La méningite est un processus inflammatoire, d'origine généralement
infectieuse, atteignant les méninges, c'est-à-dire l'ensemble des
formations recouvrant l'encéphale et la moelle épinière. Les méningites
d'origine virale (70 à 80 % des cas) sont généralement bénignes,
le rétablissement étant le plus souvent spontané. Par contre, les
méningites d'origine bactérienne (20 à 25 % des cas) sont graves
car l'évolution spontanée est pratiquement toujours mortelle.
La bactérie, Neisseria meningitidis, se transmet par contact direct,
notamment avec les gouttelettes qu'émettent les voies respiratoires
des sujets infectés (nez, gorge), et la maladie se manifeste par
l'apparition brutale de céphalées, avec fièvre, nausées, vomissements.
On note aussi la raideur de la nuque, des troubles de la conscience,
un coma et/ou des convulsions. Les complications les plus fréquentes
de la méningite cérébro-spinale sont des atteintes neurologiques,
en particulier la surdité bilatérale.
Les spécialistes indiquent qu'en dehors des épidémies, "au moins
1,2 million de cas de méningite bactérienne se produisent chaque
année selon les estimations, dont 135 000 mortels."
Dans les pays industrialisés, l'incidence des méningites est située
entre 2,5 et 10 pour 100 000 habitants.
Sur les 497 cas recensés en 2000 par le Centre national de référence
en France, 19 % des infections à méningocoques étaient dues au sérogroupe
C, contre 66 % dues au sérogroupe B et 10 % au sérogroupe W135.
Cette incidence est dix fois plus élevée dans les pays en voie de
développement.
En effet, la méningite se développe en Afrique, notamment lorsque
survient l'harmattan, ce vent sec et chargé de poussières qui fragilise
les muqueuses de l'appareil respiratoire. Les deux tiers de ces
méningites frappent les enfants âgés de moins de 5 ans. Le taux
de létalité est compris entre 5 et 10 % et peut dépasser 50 % en
l'absence de traitement.
Outre la mortalité associée à cette infection, 15 à 20 % de ceux
qui survivent souffrent de séquelles neurologiques.
Présente partout dans le monde, la méningite à méningocoque, seule
forme de méningite bactérienne qui provoque des épidémies, touche,
selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 500 000 personnes
chaque année.
Les souches A, B, C, Y et W 135 sont à l'origine de 99 % des cas
de méningites cérébro-spinales.
Le sérogroupe A est à l'origine d'épidémies touchant des centaines
de milliers de personnes dans "la ceinture africaine de la méningite",
allant de l'Éthiopie jusqu'au Sénégal.
Le Burkina Faso, qui fait partie de cette ceinture méningitique,
fait face, quasiment chaque année, à des épidémies de méningite.
Les situations épidémiologiques les plus graves ont été enregistrées
en 1996 avec 4 363 décès pour 42 967 cas, en 1997 avec 2 533 décès
pour 22 293 cas et en 2001 avec 1 769 décès pour 12 790 cas, si
l'on en croit les chiffres officiels repris par l'Agence France-Presse.
Cette année encore, on est sur le qui-vive au pays des Hommes intègres.
Le tableau de bord général de ce début de mois de mars indique que
les 53 districts sanitaires du pays sont touchés par la méningite,
qui a déjà fait, selon le quotidien d'Etat Sidwaya, 347 décès pour
2 433 cas enregistrés. C'est le district sanitaire de Manga qui
enregistre le plus grand nombre de personnes touchées avec 282 cas.
Suivent, dans l'ordre, Batié avec 170 cas, Bogandé avec 161 cas
et Pissy avec 101 personnes.
On est d'autant plus sur ses gardes avec la recrudescence de cas
imputables à la souche W 135, qui a tué, selon L'Observateur Paalga,
1 743 personnes sur les 14 453 cas dénombrés l'année dernière.
Bien entendu, les autorités nationales essaient d'apporter la contre-attaque,
aidées en cela par la communauté internationale. Des millions de
doses du vaccin ACW 135, qui protège à la fois contre les souches
A, C et W 135, sont destinées à l'Afrique et commencent déjà à être
acheminées dans les pays où la conjoncture épidémique s'est déclarée.
Trois opérateurs interviennent dans cette... opération de sauvetage:
l'Organisation mondiale de la santé (OMS), GlaxoSmithKline (GSK)
et la Fondation Bill et Melinda Gates. Une première livraison de
trois millions de doses du précieux vaccin devrait limiter l'impact
de l'épidémie dans la ceinture africaine de la méningite. Appréciant
cette initiative, le Directeur général de l'OMS, Dr Gro Harlem Bruntland,
a salué "ce que peuvent faire des partenariats public-privé pour
améliorer la santé".
Au plan national, et pour accompagner le mouvement international,
le ministère de la Santé a mis en place une batterie de mesures
au nombre desquelles "une vaste campagne gratuite de vaccination,
en cours depuis décembre dernier contre les souches A et C, très
répandues mais contre lesquelles le pays dispose d'importantes quantités
de vaccins".
Selon le directeur national de lutte contre la méningite, Souleymane
Sanou, "le déclenchement de l'épidémie dans certaines zones, notamment
dans le Sud et l'Ouest, est dû au fait que les populations n'avaient
pas été largement vaccinées en 2002". Cette situation est tributaire,
a-t-il expliqué, de l'arrivée massive de Burkinabè fuyant la Côte
d'Ivoire et dont une bonne partie n'a pas été immunisée contre la
maladie.
Au-delà des actions ponctuelles, il faut certainement rompre avec
le cycle infection-maladie-décès. Pour ce faire, il faudrait peut-être
revoir la stratégie d'ensemble de lutte contre la méningite qui
s'apparente à jouer les pompiers pour éteindre, chaque fois, l'incendie
de l'épidémie. C'est, du moins, ce qui ressort d'un article publié
dans Le monde diplomatique, en mai 2001, par le Docteur Jean-Philippe
Chippaux, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement
(IRD) à Dakar.
Titré "Conflits autour de la méningite en Afrique", l'auteur de
l'article fustige le fait que l'Organisation mondiale de la santé
(OMS) ait choisi de lutter contre la méningite par des campagnes
de vaccination de masse organisées uniquement après la "déclaration"
de l'épidémie. Elle oublie ainsi que "le vaccin est, par définition,
un outil préventif et non curatif, et que deux à trois semaines
sont nécessaires pour que les anticorps exercent leur fonction de
défense".
Alors, pourquoi n'a-t-on pas écouté les spécialistes, qui ont dénoncé
avec force, dès 1997, "la frilosité et l'échec d'une telle politique"?
Et pourquoi ne privilégierait-on pas, finalement, la vaccination
de routine, "protectrice et préventive, qui consiste à immuniser
en dehors des épidémies"?
Serge Mathias Tomondji
Lire l'article original : http://www.journaldujeudi.com/semaine/digest.htm#ancre1
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