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Sud Quotidien | Sénégal | 05/05/2018 | Lire l'article original
Elles sont des milliers de femmes qui travaillent à une meilleure prise en charge médicale de leurs sœurs et à réduire la mortalité maternelle et néo natale. Elles sont toujours partout, même dans les coins les plus reculés du pays. Ces « donneuses de vie », plus communément appelées « sages-femmes », seront célébrées aujourd’hui à l’Université Cheikh Anta Diop, samedi 05 mai, en cette journée internationale qui leur est dédiée. Le thème retenu est : « A l’équité pour des services de qualité et les soins obstétricaux et néonataux ». A noter que 14 sages-femmes désignées comme des modèles dans leurs régions seront primées. En prélude à cette journée, Sud Quotidien s’est entretenu avec Penda Ndiaye Gassama, maitresse sage-femme du district centre de Gaspard Kamara.
Maitresse sage-femme, pouvez-vous nous décliner votre cursus ?
Depuis 2010, je suis la maitresse sage-femme de ce centre de santé de Gaspard Kamara. Je suis sortie de l’école des sages-femmes où j’ai fait la formation pendant trois ans. Je suis de la promotion de 1987 et aussitôt, on m’a affecté au Nord à Matam. Pour vous dire qu’au début, c’est moi-même qui avais choisi cette région. Je n’ai jamais voulu être à Dakar, car je voulais être dans les régions pour voir ce que vivent les femmes. Même au fin fond du Sénégal, il y a des femmes qui sont là-bas et qui ont besoin de soins. Donc quand on m’a affecté là-bas, cela ne m’a rien fait et j’avais rejoint mon poste tout naturellement et j’ai travaillé dans cette localité pendant trois ans.
On sait que dans ces localités, il est très difficile d’exercer son métier ?
Nos conditions n’étaient pas vraiment les meilleures. Car, dans le centre de santé où j’étais, on avait d’énormes difficultés pour les déplacements. Il n’y avait qu’une seule voiture qui était utilisée par le médecin-chef. Il fallait faire des stratégies avancées dans les autres villages les plus reculés où il n’y avait pas de sages-femmes. Il y avait des postes de santé aussi où il n’y avait que des matrones. Et dans ces localités, il y avait des femmes qui avaient vraiment besoin de nos services à travers les consultations post, pré- natales et la planification familiale. Il fallait se déplacer de temps à autre. Des fois, on prenait des véhicules qui mettaient toute une journée pour arriver dans les lieux indiqués. On montait même dans des charrettes, on portait sur nos têtes le matériel, juste pour pouvoir faire accéder l’offre de service aux populations. Mais cela valait vraiment la peine.
Quelles sont les qualités que doivent avoir une sage-femme face aux patientes ?
Je pense que la sage-femme doit être toujours prête dans son lieu de travail à recevoir les bonnes dames qui ont vraiment besoin de nous. Car, si on est engagé, on ne ménage aucun effort. Je sais que la sage-femme qui est engagée, dès qu’elle arrive dans son lieu de travail, elle sait ce qu’elle doit faire, à savoir bien accueillir les patientes, bien s’occuper d’elles. On voit dans notre profession qu’il y a des femmes qui ne viennent pas pour des soins mais pour recueillir des conseils et même quand elles ont des problèmes dans leurs foyers, certaines femmes se tournent vers la sage-femme. De ce fait, la sage-femme doit avoir une attention, une écoute pour ces dames. Je pense que la génération actuelle doit prendre exemple sur les anciennes sages-femmes. Même si la formation a évolué, je pense que l’engagement doit venir de chacune d’entre nous qui exerce le métier de sage-femme.
Comme régler les iniquités si on sait que dans certaines zones, il n’y a pas de sage-femme. Quel message pour vos sœurs ?
Le message, c’est de dire à mes sœurs, qu’on est toutes Sénégalaises et dans tous les recoins du Sénégal, il y a des femmes et elles ont besoin de nous. La mortalité maternelle et néo infantile est très élevée dans les coins les plus reculés du Sénégal. Personnellement, je me dis, actuellement, aucune femme ne doit plus mourir d’une hémorragie de la délivrance, ou bien d’un paludisme, parce que la sage-femme doit être là 24 h sur 24 à s’occuper de ces femmes. Si toutes les sages-femmes se concentrent à Dakar, ça revient à zéro, car les résultats dans la prise en charge de la mère et de l’enfant risquent de toujours chuter. Je pense que le ministère de la Santé a vraiment bien voulu mettre en exergue la santé de la reproduction à travers des stratégies. C’est pour cela qu’il y avait des programmes qui ont fait que les sages-femmes ont été déployées dans les régions les plus reculées pour vraiment prendre en charge la santé de la mère et de l’enfant. La sage-femme qui a été recrutée par l’Etat ou les ONG doit pouvoir servir partout.
Qu’est-ce qui vous a vraiment marqué dans votre profession et quelles améliorations souhaitez-vous ?
Je veux que les sages-femmes s’occupent vraiment des femmes. Qu’aucune femme ne meure dans les maternités surtout d’une hémorragie de la délivrance, comme c’était le cas avec une de mes homonymes qui est morte dans une structure de Dakar en laissant trois enfants. L’enseignement que j’ai tiré de cela, c’est qu’après accouchement, il faut majorer la surveillance. On peut dire que la femme va bien et le bébé est là, mais il faut majorer. Toutes les quinze minutes, il faut aller voir la femme, voir si elle saigne, revoir les constantes vitales, revoir si elle va bien. La laisser surtout en salle d’accouchement pour qu’elle soit à côté de la sage-femme et au bout deux heures, s’il n’y a aucun problème, on peut vraiment la laisser descendre en salle de couches, se reposer juste 24 à 48 h avant de rentrer.
Parlez-nous des difficultés ?
Les difficultés ne manquent pas. Mais il faut juste avoir l’engagement, l’amour du métier. Sauver des vies est une cause noble. Pour la santé, il n’y a pas de dimanche ni fête ni jour ouvrable. Nous, les anciennes, on a même porté nos bébés sur nos dos pour aller travailler, on a passé des gardes de nuits en ayant nos bébés couchés dans nos lits de garde. Juste parce qu’on était engagé.
La maitresse sage-femme Penda Ndiaye Gassama vue par ses consœurs : Un modèle à suivre
« Une femme dévouée, exemplaire, une mère pour tous », c’est ce qui ressort des témoignages consœurs. Sage-femme modèle, disponible, elle l’est pour la communauté, le personnel de santé. Gaspard Kamara lui rend hommage en cette journée dédiée aux Sage femmes.
AWA NDIAYE, sage-femme d’état (depuis 3 ans)
« D’abord je dirai que c’est notre maman, à tout le monde. C’est une femme très bien qui a une écoute par rapport à son personnel. Franchement c’est quelqu’un qui nous aide beaucoup dans notre travail, c’est une maitresse dévouée qui a beaucoup de qualité. »
MARIEME SAMBA, coordinatrice santé de la reproduction
« C’est une personne très engagée auprès des malades, auprès du personnel. Elle s’occupe chaque matin, aussi bien de ses malades que du personnel soignant. Elle va en salle d’accouchement, elle va à la consultation pré-natale, post-natale pour s’enquérir de l’état des malades, de leur confort et des conditions d’hospitalisation ».
NDACK DIOP GUEYE, responsable du service social
« Voilà une femme d’une disponibilité rare. Elle est exemplaire de par ses qualités professionnelles. 24H/24, elle est en train de manager la maternité. Une maternité qui peut faire 600 accouchements dans le mois. De ce fait, cela nécessite un engagement en vue de coacher toutes les équipes. Ce qui m’a le plus marqué, c’est qu’après son retour du Japon lors de la formation dans le cadre de l’accouchement humanisé, elle a révolutionné la maternité allant dans le sens de l’humanisation des soins. Elle organise des sections de dialogues, elle organise la classe des parents en vue d’écouter la communauté. C’est ce que nous attendons et nous sommes satisfaits. C’est quelqu’un qui a renforcé la communication interpersonnelle au niveau de la maternité ».
MAIMOUNA SAMB CISSOKO, sage-femme
« Je suis membre de l’équipe cadre et je viens d’arriver dans cet hôpital. Je l’ai trouvée très sociable, travailleuse. Elle s’occupe très bien des patients. Madame Gassama nourrit de la confiance, c’est un modèle comme sage-femme qui va servir aux générations à venir. C’est quelqu’un qui sait communiquer et elle considère les patients comme ses propres parents ».
« BADIENNE GOKH » NDEYE DIOP
« Elle est comme une mer qui ne tarit pas. Elle est sociable, elle fait très bien son travail, elle a de très bonnes relations avec les patients. Aujourd’hui si on doit parler de la réussite de Gaspard Kamara, c’est grâce à elle. Elle travaille de jour comme de nuit sans répit. Elle s’occupe très bien des malades. Elle s’occupe aussi des filles qui ne savent pas qui les a mises enceintes. Elle est partout. Elle fait un travail colossal, on la dérange à n’importe quelle heure ».
Denise ZAROUR MEDANG
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