Le Sénégal fait certes partie des cinq pays africains
déclarés indemnes du virus autochtone de la poliomyélite. Mais,
prévient sur un ton pathétique Mme Viviane Wade du haut de la tribune
servant de lancement de la 7e édition des journées nationales de
vaccination (JNV) à Diaobé, le danger est encore à nos portes. Alors
pas question de dormir sur nos lauriers.
"Quand en 1963, je venais à Dakar pour la première
fois, j'ai été frappée par les nombreux enfants traînant dans les
rues. Ce spectacle a disparu depuis 1978. il ne faut plus que cela
recommence, car le danger est à nos portes", alerte Mme Viviane
Wade. Du haut de la tribune servant de lancement de la 7e édition
des journées nationales de vaccination (JNV) à Diaobé (80 km à l'est
de la commune de Kolda), Mme Viviane Wade a eu plutôt la tonalité
pathétique. "Que direz-vous à votre enfant si demain il se rend
compte qu'il est victime de la maladie par votre inconscience ?",
interroge Mme Wade, par ailleurs présidente de la fondation Education-Santé..
"Quel est le plus grave entre mourir, aller vers Dieu et traîner
par terre durant toute sa vie ?", interpelle-t-elle.
Face à cette alternative, M. Issa Mbaye Samb, ministre
de la Santé et de la Prévention avertit : "Les enfants ne sont pas
seulement l'avenir, ils sont un trésor à préserver parce qu'ils
sont capables de nous faire sourire et de nous réconforter par leur
amour naïf et pur lorsque nos nerfs d'adulte sont à fleur de peau."
Et M. Samb d'ajouter que "protéger les enfants contre les maladies
invalidantes, et les maladies tout court, constitue un impératif
pour toute société lucide et responsable".
L'appel du ministre de la Santé et de la Prévention
est, pour l'heure, loin d'avoir les effets escomptés. "Plus de trois
millions d'enfants meurent chaque année de maladies qui auraient
pu être évitées si les vaccins disponibles leur avaient été administrés",
déplore Mme Viviane Wade. C'est un paradoxe pour la première dame,
car "dès la fin du 19e siècle, les résultats de la recherche médicale
ont permis de mettre au point des vaccins qui préviennent certaines
maladies invalidantes et souvent mortelles", argumente-t-elle. On
n'est donc, à l'apparence, pas encore à l'abri, "mais force est
de reconnaître que d'immenses procès ont été accomplis depuis le
lancement de l'initiative "Bouter la polio hors d'Afrique en 1996",
tempère le Dr Daniel Névès du Rotary Club International. "Cinq pays
du continent, y compris le Sénégal, ont été déclarés indemnes du
virus autochtone de la poliomyélite au mois de juin 2004 par la
Commission de certification de l'éradication de la poliomyélite",
révèle le Dr Névès. "Il ne faut pas, cependant, dormir sur nos lauriers.
La vigilance doit toujours être de rigueur, car l'ennemi ne s'avoue
pas encore vaincue. Il est même revenu à la charge dans certains
pays où il tente de se réinstaller", prévient-il.
C'est sans doute, ce nouveau contexte qui explique
la stratégie du porte à porte initié par l'Oms depuis 2000. Car
"dans certains pays comme le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire,
la Guinée, le Mali, etc., la réapparition du poliovirus sauvage
est observée", annonce Mme Viviane Wade. Pour prévenir le risque
élevé du retour du virus et renforcer l'immunité de la population,
les ministres de la Santé de l'Union africaine ont décidé de l'organisation
de journées nationales de vaccination synchronisées dans 22 pays
de l'Afrique de l'Ouest et du centre, en octobre et novembre 2004.
Deux passages sont programmés à l'échelle africaine avec une cible
de 75 millions d'enfants de 0 à 5 ans à protéger. Au Sénégal, l'objectif
est d'immuniser deux millions d'enfants. Ainsi, un premier passage
a déjà commencé depuis le 8 et s'est poursuivi jusqu'à hier, lundi
11 octobre. Le deuxième passage aura lieu du 8 au 21 novembre prochain.
Tous les passages sont obligatoires à l'immunisation
des enfants. Au cours de ces deux passages, la vitamine A sera en
plus administrée aux enfants de 6 mois à 5 ans. "Cette vitamine
accroît la résistance aux infections comme la rougeole, le paludisme,
les maladies de la peau et la cécité", dira Mme Wade.
Au cours de la cérémonie, le caractère sous-régional
de Diaobé a été magnifié. Et M. Issa Mbaye d'évoquer la présence
des gouverneurs de Basseh (en Gambie) et de Bafata (en Guinée),
symbole pour lui de la symbiose entre les trois peuples. "Village-carrefour,
à la croisée des chemins entre le Mali, la Guinée, la Gambie et
la Guinée-Bissau, Diaobé constitue l'image même de carrefour de
toutes les maladies pouvant atteindre les populations. C'est le
cas du poliovirus", martèle Mme Viviane Wade. Peuplé en 1988 de
699 habitants, le village compte aujourd'hui 12 000 âmes en dehors
des jours de marché. Une explosion démographique qui justifie, sans
doute, l'immense banderole des doléances qui a accueilli Mme Viviane
Wade, les ministres, Issa Mbaye Samb, Bécaye Diop et leur suite.
"Adduction d'eau, électrification, route Dialadian - Maréwé, centre
de santé, érection de Diaobé en commune, etc." sont autant de doléances
réitérées par M. Ousmane Simakha, président du Conseil rural de
Kounkané au cours de son allocution. Mme Wade et M. Issa Mbaye Samb
n'ont pas répondu aux porteurs de pancartes.
Hamidou SAGNA
Lire l'article original : http://www.walf.sn/societe/suite.php?rub=4&id_art=13469
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