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Sud Quotidien | Sénégal | 22/04/2020 | Lire l'article original
Face à la prolifération progressive des cas communautaires dans la contamination du coronavirus depuis deux semaines au Sénégal, le Dr Mohamed Lamine Ly, spécialiste en santé publique, souligne que « la pandémie pourrait revêtir sur notre continent des allures cauchemardesques, en raison de la faiblesse de nos systèmes sanitaires sous financés et sous-équipés alors que la prise en charge des cas graves nécessite des soins intensifs ». Face à ce danger, la blouse blanche préconise « de tabler sur notre expérience en matière de lutte contre les épidémies et d'actionner les leviers communautaires, qui peuvent nous être d'un grand secours ».
En parlant de leviers communautaires pour réfréner la propagation du coronavirus qui, depuis deux semaines, prend de l'ampleur avec la contamination communautaire avec un taux avoisinant 12%, le docteur Mohamed Lamine Ly, spécialiste en santé publique met le focus sur le port généralisé de masques, le rapport de confiance entre politiques mais entre gouvernants et gouvernés pour l'implication de tous dans la lutte contre le coronavirus au Sénégal. Pour le spécialiste de santé publique, il faudra, de plus en plus, aller vers la sensibilisation communautaire, en évitant d'apeurer ou de culpabiliser les populations qu'on doit plutôt inciter à s'approprier les initiatives non pharmaceutiques (INP).
De ce fait, il a estimé que le premier point sur lequel le Sénégal devra insister sera la protection des personnes âgées et/ou vulnérables souffrant d'affections chroniques. Quant aux relais et leaders communautaires, il a déclaré que le ministère de la Santé doit leur transférer des compétences dans les domaines suivants : la formation, la sensibilisation, l'hygiène, la surveillance à base communautaire, la confection des équipements locaux de protection individuelle voire l'enterrement et la gestion des corps. « Il se pourrait même, devant la recrudescence des cas, qu'on en arrive, en profitant des opportunités offertes par la nature pyramidale de notre système sanitaire, à l'implication des acteurs du niveau opérationnel et communautaire dans la prise en charge des cas simples, sur la base d'algorithmes prédéfinis », a-t-il renseigné.
Et d'ajouter : « cette hypothèse se justifie du fait que, de plus en plus de chercheurs émettent l'hypothèse que les nombreux décès constatés depuis le début de la pandémie seraient le fait, non pas de pneumonies virales - mais de micro-thromboses au niveau pulmonaire, qui sont curables grâce à l'administration d'anticoagulants».
De l'avis de Dr Ly, il y a également une toute nouvelle théorie, selon laquelle, le Covid-19 infecterait une bactérie dénommée Prevotella, laquelle provoquerait, en l'absence d'antibiothérapie adéquate, l'hyper-réaction immunitaire responsable du délabrement pulmonaire et de l'issue fatale, dans les cas graves. C'est donc dire qu'une prise en charge des cas, prenant en compte les risques thromboemboliques et infectieux ou tous autres paramètres que la recherche pourra mettre en évidence, pourrait réduire le nombre de cas ayant besoin de soins intensifs et serait une chance pour nos pays pauvres qui disposent de très peu de lits de réanimation. « Nous voyons donc que nos pays ont tout à gagner, en misant sur la carte communautaire pour juguler cette pandémie épouvantable » a-t-il déclaré.
Le maillage de Dakar est fait sur les cas communautaires. Presque tous les districts de la capitale sénégalaise en disposent. La localité de Touba et Ziguinchor ne sont pas en restent ces derniers jours sur la liste. Face à cette situation, le spécialiste de la santé publique, le docteur Ly, a réagi hier, mardi : « nous assistons à la prolifération progressive et inquiétante des cas communautaires, ce qui nous fait perdre nos dernières illusions, sur l'invulnérabilité des Africains au Covid-19.
Pis, la pandémie pourrait revêtir sur notre continent des allures cauchemardesques, en raison de la faiblesse de nos systèmes sanitaires sous-financés et sous-équipés alors que la prise en charge des cas graves nécessite des soins intensifs ». Face à ce danger selon lui « imminent », les recettes asiatiques ou européennes ne risquent pas d'être d'une grande utilité à l'Afrique, en raison du faible niveau de développement socio-économique. « Il ne nous reste dès lors, d'autre choix que de tabler sur notre expérience en matière de lutte contre les épidémies et d'actionner les leviers communautaires, qui peuvent nous être d'un grand secours » a-t-il laissé entendre.
Pour Dr Ly, dans les pays africains, la pandémie se présente sous un jour particulier. Selon lui, il y a d'abord la lenteur de la transmission du virus si on la compare à celle de certains pays européens et asiatiques, qui pourrait n'être liée qu'au faible pourcentage de tests réalisés ou alors relever d'un niveau d'urbanisation moindre comme la démultiplication des contacts dans les transports en commun, les grandes surfaces. Ensuite, Dr Ly fait noter une mortalité apparemment plus faible dans les pays africains peutêtre due aux différences dans les pyramides d'âges avec des populations africaines plus jeunes que chez les Européens et à l'existence fréquente chez les personnes âgées de comorbidités qui sont des facteurs péjoratifs pour le pronostic vital.
Enfin, il a évoqué des facteurs immunitaires, parmi lesquels l'administration habituelle du BCG qui aurait un rôle protecteur pour les enfants dans les pays africains. « Cette aggravation de la situation épidémiologique, de même que les implications socio-anthropologiques de la pandémie font que l'exigence d'un dialogue franc avec les communautés se fait pressante, dans un souci de les responsabiliser dans la mise en œuvre des initiatives non pharmaceutiques (I.N.P), parmi lesquelles le port du masque qui occupe une place de plus en plus centrale » a-t-il soutenu.
Denise ZAROUR MEDANG
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