Au Sénégal, la santé oculaire va mal. Le budget annuel alloué à la santé de l’œil est de 8 millions de CFA et quasi indisponible pour les ophtalmologues. Ces spécialistes, d’ailleurs, ne sont que quelques 61 praticiens dont les 57 exercent à Dakar. Ce qui fait que 9 régions sur les 14 n’ont pas d’ophtalmologues. Dans ce domaine le manque de volonté est manifeste alors que 24.000 personnes sont chaque année menacées de cécité et viennent s’ajouter à plus de 165.000 sénégalais aveugles, trois fois plus de mal voyant alors que 80% des cas pourraient être évités.

Une mauvaise coordination des centres de soins, un manque manifeste dans l’engagement des autorités sanitaires et l’inexistence de budget consacré à la vue constituent le fond oculaire de notre pays. En prélude à la journée mondiale célébrée hier, jeudi 8 octobre, les spécialistes sont montés au créneau pour dénoncer, chiffres et statistiques à l’appui, ce sombre état des lieux.

Déclarée parent pauvre du système sanitaire, la santé oculaire est dans un flou total avec un personnel insuffisant et vieillissant. En atteste, 9 des 14 régions, dont Fatick, Kafrine, Tamba, Kédougou, Sédhiou, Kolda, Louga, n’ont aucun spécialiste dans ce domaine. Ce qui expliquerait d’ailleurs que des malades se tournent vers la Gambie qui offre des prestations aux ressortissants Sénégalais. Car le Sénégal compte près de 165.000 aveugles auxquels s’ajouteront quelques 24.000 autres cette année et trois fois plus de malvoyant.

Les affections oculaires qui sont la cause de tout cela sont nombreuses au Sénégal et mal prises en charge tant dans la prévention que le dépistage. Suffisant pour que le Dr Boubacar Sarr, point focal du Programme de santé oculaire dénonce également la très faible fourniture de soins au niveau primaire (poste de santé) son inexistence au milieu communautaire. Ce qui est matérialisé par le nombre de cataracte qui passe de 24.000 à 28.000.

L’insuffisance de l’offre sanitaire a, par conséquent, ouvert la voie au charlatanisme et autres tradipraticiens qui aggravent les affections oculaires. La cataracte, à elle seule, est responsable de 35.000 à 50.000 aveugles. Le trachome, qui est la deuxième cause, suit avec 25.000 cas de cécité et les porteurs de trichiasis sont estimés à 91.000. Les régions de Thiès, Diourbel et Louga sont les plus touchées, ont tenu à expliquer les spécialistes.

Les professionnels de la santé oculaire ont également déploré le taux de dépistage trop faible en milieu scolaire alors que la cécité de l’enfant continue d’inquiéter. « Toutes les minutes, un enfant devient aveugle dans le monde » ont-ils encore averti.

Le thème de la journée mondiale de la vue retenu cette année par l’Agence internationale pour la prévention de la cécité (IAPB) est « Santé oculaire pour tous ». Il s’inscrit dans le plan d’action mondiale vers la santé mondiale universelle 2014-2019. Les responsables de l’œil au Sénégal ont donc bien raison de réagir. Car n’eut été l’appui de quelques partenaires, le budget de 8.000.000 alloué à l’œil reste dérisoire face aux nombreux défis.

Cheikh Tidiane MBENGUE

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