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Revue de presse de santé tropicale

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Déficit de personnels qualifiés de santé en quantité, mauvaise répartition, faible allocation budgétaire, etc. : onze pays d’Afrique décidés à inverser la tendance

Walfadjri | Sénégal | 13/12/2011 | Lire l'article original

Le déficit du personnel de santé reste encore le talon d’Achille des priorités de gouvernance en Afrique francophone de l’Ouest et du Centre. Une préoccupation majeure pour les partenaires au développement tels que l’Oms, le Cesag et l’Institut de santé et développement (Ised) de l’Ucad.A leur initiative, des acteurs de 11 pays concernés se donnent, depuis hier à Dakar, les moyens d’inverser cette tendance.

Depuis 6 heures du matin qu’elle est en salle d’attente, Aïda Bayo (nom d’emprunt) n’a pu être admise en consultation prénatale que cinq heures plus tard au Centre de santé Gaspard Camara de Grand-Dakar. La mine déprimée, cette dame d’une trentaine d’années traîne des douleurs abdominales et cherche à en savoir plus. Tout comme du reste beaucoup de patients trouvés sur place, hier matin. Ailleurs, à l’Hôpital général de Grand-Yoff, ex- Cto, c’est le même calvaire que les malades venus se faire consulter vivent, en plus d’une souffrance qui leur arrache le sourire. Disposés en rang sur des chaises au service de médecine générale, le ticket de consultation bien empoigné, l’impatience au bout des lèvres, ils espèrent depuis plusieurs heures voir un médecin prendre leurs préoccupations en compte. Mais, il faudra encore patienter. Les quelques médecins de garde sont débordés.

Passé à l’échelle, c’est la population nationale qui est affectée par l’insuffisance de personnels de santé. Par exemple, le Sénégal aurait pu réduire son gap de 7 974 sages-femmes pour répondre à la norme de l’Oms qui est de six sages-femmes pour mille naissances, s’il pouvait recruter les 1 217 sages-femmes actuellement en chômage. En 2010, le gouvernement a recruté 800 agents de santé dont 111 sages-femmes.

Ce déficit de personnel était donné par la vice-présidente de l’Association nationale des sages-femmes d’Etat du Sénégal (Ansfes), Mme Bigué Bâ Mbodj, lors de la publication du rapport mondial sur la pratique de la sage-femme. D’après le rapport publié en début d’année sur l’état de la pratique de la sage-femme dans le monde, le Sénégal compte en dépit des 990 sages-femmes, 126 obstétriciens, 14 généralistes, 60 autres soignants, 1 603 travailleurs de santé communautaire, tous ayant des compétences de sages-femmes.

Lors du 27e Congrès de la société d’anesthésie-réanimation d’Afrique noire francophone (Saranf), couplé au 5e Congrès de la société sénégalaise d’Anesthésie-réanimation et de médecine d’urgence, les spécialistes sénégalais attiraient l’attention sur leur nombre modique par rapport aux 12 millions d’habitants. ‘L’effectif est d’une trentaine voire quarantaine de médecins anesthésistes diplômés, avec une dizaine à tout casser de médecins urgentistes diplômés’, indiquait le chargé de la communication du comité scientifique, le docteur Yahya Diop. Le Sénégal étant aussi loin du ratio de deux infirmiers pour un médecin, en zone rurale, ce sont les populations qui souffrent le plus de ce manque criard de personnels de santé. Les deux tiers de l’effectif national des travailleurs étant concentrés à Dakar.

Au-delà, c’est aussi l’Afrique qui connaît une pénurie de ressources humaines en santé à tous les niveaux du système. Son ratio est estimé moins de trois travailleurs pour 1 000 habitants, comparé avec les Etats-Unis où on note près de 24 travailleurs pour le même nombre de patients. Cumulé, le déficit sur le continent est de 800 mille travailleurs. L’Oms tablait dans son rapport de 2006 sur une augmentation des travailleurs de plus de 130 %. Un taux encore actuel. Pourtant, les dirigeants africains avaient pris l’engagement, en 2001 à Abuja, d’allouer 15 % de leur budget national au secteur de la santé. Jusque-là, seuls quatre pays l’ont respecté.

Vers un début de solution

Tous ces manquements plombent le bon fonctionnement du système et l’amélioration de la santé des populations en Afrique. C’est pour cela qu’une trentaine de participants de 11 pays d’Afrique francophone de l’Ouest et du Centre prennent part, depuis hier à Dakar, à une session de formation sur ‘la gouvernance, le leadership et les politiques dans le domaine des ressources humaines pour la santé’. Ainsi, directeurs, experts des ressources humaines en santé, gestionnaires des services et programmes de santé, universitaires et chercheurs dans le domaine verront, pendant deux semaines, leurs compétences renforcées dans divers domaines. L’on retient le contexte général des Ressources humaines pour la santé (Rhs), le marché de la force du travail, le contexte politique de santé sur les Rhs, le plan stratégique pour le développement des Rhs, le financement des Rhs, le management et le plaidoyer et le leadership des Rhs ainsi que le suivi et évaluation.

Le but étant de disposer de plus d’écoute de la part des décideurs afin d’obtenir les allocations budgétaires nécessaires pour le recrutement des ressources humaines dont le secteur de la santé a besoin pour satisfaire la demande en santé. ‘Dans un contexte d’arbitrages de plus en plus serrés, où les finances publiques doivent doter chaque secteur de moyen pour créer les conditions de sa contribution au développement économique et social du pays, le secteur de la santé doit être proactif. Ceci, pour ne pas être laissé en rade dans cette concurrence imposée par le nécessaire cadrage auquel est soumis tout gouvernement au regard des nombreuses priorités et de l’étroitesse des moyens pour y faire face’, soutient la représentante de l’Oms, Dr Alimata Jeanne Diarra-Nama. Elle estime qu’il faut plus de ressources humaines, plus de personnels de santé, avec des qualifications pointues et complémentaires, pour une bonne prise en charge des besoins sanitaires des populations. Mieux, ajoute-t-elle, il faut ensuite les recruter et bien les répartir pour produire des prestations utiles (…) pour mettre fin à l’inacceptable exclusion dont sont victimes nombre de concitoyens.

La conviction de l’Oms est d’autant plus acceptable, selon le directeur du Centre africain d’études supérieures en gestion (Cesag), Dr Amani Koffi, qui note que ‘l’absence de bonnes politiques des ressources humaines, d’un leadership stratégique et d’une gouvernance dans le secteur de la santé en Afrique est un facteur d’échec des efforts pour juguler la pénurie de main-d’œuvre et le lourd fardeau de la maladie’. La directrice du l’Institut de santé et développement (Ised) de l’Ucad, Pr. Anta Tal Dia invite, quant à elle, à la mise en œuvre des plans stratégiques nationaux pour les ressources humaines pour la santé. Ces plans ont été déjà élaborés, comme c’est le cas au Mali.

Abdoulaye SIDY

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