L'Organisation africaine pour la propriété intellectuelle (Oapi)
se met à la médecine traditionnelle. La préoccupation est d'identifier
les tradipraticiens selon des règles communes aux pays membres de
l'Oapi pour pouvoir harmoniser les procédures d'homologation des
médicaments issus de la pharmacopée traditionnelle.
Après la Conférence des ministres de l'Industrie et de la Santé
de septembre 2002 au Gabon, des experts viennent de se réunir en
Côte d'Ivoire (du 20 au 23 octobre 2003). Parvenir à identifier
les tradipraticiens selon des règles communes aux pays membres de
l'Oapi était de leurs préoccupations. Aussi, pour cette organisation
intergouvernementale, le rêve fait-il dans une "harmonisation des
procédures d'homologation des médicaments issus de la pharmacopée
traditionnelle". Deux "référentiels" ont été adoptés à Grand-Bassam.
Lesquels documents devraient être soumis à la prochaine Conférence
des ministres de l'Oapi.
Réussir à identifier le tradipraticien revient à poser les bases
d'une réglementation de la médecine traditionnelle. D'ailleurs,
l'Oapi fait de la question de l'identification le préalable à toute
réglementation. Elle considère, en outre, que le non-règlement de
cette question "favorise l'émergence de charlatans". Et, dans le
document des experts de l'Oapi, des critères administratifs, communautaires
et médicaux sont proposés. Des conditions qui intègrent "la résidence
dans la localité d'exercice, la jouissance des droits civiques,
l'ancienneté dans la pratique, la notoriété, l'évidence ethnomédicale
ou les résultats obtenus, le respect de l'éthique médicale, l'accessibilité
et la continuité des services, etc.".
Un code de bonne conduite du tradipraticien de santé est aujourd'hui
envisagé. Cet autre praticien de la médecine devant collaborer avec
les agents de santé. En effet, conformément à la déclaration d'Alma-Ata
de 1978 et relative aux soins de santé primaire, la médecine traditionnelle
est à intégrer dans les soins de base. Aujourd'hui, "80 % des populations
africaines utilisent la médecine traditionnelle pour répondre à
leur besoin de soins de santé", d'après l'Organisation mondiale
de la santé (Oms). Et parce que le tradipraticien est à impliquer
dans "l'organisation du système communautaire de soins", l'Oapi
suggère, entre autres, la création, chez chacun de ses membres,
d'une "structure chargée de coordonner les activités de promotion
de la médecine et de la pharmacopée traditionnelles (…), un fichier
des tradipraticiens reconnus".
Concernant l'"harmonisation des procédures d'homologation des médicaments
issus de la pharmacopée traditionnelle", les experts de l'Oapi considèrent
qu'elle "est une étape importante dans le développement d'une véritable
industrie pharmaceutique locale". Selon toujours l'Oms, "25 % des
médicaments modernes sont préparés à base de plantes qui, au départ,
étaient utilisées traditionnellement". Le marché mondial des plantes
médicinales, lui, représente 60 milliards de dollars par an. Ainsi,
à travers l'adoption d'un "référentiel d'homologation", l'Oapi crée-t-elle
"les conditions favorables à une meilleure circulation des médicaments
issus de la pharmacopée traditionnelle". Des commissions techniques
d'homologation des médicaments seraient alors à installer dans les
pays de l'Oapi, voire des comités d'éthique.
Selon Alioune Aw, responsable du Bureau de la médecine traditionnelle
à la Direction de la santé, l'essentiel des recommandations de l'Oapi
sont déjà en vigueur au Sénégal. Et M. Aw qui a participé aux travaux
de Grand-Bassam, était accompagné d'un tradipraticien sénégalais
(Abdoulaye Ndao) qui a eu à présider le groupe ayant "examiné le
référentiel sur l'harmonisation des procédures d'identification
des tradipraticiens". Par ailleurs, il est à rappeler l'"Initiative
pour la protection et la valorisation des inventions africaines
en matière de médicaments". D'après ce document adopté à Libreville
en 2002, "entre 1998 et 2001, un total de 546 brevets portant sur
des inventions relatives aux médicaments" a été enregistré par l'Oapi.
Mais, seuls "neuf de ces brevets ont été déposés par des ressortissants
des pays membres de l'organisation".
Par : Assane SAADA
Lire l'article original : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=5548
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