Les testicules de Paul pèsent au moins cinq kilogrammes.
Ce handicap qu'il a depuis six ans, ne lui permet presque plus de
se déplacer, encore moins de porter un pantalon. Peut être encore
un pagne. Dans son village sis à Koukoum par Eséka, en plus de la
douleur physique, il doit supporter les regards des villageois,
dont il est devenu la risée. C'est chacun qui trouve une cause mystique
à ce phénomène qui n'est autre que la filariose lymphatique plus
connu sous le nom d'éléphantiasis.
Tandis que certaines personnes soupçonnent une
malédiction divine, d'autres parlent de conséquences d'une jeunesse
mouvementée, passée à courtiser les épouses de ses aînés. Certains
guérisseurs qu'il a rencontrés dès que les symptômes de la maladie
sont apparus sont également de cet avis.
"L'évolution de ma maladie s'est faite en un temps
record. Tout d'un coup, mes testicules ont commencé à démanger et
à prendre du volume. Je suis allé chez un premier guérisseur qui
m'a dit que j'avais une hernie, puis chez un deuxième qui attestait
qu'on m'avait jeté un sort. Ne trouvant pas de suite favorable alors
que mes bourses prenaient du volume et me faisaient atrocement mal,
j'ai rencontré un médecin. Il me suit depuis un mois et j'ai espoir".
Des propos de Paul qui est au stade ultime de l'éléphantiasis, une
augmentation importante du volume d'un membre ou d'une autre partie
du corps due à un oedème (infiltration des tissus par de la lymphe)
de consistance dure donnant l'apparence d'un membre d'éléphant.
La maladie sévit énormément dans le monde, menaçant de ce fait un
milliard de personnes, parmi lesquels un tiers d'Africains.
Au Cameroun, aucune statistique récente n'est disponible
sans les services de parasitologie des différents hôpitaux centraux
approchés. Ce qui n'exclut pas, comme le témoigne le Dr Fotso, la
présence d'un nombre important de personnes infestées par les vers
parasites filiformes Wuchereria bancrofti et Brugia malayi, responsables
de la filariose lymphatique. "Lesquels vivent presque exclusivement
chez l'être humain. Ils s'installent dans le système lymphatique,
le réseau de ganglions et de vaisseaux qui maintiennent le délicat
équilibre hydrique entre les tissus et le sang et sont un élément
essentiel du système de défense immunitaire de l'organisme. Ils
ont une durée de vie de 4-6 ans et produisent des millions de microfilaires
immatures (larves minuscules) qui circulent dans le sang", explique
le Dr Amougou Oloa.
Moustiques
Le principal vecteur est le moustique qui transmet
la maladie en piquant des êtres humains infectés et en absorbant
alors les microfilaires. Celles-ci se développent ensuite pour atteindre
le stade infectieux en 7 à 21 jours habituellement. Les larves migrent
alors dans les pièces buccales du moustique qui lui servent à piquer,
y attendent d'être inoculées dans la circulation sanguine d'un nouvel
individu et achèvent ainsi leur cycle de développement.
Le développement de la maladie chez l'homme reste quelque peu énigmatique
pour les scientifiques. Bien que l'infection soit acquise en général
au début de l'enfance, il arrive qu'elle mette des années pour se
manifester. De fait, de nombreuses personnes ne présentent jamais
les manifestations cliniques extérieures de leur infection. Même
en l'absence de symptômes cliniques, les études ont désormais révélé
que ces victimes, apparemment en bonne santé, souffraient d'une
pathologie lymphatique cachée ainsi que de lésions rénales.
Cette forme asymptomatique se caractérise le plus souvent par la
présence de milliers ou de millions de microfilaires (les parasites
au stade larvaire) dans le sang et de macrofilaires (vers adultes)
dans le système lymphatique. Selon le Dr Ndo Bélinga, la prise en
charge de cette maladie se fait par plusieurs spécialistes de la
santé. Les médecins concernés par les problèmes de parasitologie,
les kinésithérapeutes etc. Toutefois, le malade a deux issues le
suivi médicamenteux ou alors une intervention chirurgicale. Mais
la prévention demeure la seule issue pour éviter la maladie. Elle
passe par la protection contre les piqûres de moustiques (moustiquaire,
aérosol anti-moustiques, répulsif, etc.)
Cathy Yogo
Lire l'article original : http://www.quotidienmutations.net/cgi-bin/alpha/j/25/2.cgi?category=10&id=1090269668
Pour comprendre : Des origines
grecques - Mutations
- Cameroun - 20/07/2004
Éléphantiasis est un terme issu du grec éléphas,
qui veut dire éléphant. Augmentation très importante du volume d'un
membre ou d'une autre partie du corps due à un œdème (infiltration
des tissus par de la lymphe) de consistance dure donnant l'apparence
d'un membre d'éléphant. L'éléphantiasis est une affection chronique
(s'étalant dans le temps) qui, regroupe plusieurs variétés. Il s'agit,
entre autres, de :
- L'éléphantiasis des Arabes ou des pays chauds, caractérisé par
un œdème très volumineux du derme et du tissu cellulaire sous-cutané.
L'éléphantiasis des pays chauds s'accompagne de sclérose (durcissement
des tissus) située aux membres inférieurs et aux organes génitaux.
Il s'observe dans l'ensemble de la zone tropicale et est secondaire
à la pénétration dans les vaisseaux lymphatiques de la filaire
du sang, Onchocerca volvulus.
- L'éléphantiasis familial de Milroy, appelé également trophoedème.
Cette affection est une variété d'éléphantiasis caractérisée par
une augmentation très importante du volume d'un membre ou d'une
autre partie du corps due à un œdème dur et chronique. Les causes
sont héréditaires, dues à une malformation du système lymphatique,
à une atteinte de la moelle épinière ou à une lésion des racines
nerveuses (nerfs naissant de la moelle épinière).
- L'éléphantiasis génito-anorectal ou syndrome de Jersild. Il
s'agit d'une modification du calibre du rectum (dernière partie
du côlon avant l'anus), due à une inflammation de cet organe,
associée à des ganglions.
- L'éléphantiasis nostras qui s'observe en Europe et qui est secondaire
à la répétition d'érysipèles, est une infection de la peau d'origine
bactérienne pouvant toucher également les tissus situés au-dessous
de l'épiderme. L'érysipèle classique est constitué d'une plaque
rouge brillante, accompagnée d'une fièvre. C'est une maladie inoffensive,
mais des complications locales ou des récidives peuvent survenir.
Elle touche l'adulte après 40 ans, avec un âge moyen de survenue
vers 60 ans. Il existe parfois une recrudescence saisonnière en
été et en automne, bien que cette notion ne soit pas vérifiée
dans tous les cas. Cette maladie touche essentiellement les membres
inférieurs, sans doute favorisée par l'insuffisance veineuse.
Elle touchait autrefois essentiellement le visage; la diminution
de cette localisation semble due à l'utilisation des antibiotiques
de façon plus précoce que jadis. L'érysipèle se situe rarement
aux membres supérieurs ou au niveau de l'abdomen. Malgré les progrès
de l'hygiène et le développement de l'antibiothérapie, l'érysipèle
est en constante augmentation en France depuis les 20 dernières
années.
- Il existe également l'Eléphantiasis du sein.
Jusqu'à tout récemment, le diagnostic de la filariose lymphatique
posait de grandes difficultés. Il fallait en effet rechercher au
microscope les microfilaires dans le sang et, dans la plupart des
régions du monde, elles ont une périodicité nocturne qui ne les
fait apparaître qu'en milieu de nuit. Le récent développement d'une
"épreuve sur carte" très sensible, spécifique et simple, pour dépister
les antigènes parasitaires en circulation sans devoir recourir à
des installations de laboratoire et en utilisant une simple goutte
de sang obtenue par piqûre du doigt à n'importe quelle heure du
jour, a complètement transformé l'approche. Avec ce nouvel outil
diagnostic et d'autres, il est désormais possible à la fois d'améliorer
notre compréhension de l'endroit où l'infection survient et de surveiller
plus facilement l'efficacité des traitements et des programmes de
lutte.
C.Y. Sources infos sciences
Lire l'article original : http://www.quotidienmutations.net/cgi-bin/alpha/j/25/2.cgi?category=10&id=1090269581
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