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LUTTE CONTRE LE SIDA - Wal Fadjri - Sénégal - 23/05/02

En février dernier, le ministre de la Santé et de la Prévention annonçait un financement de 21 milliards de francs Cfa de la Banque mondiale pour lutter contre le Vih/sida au Sénégal. Une maladie sexuellement transmissible bien connue des Sénégalais. En tout cas, c’est ce qui ressort d’une campagne de mobilisation sociale de la lutte contre les infections sexuellement transmissibles (Ist) sida dans les dix régions du Sénégal entre août et novembre 2001. Cette campagne exécutée par Direct Marketing Communication pour le compte de Family Health International et l’Ademas, sur financement de l’Usaid, a permis d’atteindre 4 683 personnes par le système des niches.

En effet, 95,5 % des personnes interviewées, hommes comme femmes, ont déclaré savoir ce qu’est le sida, c’est-à-dire que c’est une maladie sexuellement transmissible. Et la notoriété du sida est fonction de l’âge des populations, car “nous avons remarqué que c’étaient les personnes âgées entre 0 et 39 ans qui ont le plus déclaré savoir ce qu’est le sida (par rapport à la classe des 40 ans et plus)”, lit-on dans le rapport. Seulement, savoir que le sida est une maladie sexuellement ne veut pas dire être au fait du danger lié à cette pandémie.

D’ailleurs, à la suite de cette campagne organisée par Direct Marketing Communication Sénégal (Dmc), “il ressort que, dans leur majorité, les Sénégalais considèrent que le sida est une maladie comme les autres, ignorant ainsi son degré de gravité”. Et ceux qui pensent que le sida “est une affection grave, incurable, mortelle, dangereuse ou contagieuse ne mesurent pas avec exactitude les dégâts que le sida est en train de faire au sein des populations”. D’où l’inquiétude de l’équipe de Dmc qui se demande quoi dire de ceux qui n’appréhendent le sida qu’à travers ses aspects externes, c’est-à-dire l’amaigrissement, la destruction du corps humain, “sans saisir la différence entre le porteur du virus sain, mais néanmoins contagieux, et le malade du sida”.

Pire, après une décennie de sensibilisation, il y en a encore au Sénégal des personnes qui ignorent ce qu’est le sida, car “4,5 % des Sénégalais ont déclaré ne pas savoir” ce qu’est cette maladie sexuelle. Et les taux les plus faibles de connaissance du sida sont enregistrés à Kaolack et à Louga avec des taux de notoriété respectifs de 93,1 % et 93,6 %. Une ignorance confirmée par certains moyens de transmission de la maladie cités par des personnes interviewées. Il s’agit du contact avec la personne infectée, des piqûres de moustique et du manque d’hygiène.

En outre, d’autres Sénégalais considèrent le sida comme une punition divine, s’il n’est la maladie des infidèles ou celle des femmes. Alors, “il est nécessaire de recentrer le débat sur le sida et surtout d’informer”, conseille le rapport du Dmc.

Quant aux moyens de transmission du sida, la voie sexuelle et la voie sanguine sont plus connues par les hommes que par les femmes. Par contre, pour la transmission verticale, c’est-à-dire la transmission de la mère à l’enfant, les femmes sont plus informées que les hommes, “car plus réceptives à un problème qui les concerne directement”, expliquent les enquêteurs. Par ailleurs, pour se prévenir contre le sida, “les Sénégalais de manière générale (s’y) connaissent bien».

Dans l’étude de Dmc pour le compte de Family Health International, certaines régions se distinguent par leurs méthodes de préférence. Si la région de Fatick prône plus l’usage du préservatif que les autres régions, Ziguinchor a choisi la fidélité alors que Saint-Louis opte pour l’abstinence. Toutefois, cette dernière région mise à part, l’abstinence, qui a enregistré 16 % des réponses, n’est plus le moyen de prévention des Sénégalais. Selon les résultats de la campagne de la mobilisation, c’est d’abord la fidélité avec 39,6 % des réponses, ensuite le préservatif (29,9 %). Néanmoins, cela révèle un changement de mentalité qui s’amorce d’autant que 13,1 % des personnes interrogées sont favorables à un contrôle systématique du sang avant le mariage.

Pour une meilleure information

Les différentes activités de mobilisation contre le Vih/sida menées dans les neuf des régions du Sénégal ont constitué en des roadshow et des niches composées en particulier de corps professionnels comme les pêcheurs, les transporteurs ou les militaires. Aussi il a été diffusé une pièce de théâtre suivie de discussions lors desquelles il a été constaté que “le besoin de parole entre parents et enfants est vécu comme une nécessité douloureuse aussi bien dans le sens parents-enfants que dans le sens enfants-parents”.

Par ailleurs, si le sida est bien connu du public, il n’en est pas de même pour les autres infections sexuellement transmissibles (Ist) qui
“sont très méconnues et leurs dangers sont très souvent sous-estimés”. Ne comptez pas sur des images pour convaincre ce public de l’existence d’autres infections sexuellement transmissibles. En effet, “les images des lésions causées par les principales Ist” qui sont montrées au public sont considérées par ce dernier à 100 % comme des images qui “ont été prises ailleurs qu’au Sénégal. L’émoi est toujours très grand à l’idée que “ces choses là” existent à côté d’eux”, lit-on dans le rapport.

Cependant, les hommes se sont révélés plus curieux quant aux Ist et le Vih/sida parce que “conscients que le problème est réel et qu’il convient d’y porter attention”. Les jeunes, quant à eux, sont en général informés sur ces infections sexuelles, mais leur curiosité s’oriente vers “les moyens de se protéger et la difficulté du dialogue entre les générations”. Chez les femmes, l’idée du test avant le mariage commence à germer et certaines estiment même “nécessaire” ce test. Par contre, d’autres pensent ne pas détenir la clef de leur propre sexualité, en tout cas dans le mariage. Quelques-unes “ont avoué publiquement savoir que leurs maris ne sont pas fidèles, mais ne peuvent rien faire pour se protéger elles-mêmes”.

Par ailleurs, la notion de comportement à risques n’est pas encore bien vulgarisée et “les transporteurs à Thiès se sont plaints d’être stigmatisés comme «groupe à risques”. D’ailleurs, des questions d’éthique se posent par rapport à la vie sociale du séropositif, du genre à savoir s’il doit se marier ou avoir des enfants. Ce qui démontre que ces populations d’hommes mûrs nécessitent encore beaucoup d’informations, car “ils ont plein d’idées préconçues et ne peuvent, compte tenu de leur rang social, s’informer auprès des jeunes”. Le “vieux” reste celui qui est “censé tout savoir”.
Aminatou M. DIOP

Lire l'article original : www.walf.sn/archives/article2.CFM?articles__num=9572&unelocale__edition=3055

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