S'il est un phénomène des plus frappants, pour un observateur
attentif dans les villes et les campagnes du Bénin, c'est bien le
nombre croissant de citoyens qui portent depuis quelque temps des
lunettes noires. Loin d'être la manifestation d'une nouvelle mode
nationale, ce changement d'allure et de comportement de la part
de certains individus dont ce n'était aucunement le genre, traduit
plutôt un fait : l'apparition et la recrudescence de la conjonctivite
virale, infection épidémique connue sous le terme d'Appolo.
La maladie communément appelée "appolo" est une infection inflammatoire
qui s'attaque aux yeux des individus pendant quelques jours voire
quelques semaines. L'appellation "appolo" donnée à la maladie par
les populations vient essentiellement d'une anecdote qui prend sa
source en 1969 avec le retour sur terre de la navette spatiale américaine
"appolo". Selon les avis, la maladie serait arrivée pour la première
fois avec la poussière spatiale amenée sur terre par la navette
appolo à son retour de la lune. Ainsi, hormis les médecins, peu
de gens connaissent la maladie sous son terme scientifique de conjonctivite
virale. Les malades atteints de l'appolo ont les yeux enflés et
tout rouges. Ceux-ci sont sensibles aux rayons de soleil et expliquent
le fait que la plupart des personnes infectées portent des lunettes
noires. Pour le docteur Amoussouga Alain-Paul, directeur de la clinique
ophtamologique "la lumière" à Cadjèhoun, le port de lunettes noires
chez les personnes infectées n'obéit qu'au simple besoin de se protéger
des rayons du soleil face auxquels les yeux deviennent très sensibles.
En effet Albert L. Dossou infecté depuis 8 jours confirme que sans
ses verres fumés, il lui devient impossible de voir avec la lumière
du jour, car ses yeux coulent alors de grosses rangées incessantes
de larmes. Albert précise cependant à cet effet que le port des
verres lui permet d'éviter de contaminer les personnes saines. Aussi,
selon lui, il maintient en permanence ses verres jusqu'à la disparition
totale de l'infection. Mais le docteur Amoussouga précise que le
port des verres, outre son effet protecteur, n'est pas une méthode
adéquate pour ne pas contaminer les personnes en bonne santé. Il
justifie cela par l'origine même de la maladie.
L'origine de la maladie
Selon le docteur Amoussouga, comme son nom l'indique, la conjonctivite
virale est une infection inflammatoire causée par un virus. Celui-ci
est particulièrement mutant et s'adapte à chaque apparition à l'environnement
social. Ainsi, précise M. Amoussouga, le sérotype du virus change
chaque année et à chaque apparition. " Il y a des années où le virus
devient agressif de par sa mutation et des années où il ne l'est
plus du tout. Il est impossible alors de prévoir les années où le
virus sera plus agressif et les années où il ne le sera pas ". Mais
ce qui est sûr, selon l'ophtalmologue, c'est que la maladie apparaît
de manière saisonnière, souvent entre le début et la fin de chaque
année, précisément entre les trois derniers et les trois premiers
mois de l'année. " C'est ce qui explique pratiquement donc que l'on
observe le mal à partir d'octobre jusqu'en mars, avril.
La contamination
Pour le directeur de la clinique ophtamologique "la lumière"de
Cadjèhoun, la conjonctivite virale est une infection hautement contagieuse.
Elle peut ainsi se transmettre par simple contact corporel entre
le sujet atteint et le sujet sain ou par simple contact d'un même
objet par un individu atteint et autres non atteints. " Souvent,
dit le Dr Amoussouga, les personnes atteintes du mal s'essuient
les yeux avec les mains ou des torchons qui vont en contact de leurs
mains. A partir de ce moment, lorsque ces personnes rentrent en
contact avec leurs compagnons, elles leurs transmettent le virus.
De la même façon, poursuit le médecin, le simple contact d'un même
objet par des personnes différentes peut entraîner une contagion
en chaîne ". Cependant, il faut préciser que la contagion dépend
de l'organisme de chaque individu concerné car certains organismes,
à l'inverse d'autres, peuvent développer des résistances naturelles
face au virus. " Ce n'est donc pas par contact visuel que s'attrape
la conjonctivite virale " met en garde le médecin. Et il conclut
qu'il n'y a aucun traitement médical précis pour le virus. " On
ne traite pas de manière spécifique le virus de la conjonctivite,
il part tout seul après quelque temps " dit le docteur Amoussouga.
Maladie douloureuse comme toutes les maladies, mais en plus gênante
et vite remarquable physiquement, l'appolo ne peut donc être traitée
de manière curative. Pour ceux qui ont coutume de l'attraper de
façon saisonnière, il n'y a que la prévention pour s'en débarrasser,
ou des lunettes noires pour s'en accommoder. Askanda Bachabi
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