Dans un quartier de Thiès, la deuxième ville du Sénégal, il a fallu
l'arrivée d'une sage-femme dévouée et à l'écoute de la communauté
pour que la majorité des femmes enceintes fassent leurs consultations
prénatales, que le taux d'accouchements assistés grimpe à 60 %.
Récit d'une bonne pratique.
Petit Thialy est un quartier de la ville de Thiès. La pression
démographique a amené les autorités à y implanter un poste de santé
depuis quelques années. La structure a fonctionné, à ses débuts,
avec une infirmière chef de poste intervenant dans tous les domaines
de santé.
Les femmes, analphabètes et très réservées sur les questions touchant
à la sexualité, ne fréquentaient presque pas le poste de santé.
Le volet santé de la reproduction y était faiblement pris en charge.
Aujourd'hui, le taux de couverture en consultation prénatale semble
évoluer favorablement. Il était de 61,7 % en juillet dernier au
poste de santé de Petit Thialy tandis que la moyenne dans la région
de Thiès a tourné autour de 37,46 % au premier trimestre 2003.
Selon Aïssatou Sarr, coordonnatrice du volet santé de la reproduction
à la région médicale, les choses ont véritablement changé à Petit
Thialy et dans les environs depuis l'affectation, il y a trois ans
d'une sage-femme, Léonie Nion.
"Dès ma prise de service, j'ai constaté que les femmes ne connaissaient
pas l'intérêt d'un bon suivi de leur grossesse pour éviter ou amoindrir
les risques à l'accouchement", a-t-elle indiqué.
Ayant compris que son poste de santé polarise Petit Thialy, Thimakh
Peul, Thionakh sérère, Grand Thialy, et Thialaw, Mme Léonie Nion
est passée par les "mbotaay" traditionnels (associations de classes
d'âge) pour faire passer les informations sur l'éducation pour la
santé successivement auprès des jeunes filles, des femmes en âge
de procréer ; celles qui ont atteint la ménopause étaient réunies
pour échanger. Elles étaient toutes au même niveau d'informations
grâce aux causeries sur des thèmes intéressant la santé de la reproduction
et suivies de discussions.
Selon Mme Nion, cette stratégie explique en grande partie le taux
élevé de couverture en consultation prénatale au poste de santé
de Petit Thialy. "De plus en plus, les tabous ou autres réticences
liés à l'ignorance ou aux pesanteurs sociales sont vaincus", a-t-elle
ajouté.
Cette approche utilisée a eu une incidence sur le taux d'accouchements
assistés qui est passé de 47,9 % en juin 2003 à environ 60 % en
juillet-août 2003 au poste de santé de Petit Thialy. Dans la région,
il est de 48,2 %, les structures privées non comprises.
Pour gagner le pari d'une bonne prise en charge de la santé de la
reproduction dans notre pays, Mme Léonie Nion est formelle : "la
lutte contre la mortalité et la morbidité maternelle n'aboutira
que si l'on s'appuie sur le corps de métier des sages-femmes. Elles
ont la formation pointue et la volonté de servir."
Augmentation des accouchements assistés
Ce n'est pas qu'elle prêche pour sa chapelle, mais elle lance
un cri de cœur réclamant la formation d'un plus grand nombre de
sages-femmes. C'est dire qu'une option claire devrait être davantage
affichée par les pouvoirs publics dans la formation et aussi la
construction de maternités bien équipées dans les grandes villes.
"Dans une maternité digne de ce nom, il faut du matériel de surveillance,
de réanimation, mais également d'unités spéciales capables de prendre
en charge des prématurés", dit Mme Nion. Or, dans une capitale régionale
comme Thiès, seule la structure hospitalière privée dispose d'une
crèche. À preuve, "les pays scandinaves, qui font les meilleures
performances en matière de lutte contre la mortalité maternelle
dans le monde, sont les pays où le nombre de sages-femmes formées
est le plus élevé au monde", fait-elle savoir.
Mbaye Bâ
Lire l'article original : http://www.lesoleil.sn/santeenv/article.cfm?articles__id=32114
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