Inquiet du fonctionnement des centres hospitaliers régionaux (CHR),
le député Toussaint Abel Coulibaly a interpellé le gouvernement.
Il a attiré l'attention des autorités sur certains aspects qui fondent
son inquiétude. Le gouvernement a répondu vendredi 05 décembre 2003
à l'Assemblée nationale.
Manque de spécialistes dans des domaines, de matériels, de véhicules
et de produits pharmaceutiques pour les soins de première nécessité
dans les CHR, insuffisance de salles ou de lits d'hospitalisation
; absence ou vétusté des équipements techniques d'analyse, ce sont
là entre autres les préoccupations qui ont amené le député Abel
Coulibaly à interpeller le gouvernement.
Partant du constat que le meilleur indicateur de pauvreté est la
prise en charge de la maladie et que toute action tendant à l'épanouissement
de l'homme ne peut être menée à terme si parmi les données de base,
ne figure pas au premier rang la santé, le député a demandé la dotation
de chaque CHR d'au moins deux ambulances. Il a également interrogé
le ministre de la Santé sur la politique des CHR du ministère à
court, moyen et long terme.
En réponse au député Abel Coulibaly, le ministre de la Santé, Alain
Yoda a d'abord rappelé la structuration du système de santé. Un
système qui se présente sous forme pyramidale à trois niveaux. Chaque
échelon a un rôle spécifique dans l'offre de prestations de soins
de santé. Ce sont les Centres de santé et de promotion sociale (CSPS),
les Centres médicaux avec antenne chirurgicale (CMA) ; les centres
hospitaliers régionaux (CHR) et les Centres hospitaliers universitaires
(CHU).
La situation et le fonctionnement des CHR
Le Burkina Faso, selon le ministre Yoda, compte neuf CHR répartis
sur l'ensemble du pays. Leur localisation tient compte, d'une part
de l'organisation administrative du pays et d'autre part, du souci
d'une meilleure couverture sanitaire nationale. Ils ont pour missions,
l'hébergement et les soins des malades, l'enseignement et la recherche.
Les CHR doivent également permettre la prise en charge de toute
personne qui s'y présente, sans tenir compte de son statut social.
Des établissements publics à caractère administratif (EPA), les
CHR sont devenus depuis novembre 2002, des établissements publics
de santé (EPS). Malgré ce statut, les neuf CHR souffrent d'un manque
crucial de médecins spécialistes. En effet, selon le ministre de
la Santé, notre pays ne dispose que de dix-huit spécialistes pour
l'ensemble des CHR dont sept médecins spécialistes en chirurgie,
quatre en ophtalmologie, trois en pédiatrie, deux en gynécologie,
un en anesthésiologie et un en radiologie. A cela, s'ajoutent les
six médecins cubains spécialistes. Les CHR de Gaoua et de Fada N'Gourma
n'ont aucun spécialiste.
Qu'est-ce qui justifie cette mauvaise répartition ? Le ministre
Alain Yoda dit que cette situation s'explique par les contraintes
des corps et les nécessités de formation dans les deux CHU (Bobo
et Ouagadougou) exigeant la présence des médecins spécialistes dans
ces deux villes. Il y a aussi, poursuit-il, la tendance actuelle
à doter les CMA urbains de quelques spécialistes pour désengorger
les services des urgences des CHU. Cette pénurie en spécialistes
accentue l'insuffisance en équipement car estime t-il, la disponibilité
de compétences entraîne toujours l'amélioration des plateaux techniques.
Le déficit en moyens de déplacement notamment les ambulances constitue
un "casse-tête chinois" pour les CHR. M. Alain Yoda a relevé que
tous les CHR disposent actuellement d'au moins une ambulance fonctionnelle.
Ce qui reste toujours en deçà des besoins des populations. L'idéal
pour le ministre serait de doter chaque CHR de deux ambulances.
Les CHR disposent-ils suffisamment de lits d'hospitalisation, surtout
en période d'épidémie ? Le manque de matériel de couchage en ces
périodes ne se justifie pas par un manque équipement, mais par le
nombre croissant de malades ; car, a noté le ministre Yoda, les
neuf CHR ont un total de mille deux cent quarante-six (1246) lits
avec une moyenne de cent trente (130) par hôpital. Ce qui donne
un taux moyen d'occupation des lits de 37% en 2002. Le taux optimal
étant de 85%.
Depuis 1997, le ministère de la Santé a entamé une politique de
prise en charge des urgences par la dynamisation des services d'urgence.
Depuis cette date, environ 500 millions de F CFA sont débloqués
chaque année par le gouvernement pour les soins en urgence. Cette
somme couvre essentiellement l'achat de médicaments et matériels
adéquats à même de permettre une prise en charge immédiate et sans
pré-paiement des urgences. Selon le premier responsable de la Santé,
pour les dix premiers mois de l'année 2003, plus de 7 000 kits d'urgence
ont été utilisés. Les CHR, deuxième niveau de référence du système
de santé, ont pour mission de prendre en charge les malades qui
n'ont pu être soignés aux niveaux inférieurs.
Pour répondre à cette exigence, le gouvernement burkinabé
dans le plan d'action de développement sanitaire 2001 - 2010, entend
développer des objectifs relatifs à la problématique des CHR.
Quelle politique sanitaire pour nos hôpitaux
?
Dans la mise en œuvre du Plan national de développement sanitaire
(PNDS), le ministère s'attelle à développer les infrastructures,
à améliorer la qualité et l'utilisation des services de santé. Les
ressources humaines en santé seront également développées. Ainsi
les CHR de Banfora et de Kaya seront reconstruits et ceux de Dédougou,
Dori, Fada, Gaoua, Koudougou, Ouahigouya et Tenkodogo seront aussi
renforcés en ressources humaines et matérielles. L'Etat a déjà sur
les exercices budgétaires 2003 et 2004 alloué plus d'un milliard
de F CFA pour la dynamisation des soins d'urgence des hôpitaux publics.
De 2001 à 2003, plus de deux milliards ont été débloqués pour les
CHR. A long terme, le gouvernement compte donner à notre système
de santé toute la cohérence nécessaire à un bon fonctionnement.
C'est devant une cinquantaine de députés que le ministre Alain Yoda
a livré sa communication relative à la préoccupation du député Coulibaly.
Un exposé qui a levé certaines zones d'ombre.
Cependant, les députés ont relevé quelques difficultés de fonctionnement
au niveau des CHR. Il en ressort que des responsables utilisent
les ambulances comme véhicules personnels ; et que bon nombre du
personnel soignant ne sont pas à leur poste aux heures de service.
Ils ont aussi déploré la fuite des cerveaux des hôpitaux vers les
cliniques privées et l'utilisation du matériel de l'Etat pour des
soins livrés dans les cliniques.
A toutes ces préoccupations, le ministre Alain Yoda a soutenu que
ces pratiques sont contraires aux missions assignées à ces personnes
et qu'elles doivent être dénoncées. Pour la fuite des cerveaux,
Alain Yoda a dit que lorsque l'Etat prend en charge la formation
d'une tierce personne, il y a toujours un contrat qui les lie. La
rupture prématurée de ce contrat, sans remboursement des frais de
formation est passible de poursuites pour le respect des clauses
du contrat. Le ministère vient de commander des moto-ambulances
pour pallier le déficit en moyens d'évacuation. Même si le ministre
n'a pas pu répondre à l'ensemble des problèmes posés, il a apporté
des éclaircissements satisfaisants. L'auteur de la question orale,
le député Abel Coulibaly, lui en est reconnaissant. Il dit attendre
l'année prochaine pour faire une évaluation de ce qui aura été fait.
A. Verlaine KABORE
Le manque de médecins spécialistes sera partiellement comblé avec
le retour des soixante-quatorze (74) spécialistes en formation.
Entre 2003 et 2006, nos CHR pourraient au moins espérer avoir un
spécialiste. Les 74 médecins en spécialisation se répartissent comme
suit : 19 en chirurgie 19 en gynécologie 16 en pédiatrie 11 en anesthésiologie
4 en ophtalmologie 5 en radiologie 3 en cardiologie 02 en ORL et
04 en dermatologie.
Pour le ministre Yoda, ce retour couplé à une démarche conséquente
de motivation, devrait permettre de pourvoir à court et moyen termes,
nos CHR en médecins spécialistes.
A. Verlaine KABORE
Lire l'article original : http://www.sidwaya.bf/sitesidwaya/sidawaya_quotidiens/sid2003_09_12/sidwaya.htm
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