Dans les régions du Sénégal, il n'est pas rare de voir des hôpitaux
qui ne disposent, au maximum, que de deux sages-femmes. C'est dire
que la demande est supérieure à l'offre. Cela démotive le personnel,
confronté à une surcharge de travail. Une des principales contraintes
auxquelles le programme de SR est confronté, note un spécialiste,
est d'avoir diminué les capacités de formation des écoles de sages-femmes
d'État alors que ce corps constitue le pilier des maternités.
" Pour répondre aux besoins des populations en matière de santé
de la reproduction, il importe de lever une série d'obstacles qui
portent, entre autres, sur l'insuffisance de sages-femmes d'état
surtout en milieu rural, le pourcentage élevé des femmes qui accouchent
à domicile, l'introduction timide des soins obstétricaux d'urgence
(SOU) dans les structures sanitaires périphériques et l'insuffisance
des mesures d'accompagnements des SOU que sont les banques de sang
et les laboratoires ". Ces propos sont du Pr Awa Marie Coll Seck,
ministre de la Santé, de la Prévention et de l'Hygiène qui présidait,
mercredi, à l'hôtel Ngor Diarama de Dakar, les journées nationales
de la santé de la reproduction. Le Pr Jean Charles Moreau, chef
du service à la clinique de gynécologie obstétrique de l'hôpital
Aristide Le Dantec, qui a pris part à ces journées, partage cet
avis du ministre de la Santé, de la Prévention et de l'Hygiène.
Le Pr Moreau jette ensuite un regard sur la problématique de la
santé de la reproduction. Selon lui, depuis l'adoption du concept
de la santé de la reproduction en 1994, à la conférence internationale
sur la population et le développement du Caire, il y a eu des fléaux.
" La santé est un tout, sous le couple existence/mortalité. Elle
doit concerner tout le corps humain. " Pour cela, a poursuivi le
Pr Moreau, les aspects médicaux n'en constituent pas les seules
composantes. Ce qui explique l'importance de telles journées sur
la SR qui permettent de passer au crible le processus pour cerner
les forces et les faiblesses.
RENFORCEMENT DES PLATEAUX TECHNIQUES
Des acquis, il y en a, selon le Pr Moreau, surtout dans les domaines
de la formation, de la supervision, de réhabilitation des structures,
du renforcement du plateau technique des centres de santé, des postes
de santé, des hôpitaux régionaux et des centres hospitaliers universitaires.
À côté de ces acquis, il y a des contraintes qui ne dépendent pas
seulement du personnel de santé, a-t-il poursuivi. Pour illustrer
son propos, le Pr Jean Charles Moreau parle d'un cas clinique nécessitant
un traitement. Ce traitement n'est possible qu'à condition qu'un
bon diagnostic soit posé et pour lequel les moyens ne sont pas disponibles.
Quand bien même c'est le cas, il y a un déficit criard de personnel
à travers tout le pays. Dans les régions, il n'est pas rare de voir
des hôpitaux qui ne disposent au maximum que de deux sages-femmes.
C'est dire que la demande est supérieure à l'offre. Cela démotive
le personnel avec une surcharge de travail à laquelle s'ajoutent
les problèmes de salaire et de motivation.
FEMMES EVACUÉES EN PIROGUE
Une des principales contraintes, soutient en substance le Pr Moreau,
est d'avoir diminué les capacités de formation des écoles de sages-femmes
d'État dans la mesure où ce corps constitue le pilier des maternités
surtout " qu'on assiste à un taux de fécondité de 2,7 % avec un
indice de fécondité de 5 à 6 enfants par femme ". En outre, a-t-il
souligné, il y a un manque chronique de gynécologues dans les régions.
En effet, de la sortie de la première promotion de l'école de médecine
en 1995 à nos jours, il n'y a plus eu de formation de gynécologues.
Actuellement, au Sénégal, on ne compte que 75 gynécologues et moins
d'une dizaine travaillent dans les régions. " C'est dire, a indiqué
le Pr Moreau, que l'objectif de doter chaque hôpital d'au moins
deux gynécologues est loin d'être atteint. Et il y a des hôpitaux
où il n'existe aucun spécialiste. Cela constitue un grand risque
et explique les taux élevés et stagnants de mortalité maternelle.
"
Comme le reste du pays, la région de Fatick connaît une bonne
partie des difficultés énumérées ci-dessus. Selon la présidente
de la fédération régionale des groupements de promotion féminine,
Mme Khady Labo, dans la commune où il existe un hôpital, un centre
de santé et des cliniques, " la situation s'est améliorée. En revanche,
en zone rurale les femmes rencontrent d'énormes difficultés en matière
de santé de la reproduction. Les femmes connaissent la planification
familiale et veulent bénéficier de ses services parce qu'elles sont
bien informées à travers des causeries sur la santé de la reproduction.
L'accès aux services pose toutefois un problème aux femmes rurales
à cause du manque de structures et de moyens de transport, ajouté
au mauvais état des routes, a révélé la présidente des GPF de Fatick.
Les difficultés, a-t-elle dit, sont plus ressenties par les femmes
de Foundiougne qui, pour les accouchements compliqués se rendent
à Fatick à bord d'une pirogue avec tous les risques liés à l'utilisation
d'un tel moyen de transport. Les femmes du département de Gossas
souffrent, elles, du déficit de structures sanitaires opérationnelles.
Saer GUEYE
Lire l'article original : http://www.lesoleil.sn/santeenv/article.cfm?articles__id=25859
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