédé la place aux injures, au mépris. « Tu es puante », lui lance souvent son mari. Et son entourage aussi commence à s'éloigner de plus en plus d'elle. Pour finir, son époux a décidé de prendre une autre femme. « J'ai été obligée de retourner chez mes parents. Eux, ils ont essayé de me comprendre. »

Selon leurs témoignages, la liste des injustices dont elles sont victimes est longue. Valérie ajoute que souvent, la femme victime de la fistule n'est pas comprise par son entourage : « Elle se sent isolée, délaissée. Elle ne trouve pas comment se comporter devant les gens. On a l'impression qu'on n'est plus comme les autres suite aux écoulements souvent puants qui se dégagent de ses parties intimes. »

Ce qui entraîne souvent la détérioration des relations conjugales. «  Il y a des relations conjugales qu'on ne peut pas remplir quand tu souffres des fistules obstétricales. Et quand ton époux ne tolère pas cela, ne s'abstient pas pendant ta maladie, il part chercher ailleurs. On te chasse aussi », raconte-t-elle.

A l'intérieur de ce bâtiment flambant neuf, dans les couloirs, des traces des écoulements. Une des salles d'hospitalisation est totalement pleine. Les lits sont tous occupés. Aucune femme en position debout. Elles sont toutes allongées sur leurs lits, sur le dos. En dessus de chaque lit, un seau lié à la patiente par une sonde urinaire. Certaines femmes fistuleuses ont à côté d'elles des bébés. D'autres sont seules. Elles n'ont pas eu la chance d'entendre leurs enfants pleurer. En plus des douleurs physiques, la souffrance morale se lit sur leurs visages.

Parmi elles, Sophie, 35 ans, une native de Ruhororo, en province de Ngozi. Elle vient de passer deux semaines là. D'une voix vacillante, elle raconte son supplice : « Moi, j'ai eu un problème d'accouchement à l'hôpital de Mivo. Il y a eu des complications et mon enfant est malheureusement mort-né. »

Depuis qu'elle est là, aucune visite de sa famille. Ce qui la traumatise beaucoup et la décourage : « Je suis veuve. J'ai besoin d'être assistée. Mon époux est mort alors que la grossesse était à son deuxième mois. Aujourd'hui, je suis ici, et c'est moi qui me battais pour nourrir mes cinq enfants. Aujourd'hui, quand je pense que mes enfants n'ont personne pour les nourrir, qu'ils peuvent dormir sans rien mettre sous la dent, je ne dors pas. Je souffre triplement », raconte-t-elle, en pleurant.

Tout en remerciant la Fondation Bonne Action Umugiraneza, elle demande à la Première Dame de penser aux familles de ces femmes fistuleuses. « Après la guérison, on aimerait travailler, vaquer aux activités champêtres pour faire vivre nos enfants, mais, avec cette affection, même si on guérit, les séquelles restent. On ne peut pas se permettre de tout faire comme avant ». Faute de moyens, ses enfants ne sont jamais venus lui rendre visite. « Ils me manquent beaucoup. Je m'inquiète pour eux. »

Besoin d'un soutien moral et financier

Allongée sur son lit, Sophie plaide. « Nous avons besoin d'être accompagnées pour reconstruire nos vies ». Elle trouve qu'il est aussi important de sensibiliser les gens, la communauté «  pour ne pas toujours discriminer les femmes qui ont connu ce problème de fistule obstétricale. »

Un message relayé aussi par Léa de Nyabitsinda, 30 ans. « Imaginez, tu rentres à la maison et tu trouves ton époux avec une autre femme. Comment s'y prendre ? », s'interroge la convalescente.

Elle vient d'être traitée pour la deuxième fois et n'attend qu'un billet de sortie pour rentrer. Selon elle, beaucoup de femmes sont répudiées, chassées parce qu'elles sont fistuleuses : « Or, cela n'est pas leur faute, c'est une maladie comme tant d'autres. Il faut alors qu'on nous accompagne en protégeant aussi notre couple. » Elle dit que beaucoup de ces femmes viennent de familles pauvres.

Rénovat Ndabashinze

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