Bien des efforts restent à fournir pour ne faire de la maternité
qu'un acte de joie. Jusqu'à présent trop de femmes meurent encore,
de par le monde, en donnant la vie. Et ce n'est pas le cas du Sénégal
qui vient égayer le tableau. Une situation sur laquelle le 4e congrès
annuel des gynécologues sénégalais va se pencher.
Alors que dans les pays les plus avancés, on redouble de moyens
pour réduire la douleur des futures mamans au moment de l'accouchement,
en Afrique quelque 450 à 2 000 femmes sur 100 000 continuent de
mourir en donnant la vie.
Les chiffres frôlent l'insolence : à population égale (10 millions
d'habitants), 2 000 gynécologues sont recensés en Grèce, contre
75 au Sénégal. Dans les pays en développement, 1 600 femmes meurent
chaque jour en accouchant, alors que 380 ventres s'arrondissent
à la minute. Toujours dans le même laps de temps, une femme décède.
La liste serait encore longue pour qui oserait la regarder en face.
Dès lors, il n'est pas surprenant que la mortalité maternelle soit
la cause de décès la plus importante chez les femmes en âge de procréer.
Ceci explique d'ailleurs l'inscription de la mortalité maternelle
sur l'agenda politique. Il faut entendre par-là le décès des femmes
pendant la grossesse, au moment de l'accouchement, ou pendant les
six semaines suivant la naissance du bébé.
Déjà en 1989, elle figurait parmi les priorités du gouvernement
dans sa Déclaration de politique de santé. De même, il paraissait
naturel que les premiers concernés, à savoir les gynécologues, réagissent.
En 1988 est ainsi fondée l'Association sénégalaise des gynécologues
obstétriciens (Asgo), qui compte aujourd'hui soixante-quinze membres.
En somme tout ce que le Sénégal compte comme gynéco. Car il n'en
existe pas plus et tous sont automatiquement considérés comme membre
de l'association.
La réalité a une fâcheuse tendance à dépasser la fiction à l'heure
de ce troisième millénaire...
En préparation de son quatrième congrès annuel, qui se tiendra les
5 et 6 décembre prochains, l'Asgo appelle donc à une mobilisation
des pouvoirs publics, des partenaires sociaux et des 10 millions
de pères et mères, potentiels ou réels, qui peuplent le Sénégal.
Cinq sessions et deux tables rondes sont prévues, en présence du
Docteur Issa Mbaye Samb, Ministre de la Santé et de la Prévention,
de tous les médecins de cette spécialité ou en formation et des
sages femmes d'état. La mortalité maternelle sera le thème principal
de la manifestation.
Les gynécologues veulent aussi sensibiliser les populations sur
le dépistage des cancers les plus fréquents, la gestion des services
en santé de la reproduction et les techniques de soins obstétricaux
et néonataux d'urgence (Sonu). Le docteur Rose Wardini Hachem, présidente
de l'Asgo, résume les objectifs de son association en ces termes
: "Promouvoir la santé maternelle et infantile, renforcer la collaboration
entre les gynécologues et veiller à la formation continue des praticiens."
Et lutter contre certaines aberrations, serait-on tenter d'ajouter.
Tous les hôpitaux régionaux ne bénéficient pas de la présence d'un
gynécologue dans leurs services. Les praticiens envoyés dans les
régions demandent vite leur mutation sur Dakar. Certains n'hésitent
pas à démissionner, les salaires n'étant pas une source de motivation
suffisante. Le constat est sans appel : 90 % des gynécologues exercent
à Dakar.
La mauvaise répartition matérielle est tout aussi flagrante. Le
manque de personnel, de moyens financiers et techniques appropriés
se font ressentir au fur et à mesure qu'on s'éloigne de l'Hôpital
central. Mais ces difficultés économiques et institutionnelles seraient
contournables si elles n'étaient accompagnées d'une des plus grosses
entraves au développement : l'ignorance. Le docteur Jean-Charles
Morreau, secrétaire général de l'Asgo, a rappelé avec amertume ce
fléau nommé "Pam" : "Non, je ne parle pas du Programme alimentaire
mondial, mais bien de ces trois éléments dont nous souffrons trop
en Afrique : pauvreté, analphabétisme et malnutrition."
Par : Aurélie BONAVITA (Stagiaire)
Lire l'article original : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=6073
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