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GUINEE MADAGASCAR MALI R.D. CONGO SENEGAL TOGO
Sud Quotidien | Sénégal | 09/03/2017 | Lire l'article original
Alors que la prise en charge médicale des hémodialysés dans les structures de santé publique est gratuite, l’accompagnement et la disponibilité de places posent problème. Beaucoup de personnes souffrant d’insuffisance rénale voient en effet leur traitement interrompu, faute de moyens. Avec les maladies non transmissibles comme le diabète et l’hypertension qui prennent des proportions importantes, les associations de soutien aux personnes en besoin d’hémodialyse font le plaidoyer pour plus de centres de prise en charge, surtout dans les régions.
Mais aussi pour l’aide aux malades afin de soulager leurs peines. De l’avis du mouvement des insuffisants rénaux du Sénégal, 48 centres de dialyse sont nécessaires pour absorber les 19500 patients enregistrés. Sud quotidien, dans ce dossier, est allé à la rencontre des personnes ressources et spécialistes afin d’identifier les problèmes.
Le calvaire des hémodialyses
Dakar dispose de plusieurs centres d’hémodialyse, en plus des autres structures hospitalières publiques. Malgré ces efforts du gouvernement de rendre gratuite et accessible l’hémodialyse au Sénégal, la demande reste insatisfaite.
Dans les régions du Sénégal, le problème est encore crucial, d’autres localités n’en disposent pas encore et sont obligées de se rabattre dans les sites les plus proches.
Pour certaines personnes rencontrées à Dakar, la maladie est très coûteuse et encombrante. « Deux fois dans la semaine, il nous faut faire la dialyse. Les déplacements sont très chers et hors de portée car il nous faut prendre le taxi et rentrer avec, si on n’est pas véhiculé. Après les soins, c’est un autre problème. On ressent une grande fatigue et il faut bien s’alimenter pour survivre », a fait savoir Baye Fallou Seck à Grand Yoff.
Au sein de sa famille, on se donne un coup de main pour pouvoir subvenir à ses besoins. « Nous sommes une famille modeste, nous n’avons pas les moyens mais on se débrouille pour lui permettre de suivre ses soins », fait savoir Mariama Seck, sœur du malade. Et de renchérir : « son alimentation ne peut pas être celle de la famille, il a un régime spécial et comme vous le constatez, ce n’est pas donné à tout le monde avec la conjoncture actuelle ».
Aujourd’hui, même si l’hémodialyse est gratuite dans certaines structures de santé, les médicaments ne le sont pas. Les ordonnances, les bilans médicaux s’accumulent et il faut les faire. Dans cette perspective, les personnes bénéficiaires des hémodialyses demandent au gouvernement de leur venir en aide à travers la solidarité nationale ou encore les bourses de sécurité familiale. « La plupart des malades sont des démunis. D’autres sont sans soutien de famille. Les riches se prennent en charge dans les cliniques privés ou hors du pays. La gratuité des soins étant une bonne chose, mais nous avons besoin d’aide pour les médicaments et l’alimentation. Une autre aide du gouvernement serait la bienvenue à travers ses démembrements », a-t-il souligné.
Le privé à la rescousse du public
Dans les centres de dialyse du secteur privé, les patients ne se plaignent pas trop pour la prise en charge. Au centre hémodialyse Abc de Dakar, ils ont tissé des liens de convivialité, qu’ils essaient de sauvegarder. Dans ces lieux, les malades viennent avec leur prise en charge et sont aussitôt acceptés. « Je viens de Touba, j’ai été référé dans une structure de santé publique pour les besoins de la dialyse, mais à chaque fois que j’y allais, il y avait un problème de place et il fallait encore attendre. J’ai perdu du temps, jusqu’à ce qu’un médecin me fasse savoir que dans la semaine si je ne fais pas de dialyse, je risque de mourir. C’est là qu’on m’a recommandé au centre Abc et depuis lors, je fais mes séances sans problème, régulièrement et je vais bien », a souligné une femme trouvée sur place. Ici, la dialyse n’est pas gratuite, même si elle est subventionnée, il faut une prise en charge médicale ou débourser de l’argent. Pour les malades du privé comme du public, le bilan médical est très cher. « Il nous faut faire un bilan tous les mois. Mais c’est par manque de moyens que nous les faisons tous les six mois. Le gouvernement doit nous aider dans ce cadre à subventionner les analyses et les médicaments », confie une autre femme.
Une gratuité qui tue le malade
Ils sont très nombreux, à penser que la gratuité de la dialyse est valable partout. Certainement pas, car elle l’est seulement dans le public. Pour les malades, cette annonce du ministère de la Santé et de l’action sociale n’a fait qu’augmenter leur calvaire. Au sein des familles, les donateurs se font de plus en plus rares. Ils sont obligés de se prendre en charge sur tous les plans alors que le traitement engloble beaucoup de choses dont les analyses, les poches de sang, le transport et l’alimentation. « La gratuité dans le secteur privé avec la prise en charge est une bonne chose. On applaudit, mais il y a un problème de communication, qui n’a pas été bien fait pour faire comprendre à nos accompagnés que tout ce qui suit ne l’est pas », a fait savoir Baye Fallou Seck de Grand Yoff. Et de poursuivre : « cette annonce, nous a rendu plus vulnérable et des fois on n’a même pas les moyens pour suivre correctement les séances de dialyse ».
Pour le mouvement des insuffisants rénaux du Sénégal, leurs bailleurs familiaux et autres ont compris qu’elle l’était même dans le secteur privé. Cette déclaration a eu pour principale conséquence, la raréfaction de leurs aides sinon leur tarissement. Et de poursuivre : « avec l’annonce sur la gratuité de la dialyse, il s’en est suivi une incapacité pour beaucoup d’entre nous, de faire des dialyses et, en définitive, de nombreux malades sont morts suite à toutes ces déclarations ».
48 centres de dialyse pour 19500 patients, pour absorber le gap
Selon le mouvement des insuffisants rénaux du Sénégal, le pays compte 19.500 insuffisants rénaux dont 8.000 à Dakar. Le taux brut de croissance annuelle serait de 4.000 insuffisants. Un taux qui ira crescendo car les diabétiques et les hypertendus, eux-mêmes en croissance exponentielle, sont le réservoir naturel de l’insuffisance rénale. A en croire le mouvement, le Sénégal a besoin de 48 centres de dialyse pourvus de 1191 générateurs, dont 635 à Dakar, pour un coût total de 17 milliards de Fcfa dont 865 millions pour absorber le gap de malades en attente.
En attendant la disponibilité de ces ressources financières, « les insuffisants rénaux meurent et continuent de mourir dans l’indifférence nationale », se plaignent les partisans de El Hadj Hamidou Diallo, président (Mirs). Et de poursuivre : « l’objectif de notre association est de trouver des ressources pour aider les insuffisants rénaux chroniques, de protéger les insuffisants rénaux aigus. De sensibiliser la population contre cette tueuse silencieuse ».
Prise en charge des malades
Le mouvement des insuffisants rénaux du Sénégal indique que pour les patients déjà pris en charge par les structures publiques, la dialyse est effectivement gratuite et bien faite. « Ils sont moins de 500 personnes pour tout le Sénégal », note-t-on. « Mais, précise t-il, pour l’énorme majorité des malades, près de 18.000 auxquels il faut ajouter 4.000 nouveaux malades par an, la réponse est la mort dans l’indifférence nationale totale. Pour le recours au secteur privé avec une dialyse à 65.000 frs la séance 12 fois par mois soit près de 800.000 frs mensuels tout frais compris, ici aussi, la réponse est la mort certaine après avoir appauvri tous les membres de la famille proche du malade ».
Comme les malades, le mouvement préconise aux autorités, de faire de l’insuffisance rénale, un programme des Nations-unies, au même titre que le sont la lutte contre le Sida, celle contre la tuberculose et celle contre le paludisme. Et d’installer un centre de dialyse dans chaque département du Sénégal pour sauver plus de vies.
Le Gouvernement sur la prise en charge de l’hémodialyse
L’hémodialyse est aujourd’hui gratuite dans toutes les structures de santé du public. Des régions ont déjà bénéficié de centres et les patients qui étaient obligés de déménager dans la capitale, sont retournés dans leurs régions d’origine. Le ministère de la Santé et de l’Action sociale dans sa politique d’accessibilité des soins compte réaliser 23 centres de dialyse d’ici 2018. Une annonce qui a été faite par Amad Diouf, responsable de la Direction des infrastructures, des équipements et de la maintenance, à l’occasion de la cérémonie commémorant la journée mondiale du rein, 2016.
Pour ce dernier, 7 centres fonctionnels étaient en construction avec 89 générateurs de dialyse, des infrastructures que l’Etat a commencé à livrer depuis fin 2016. D’autres localités, vont bientôt réceptionner leur centre et très bientôt les déplacements ne seront qu’un mauvais souvenir. Au-delà de cette gratuité, d’autres problèmes surviennent dont la subvention des médicaments, des analyses, etc. Autre progrès du gouvernement, la loi sur la transplantation rénale qui doit soulager le calvaire de la population souffrant d’insuffisance rénale. Voté en 2016, patients comme médecins sont en attente de sa mise en œuvre afin de faciliter le démarrage de l’implantation.
Denise ZAROUR MEDANG
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