Pour
promouvoir le développement de soins après avortement
de qualité en Afrique francophone, la troisième réunion
régionale sur cette initiative régionale se tiendra
du 4 au 7 mars 2002 à l'hôtel Méridien de Dakar.
C'est pour permettre un partage d'expériences dans le domaine
de l'application des soins après l'avortement (Saa) et faire
un plaidoyer pour une meilleure planification/programmation, le
développement de services pilotes et l'introduction des Saa
dans les politiques nationales de santé de reproduction,
qu'une conférence de presse a été organisé
hier, pour permettre de sensibiliser les populations et les décideurs.
Selon
le Docteur Gorgui Diaw, gynécologue, "l'avortement est
l'interruption d'une grossesse avant la date de viabilité
extra-utérine du foetus". Cependant, différents
qualificatifs adjoints à ce terme, précisent la cause
de l'avortement. C'est ainsi que les avortements spontanés
(également appelés fausses couches) sont ceux qui
se produisent sans que l'interruption ait été provoquée
tandis que les avortements provoqués sont induits délibérément.
Les
avortements spontanés, ou interruptions involontaires de
grossesse, affectent 10 ou 15% des grossesses déclarés
ou suspectées. S'ils nécessitent souvent un traitement
ou une hospitalisation, ils sont moins souvent mortels que les avortements
provoqués dans de mauvaises conditions. Les complications
de tous les types d'avortements sont aussi une cause majeure de
morbidité chez les femmes des pays en développement.
"On sait que cette morbidité est élevée,
mais des données précises sur les avortements provoqués
dans de mauvaises conditions sont encore plus difficiles à
obtenir que les données sur la mortalité," confient
les spécialistes.
Les
soins d'urgence liés à l'avortement sont en effet
les services salvateurs qui doivent être disponibles dans
tout système de soins de santé pour répondre
aux besoins des femmes en cas de complications d'un avortement.
L'avortement incomplet est le diagnostic le plus fréquent
pour une femme qui se présente dans un service de santé
pour des soins d'urgence après un avortement. Faute de soins,
un avortement incomplet peut entraîner une hémorragie,
un choc, une septicémie, voire le décès de
la patiente. Le traitement de ce cas inclut le curetage utérin
et la prise en charge immédiate des autres complications.
Si
les soins d'urgence sont immédiatement nécessaires
pour protéger la vie et la santé de la femme, "l'interruption
volontaire de grossesse" (Ivg) est effectuée à
la demande de la femme ou sur la recommandation de son médecin.
C'est le cas de la plupart des avortements provoqués en toute
légalité et des avortements thérapeutiques.
Les entraves légales à la disponibilité de
l'interruption volontaire de grossesse sont de toutes sortes.
L'Organisation
mondiale de la Santé (Oms) estime que près de 500.000
femmes meurent chaque année dans le monde d'une cause liée
à la grossesse. Une grande partie de ces décès
est attribuable aux complications de l'avortement. De plus, 98%
de ces décès surviennent dans des pays en développement
où le risque de mourir à l'occasion d'une grossesse
est majoré par les grossesses plus nombreuses pour chaque
femme, les conditions socio-économiques et la moindre disponibilité
des services de soins maternelles dans ces pays.
Le
risque de mourir des suites d'une grossesse est beaucoup plus grand
pour les femmes des pays en développement que pour celles
des pays industrialisés. Dans les pays industrialisés,
on compte de 5 à 30 décès maternels pour 100.000
naissances vivantes alors que dans les pays en développement
ces chiffres oscillent entre 50 et 800, voire davantage. De plus,
pour une femme qui vit dans un pays en développement, le
risque de décès est 250 fois plus grand si elle doit
faire appel aux services d'un avorteur non qualifié que si
elle a accès à un avortement pratiqué par du
personnel qualifié dans de bonnes conditions d'hygiène.
Le risque de décès est sensiblement réduit
lorsque les femmes ont accès à des services qui pratiquent
l'avortement en toute légalité et en toute sécurité.
Aux Etats-Unis d'Amérique, par exemple, le taux de décès
lié aux avortements entre 1980 et 1985 était de 0,6
pour 100.000 interventions. Les données fiables sur la mortalité
maternelle liée à l'avortement sont encore plus rares
que les données sur la mortalité. Cependant, une analyse
récente a montré que pour chaque décès
maternel, entre 10 et 15 femmes souffraient d'une maladie liée
à la grossesse. Il y aurait donc chaque année de 5
à 7,5 millions de femmes dans le monde qui souffrent d'un
problème de santé consécutif à une grossesse
qui, sans être mortel, est souvent invalidant. Ces morts maternelles
sont d'autant plus tragiques qu'elles pourraient presque toutes
être évitées par une prise en charge appopriée.
Près de 15% de la mortalité maternelle dans le monde
résultent d'avortement dangereux et ce taux atteint 50% dans
certaines régions.
Rôle
de l'avortement dans la morbidité et la mortalité
maternelles
Les
avortements dangereux, c'est à dire les interruptions de
grossesse pratiquées ou traitées par des personnes
non qualifiées
Qu'un
avortement soit spontané ou provoqué, ce sont les
suites et leur prise en charge qui déterminent si l'avortement
est sûr ou dangereux. Des estimations fondées sur les
certificats de décès provenant de 24 pays révèlent
qu'entre 6 et 46% des morts maternelles notifiées sont imputables
aux complications de tous les types d'avortements.
La
stérilité, les invalidités chroniques, les
infections transfusionnelles et les soins d'urgence en cas de complications
des avortements dangereux, sont de nouveaux défis à
relever dans la quête d'une maternité sans risque.
Aussi, certains praticiens estiment-ils que lorsque la loi sur l'avortement
est assouplie, le nombre des décès dus aux avortements
provoqués va baisser, probablement en raison des meilleures
conditions de sécurité observées par les professionnels
qualifiés. Aux Etats-Unis, par exemple, le taux des décès
liés aux avortements a diminué de 85% dans les cinq
années suivant la légalisation.
Améliorer
les soins de santé
La
prévention de la mortalité maternelle liée
à l'avortement passe par l'intégration de soins d'urgence
pour les avortements dans tout le système des soins de santé
d'un pays (du poste de santé rural de base au service le
plus sophistiqué). En effet si les estimations de l'incidence
des avortements varient sensiblement, il est certain que les personnels
de santé sont souvent appelés à soigner des
femmes en train d'avorter ou qui ont avorté. Tout saignement
survenant pendant la grossesse, quelle qu'en soit la cause, peut
entraîner des complications graves et requiert une évaluation
et une prise en charge urgentes. Ces femmes doivent être soignées
d'urgence même lorsque l'avortement provoqué est réglementé.
L'état de la femme doit pouvoir être évalué
et les services requis doivent pouvoir lui être dispensés
24 heures sur 24 depuis son premier point de contact avec le système
de santé au point où les services requis lui sont
dispensés. Les dispensateurs de soins de santé, les
femmes et la communauté dans son ensemble doivent connaître
les risques que comporte un avortement dangereux et les avantages
de l'option plus sûre que constitue la contraception. L'incidence
des grossesses non désirées et des avortements provoqués
ainsi que la morbidité et la mortalité maternelles
qui y sont liées, peuvent être considérablement
réduites dès lors que la disponibilité des
services de planification familiale est accrue et que les femmes,
les personnels de santé et la communauté sont convenablement
informés.
Selon
l'Oms, les agents de santé au niveau communautaire peuvent
jouer un rôle clef dans la réduction de la mortalité
et de la morbidité liées aux avortements, en particulier
dans les zones éloignées des services de santé
existants. Dans les villages et hameaux de nombreux pays, les services
d'éducation sanitaire et de base sont assurés par
des personnes qui opèrent en dehors du système de
santé officiel, souvent chez elles ou dans un bâtiment
communautaire. Ces personnes (tradipraticiens, accoucheuses traditionnelles)
répondent aux besoins de santé de base de la communauté
dans laquelle elles vivent. En effet dans de nombreuses régions
du monde, les agents de santé traditionnels pratiquent les
avortements provoqués dans des conditions dangereuses. C'est
pourquoi, il importe au plus haut point que les croyances et les
concepts culturels qui régissent la pratique des agents de
santé de village dans le traitement de l'avortement soient
compris dans tout le réseau d'orientation-recours du système
de santé.
Ismaïla
SARRE
Lire
l'article original : www.sudonline.sn/archives/02032002.htm
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