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Le soleil | Sénégal | 27/09/2014 | Lire l'article original
La Couverture Maladie Universelle (CMU) va monter en puissance en 2015. L’assurance est donnée par le Pr. Seydou Boubacar Badiane, coordonnateur de la Cellule d’appui à la mise en œuvre de la Cmu. Il tire un bilan positif de la première année d’existence de cette initiative du président de la République, Macky Sall, fondée sur le souci de réduire les inégalités en termes d’accès aux soins de santé et de restaurer l’équité dans le système sanitaire.
Professeur, la Cmu a été lancée le 20 septembre 2013. Quel bilan tirez-vous dans sa mise en œuvre ?
La Couverture maladie universelle vise à faciliter l’accès des Sénégalais aux soins, en particulier les couches vulnérables. Elle cherche à rétablir l’équité en termes d’accès aux soins. S’agissant du bilan, nous pouvons le tirer à partir de 3 grands volets, dont en premier l’assurance maladie. Le deuxième volet, c’est la gratuité. Le 3ème est l’assurance maladie obligatoire. C’est tout ce qui concerne les salariés et est lié aux imputations budgétaires. Nous avons fait le bilan pour l’aspect qui relève du ministère de la Santé et de l’Action sociale. Il s’agit des mutuelles de santé et des initiatives de gratuité. Nous pouvons dire que 2013 et 2014 constituent une phase de démonstration de la stratégie qui devrait servir de rampe de lancement du projet.
Cette première année est marquée par l’ouverture des mutuelles de santé (106) et la réhabilitation d’autres (20). Il faut le dire, c’est un travail colossal, parce que le processus de création d’une mutuelle peut durer 9 mois. Mais nous avons réformé les procédures. Aujourd’hui, le nombre d’adhérents est passé de 143.864 en décembre 2013 à 166.130 en juin 2014. C’est important. Nous avons constaté qu’il y a des régions où des mutuelles ont été mises en place depuis 2011. Nous avons constaté aussi que le processus a été rapide dans des zones où il y a un leadership local fort, un partenaire comme au centre. Par contre, nous avons obtenu des résultats mitigés dans les zones qui n’avaient pas de mutuelles comme au nord et au sud.
Combien de personnes ont été prises en charge à travers les initiatives de gratuité ?
Nous avons obtenu de bons résultats avec les initiatives de gratuité. Aujourd’hui, plus de 666.237 enfants de 0 à 5 ans ont été consultés gratuitement et 60.000 ont été hospitalisés sans que leur famille ne dépense un franc. De plus, 318.000 ont été vaccinés. Les médecins officiant dans les régions attestent que les femmes se rendent de plus en plus dans les structures sanitaires pour des consultations et qu’elles n’attendent plus leur époux pour faire soigner leurs enfants. Les médecins lient la baisse de la mortalité maternelle et infantile aux initiatives de gratuité. Les consultations ont augmenté, parce que tout simplement il n’y a pas une contrainte financière pour l’essentiel des maladies. En outre, 6.537 femmes ont bénéficié de la césarienne durant le premier semestre, contre 6.720 pour toute l’année 2013. De façon globale, l’accès aux soins s’est amélioré. Mais c’est à partir de 2015 que la Cmu va monter en puissance. Nous aurons non seulement maillé toute la région de Dakar, mais nous allons aussi intégrer les 42.000 ménages bénéficiaires de la bourse de sécurité familiale. Si nous faisons le cumul à raison de 8 personnes par famille, les bénéficiaires augmenteront de façon considérable.
Le ministère de la Santé et de l’Action sociale a signé une convention avec les mutuelles. Quelles sont les mesures prises pour garantir une gestion transparente des fonds alloués à ces structures ?
Il y avait beaucoup de manquements du point de vue de la gestion des mutuelles de santé. Il arrive souvent que l’on dise aux membres que leur mutuelle n’a pas de fonds ; ce qui est à l’origine de leur désengagement. Nous avons tiré les enseignements. Nous avons pré-positionné de l’argent. C’est pour cela que nous avons formé les responsables et les gestionnaires en comptabilité et gestion, élaboré un manuel de procédures de gestion et mis en place des comités départementaux composés de tous les acteurs clés placés sous la supervision du préfet. Nous avons essayé de verrouiller en exigeant à l’infirmier ou au praticien de remplir une fiche de plusieurs pages. Mais lors des ateliers, les personnes ont soutenu que c’était contraignant pour un infirmier de se mettre à remplir 5 feuilles, alors qu’il a plusieurs malades. Nous avons décidé d’alléger les procédures.
Quelles sont les prochaines étapes du processus de création des mutuelles ?
La prochaine phase, c’est de passer d’un département par région à 2 départements par région. Ensuite, parmi les critères, c’est avoir un partenaire, un leader local et une démographie importante. Donc, nous allons progressivement étendre et garantir une couverture de plus en plus importante. La plupart des pays ont comme horizon 2030. C’est un processus long. Nous allons nous atteler à atteindre les objectifs qu’on nous a assignés. Ainsi, plus de Sénégalais seront pris en charge sur le plan sanitaire grâce à cette initiative du président de la République.
Peut-on s’attendre à un ciblage poussé des couches vulnérables ?
Nous avons un fichier national des indigents élaboré sous la supervision de la Délégation à la protection sociale. Chaque ministère peut tirer les données en fonction de ses besoins. Aujourd’hui, la disparité relève de l’offre et non de la demande. Le Sénégal a plus de structures sur la façade maritime. Avec les partenaires, le ministère de la Santé a un projet de construction de centres de santé au sud et à l’est du pays.
La Cmu exige beaucoup de fonds. Quelles sont les stratégies qui seront mises en œuvre pour assurer la disponibilité du financement ?
La Cmu exige un financement conséquent. Il nous faut beaucoup de moyens pour couvrir les besoins. Pour les enfants de 0 à 5 ans, nous couvrons les maladies les plus courantes qui nécessitent, dans la plupart des cas, des hospitalisations. L’idéal, c’est de couvrir toutes les maladies. Pour le moment, nous essayons de ne couvrir que les maladies les plus courantes. S’il y avait suffisamment de fonds, la prise en charge intégrale serait l’idéal. Mais, il faut le reconnaître, le Sénégal n’aura jamais suffisamment d’argent pour couvrir tous les besoins en santé. C’est pour cela que nous comptons sur les financements innovants. Je veux faire allusion aux taxes sur les transports, la téléphonie et sur les autres produits de luxe. Il faut que tout cela soit systématisé pour disposer d’un financement pérenne.
Quelles sont les mesures préconisées pour la pérennisation de la Cmu ?
Je suis persuadé que nous ne pouvons plus revenir en arrière. Nous n’allons pas nous contenter d’une volonté subjective de la maintenir. Sur le plan juridique et règlementaire, nous sommes en train d’élaborer un projet de loi qui va régir la Cmu. Ce travail se fait avec la participation des services des autres ministères et des membres de la société civile. Si le cadre règlementaire est défini avec les décrets d’application, les prochains chefs d’Etat ne peuvent pas la suspendre. En fait, la Cmu contribue à l’amélioration de l’accès des populations aux soins de santé. Un accès longtemps obéré par l’offre de soins. Il faut faire en sorte que les pauvres soient pris en charge, qu’ils puissent se soigner. La mise en œuvre de la Cmu est confiée au ministère de la Santé et de l’Action sociale, mais il faut la participation des autres ministères. Il faut faire recours à toutes les compétences pour engranger de bons résultats. Toujours dans le cadre de la pérennisation, nous sommes en train de concevoir une plateforme informatisée de gestion pour traiter toutes les données venant des différentes zones du pays.
Propos recueillis par Idrissa SANE
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