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KAOLACK ET FATICK : Des régions-carrefours face au défi du VIH/SIDA - Le soleil - Sénégal - 27/05/2003

Les régions de Kaolack et Fatick, situés au centre du Sénégal, sont des régions carrefour. Le bassin arachidier est très touché par la pandémie du sida eu égard à la densité de sa population et aux mouvements de celle-ci. Dans la région de Fatick, le développement du tourisme (elle est la 5è région touristique du pays), fait craindre le pire. L’existence d’un seul centre de dépistage anonyme et gratuit (à Kaolack) ne donne pas une idée globale sur la propagation du sida. Pourtant, des interventions multiples ont été initiées dans ces deux régions voisines, souvent confondues, pour combattre la maladie. Ces interventions font une part belle à la sensibilisation et à l’information des jeunes.

Dossier réalisé par IBRAHIMA KHALILOULLAH NDIAYE

Les articles du dossier :

Des régions-carrefours face au défi du VIH/SIDA

La sensibilisation contre le sida a été faite, pendant très longtemps, à l’occasion d’événements ponctuels dans la région de Fatick. Ainsi, au rythme de semaines nationales de femme et de la jeunesse et de journées mondiales, les autorités médicales de la région, notamment de l’Education pour la santé (EPS), essayaient de mettre en branle leur programme de sensibilisation contre le VIH sida et les infections sexuellement transmissibles (IST), révèle Mamadou Samba Mbow, le responsable régional d’EPS. Pourtant, le Comité régional de lutte contre le sida existe depuis 1985. « Cette politique de sensibilisation a été menée en faveur de nos répondants dans les six districts sanitaires, il s’agit des associations de jeunes, des écoles, les groupements féminins, etc.

Les jeunes venaient nous retrouver dans nos locaux pour des informations. Nous avons choisi, devant la modicité de nos moyens, de faire la communication de proximité et de distribuer des dépliants, des brochures et d’utiliser des diapositives », rappelle M. Mbow. L’EPS est dotée, en 1994, d’un poste téléviseur et d’une vidéo pour « moderniser davantage » sa communication axée sur le sida et les IST. Une année plus tard, s’implante, dans la région médicale, le Projet support lutte contre le sida financé à hauteur de huit millions de francs par la coopération canadienne. « Ces fonds de l’ACDI nous ont permis de développer une formation des jeunes, en collaboration avec les CDEPS, après une enquête de diagnostic. Le financement a été une opportunité pour les jeunes d’initier des séances de sensibilisation par le théâtre, les radio-crochets… Malheureusement, ce projet a pris en 1995 », témoigne Mamadou Samba Mbow.

Il a fallu attendre trois années pour qu’un autre programme, celui de FHI, s’installe, pendant deux ans, dans la région. « C’est véritablement avec l’arrivée de FHI que nous avons pu bénéficier de moyens financiers conséquents et aussi de moyens didactiques. Il y a eu un équipement en supports et outils de travail. L’installation de FHI nous a offert la possibilité de former dans chaque district 30 jeunes relais aussi bien chez les garçons que chez les jeunes filles. Un soutien a aussi été apporté au personnel de santé dans son travail de sensibilisation », souligne le responsable de l’EPS. Le personnel médical n’a eu, à en croire M. Mbow, de cesse de se déployer sur le terrain. Le « partenariat fructueux » avec les CDEPS et autres mouvements de jeunesse et féminins s’est articulé autour de conférences, causeries, d’encadrement des activités sur le terrain et de formation.

L’Association pour le bien être familial (ASBEF) se fait remarquer dans la sensibilisation depuis son installation en 1995. Elle s’est également appuyée sur des relais. Tout comme l’Action pour le développement (ACDEV) qui a la particularité d’avoir des relais polyvalents. Ces relais, « tampon entre les populations et le personnel de santé », n’ont pas accompagné le retour du FHI en 2000.

Ces différentes interventions poussent à l’optimisme sur les connaissances acquises. «Nous avons eu beaucoup de satisfaction dans le travail abattu. La région a été plusieurs fois choisie pour abriter des temps forts de la lutte contre le sida. Mais, les comportements sexuels observés poussent à relativiser cet optimisme même si nous estimons que le taux de connaissance est très élevé sur le mode de contraction et de contamination du sida. Ce taux de connaissance ne traduit pas un comportement chez les jeunes. C’est pourquoi, il faut redoubler d’efforts dans la sensibilisation. Il faudra résoudre, dans cette quête, l’insuffisance de personnel de santé, et de moyens pour sensibiliser dans toute la région. Il y a encore beaucoup de jeunes qui se contentent d’informations erronées et une bonne proportion de la population ne croît pas encore à la réalité de la maladie », regrette M. Mbow. En l’absence d’un centre de dépistage, une surveillance sentinelle et un suivi des femmes en grossesse (depuis l’année dernière) ont cours. La région devrait être dotée bientôt de centres de dépistage anonyme, sur financement FHI, à Fatick, Sokone et Guiguinéo, selon Mamadou Samba Mbow. Il rappelle que « toutes les actions préventives ont été accompagnées d’une politique de distribution gratuite de préservatifs par le Programme national de lutte contre le sida aux groupes vulnérables que sont les jeunes, militaires, prostituées, routiers, ouvriers, prisonniers ».

Les jeunes à l’avant-garde

L’existence du sida, les jeunes de Fatick l’appréhendent aux contours des dangers de la maladie. Même si les malades du sida ne courent pas les rues ou ne font pas partie du lot quotidien, bon nombre de jeunes sont à même de disserter sur les origines de la maladie et ses conséquences. La sensibilisation et les appels à un changement de comportement fondent une connaissance de la pandémie. « Il est évident que la maladie existe partout et nous ne pouvons pas dire que notre commune en est épargnée. La gravité de la maladie a dicté une prise de conscience qui s’est traduite par des campagnes de sensibilisation des jeunes. Ainsi, des réunions régulières ont été tenues dans les établissements scolaires, en collaboration avec les foyers, les associations sportives et culturelles et les mouvements de jeunesse de la commune. L’objet de ces rencontres était d’informer les jeunes sur les modes de prévention », rappelle Cheikh Camara, président du conseil communal de la jeunesse de Fatick, par ailleurs coordonnateur régional du Projet contre la vulnérabilité des jeunes face aux infections sexuellement transmissibles (IST) et sida. Financé par le FHI, l’exécution du projet dont M. Camara se fait l’écho est assurée par FHI avec un financement de l’USAID. L’approche choisie s’est faite, a en croire Cheikh Camara, par la déclinaison « à l’occasion de séminaires de différents modules ayant trait à la communication, au changement comportemental et aux explications sur les IST. Le sida et les appareils génitaux ». Les thèmes choisis ne recoupaient pas seulement que les IST et le sida. La santé de la reproduction a fait l’objet d’un séminaire au mois de mars dernier.

La Swaa a également développé un programme, en partenariat avec six mouvements associatifs de la région (en raison de deux par commune) pour mieux informer sur le VIH/sida et les IST. La stratégie utilisée pour atteindre la cible jeune a été de former deux relais, un garçon et une fille, dans chaque commune. Après avoir été formés, ces relais se font le devoir de multiplier, chaque mois, les connaissances acquises auprès de vingt jeunes. La démarche ne manquait pas de pertinence si l’on considère que des 50.000 habitants de Fatick, les jeunes représentent 52 %.
« Nous avons beaucoup insisté sur l’abstinence et l’utilisation des préservatifs. Des points focaux ont été installés dans chaque quartier, sous la supervision des Associations sportives et culturelles (ASC), pour la distribution des préservatifs. Il faut reconnaître que vouloir préconiser l’abstinence chez bon nombre de jeunes peut relever d’une illusion », laisse entendre Khodia Diouf, l’une des deux relais de la commune de Fatick. L’unité de préservatifs était cédée à 25 francs CFA. Pour le préservatif féminin, il n’ est pas encore entré dans les mœurs.
« Pour bon nombre de jeunes de la ville, le sida serait une invention pour les dissuader d’entretenir très tôt des rapports sexuels. Ainsi, il est utile de leur parler d’abord des IST pour les convaincre de l’existence du sida qui, contrairement aux IST, n’a pas encore de remède », avance Mlle Diouf, âgée de 23 ans. Le corps médical, les organisations caritatives et les associations qui livrent le combat contre le sida peuvent s’enorgueillir de n’avoir pas mené un vain combat tant il est vrai que les jeunes peuvent s’entretenir sur le thème de la maladie.
« Le sida est une maladie très grave, transmissible par voie sexuelle ou des objets souillés. Je conseille l’abstinence sexuelle ou l’utilisation des préservatifs », avance Absa Wade, une jeune élève en secrétariat. Sa copine, Néné Sarr, ajoute la transfusion sanguine et la transmission de la mère à son enfant aux modes possibles de transmission de la maladie et d’indiquer qu’elle « est une porte ouverte à toutes les autres maladies ». Par rapport à l’utilisation du préservatif, les deux autres camardes de classe, Ndèye Yandé Diouf et Khady Ly, font remarquer que « même des rapports sexuels protégés ne sont pas fiables à 100 %. C’est pourquoi, aucun jeune ne devrait accepter de faire l’amour avant le mariage ». Pourtant les quatre jeunes filles, âgées entre 20 et 23 ans, déclarent toutes avoir des copains.
«Mon petit ami n’a pas à me demander de faire l’amour avec lui s’il m’aime vraiment. Il pourra attendre le mariage avant de passer à l’acte sexuel »,souligne Mlle Wade. « Nous connaissons comment utiliser les préservatifs, mais nous espérons n’avoir jamais à les utiliser sauf dans le cadre du mariage ne serait-ce que pour éviter des grossesses non désirées », soutient Khady Ly. « Notre souhait est de respecter la tradition et sauvegarder les acquis des anciens. Autrement dit, nous devons préserver notre virginité jusqu’au mariage », tranche Néné Sarr.
« Surtout que, ajoute Yandé Diouf, nous vivons une époque où il est dangereux de verser dans le vagabondage sexuel. »

La région de Fatick ne dispose pas encore de centre de dépistage. Cheikh Camara espère que ce centre verra bientôt le jour ne serait-ce parce que « certains vont déjà se dépister ailleurs en toute discrétion ». Nos quatre élèves vont jusqu’à suggérer des tests de dépistage avant de contracter le mariage. L’absence de centre de dépistage fait qu’il est impossible de donner un chiffre sur le nombre de séropositifs, semble regretter Félix Nkaye, l’autre relais. Ce dernier ne doute point de l’existence du sida dans la région du fait du développement du tourisme, de la proximité des villes de Kaolack et Mbour. Il est d’avis que le comportement sexuel, auparavant « pas du tout catholique », des jeunes à tendance à changer.
« Tous les jeunes garçons, du moins ceux que je connais, utilisent les préservatifs alors qu’il y a peu, nous pensions que le sida n’existait pas encore à Fatick. Certains jeunes étaient réfractaires à l’utilisation des préservatifs, soupçonnés d’altérer le plaisir sexuel, mais, pour éviter le sida et des grossesses les préservatifs sont devenus incontournables. Il faut comprendre que la plupart des jeunes est constituée d’élèves qui ne voudraient pas avoir des problèmes avec leurs parents ni à assumer les charges d’une paternité précoce. Les autorités médicales nous ont poussés à une attitude responsable et à prendre conscience de la gravité de la maladie. Les médias aussi ont joué leur partition dans la sensibilisation», affirme Félix Nkaye. A Foudiougne, le développement du tourisme est perçu comme le facteur propagateur de la maladie.
« L’arrivée d’étrangers et de jeunes prostituées nous inquiète. La localité est très petite, ainsi il est risqué pour nos filles de se livrer à la prostitution. On ne peut pas dire que le comportement de certains guides soit exempt de tout reproche par rapport à la propagation de la maladie », soutient El Hadj Mouhamet Sarr, élève en classe de terminale. Il en appelle à une « sexualité responsable » pour ne pas tomber dans le piège de la maladie.

CENTRE DE DÉPISTAGE DE KAOLACK : Un anonymat et une gratuité qui rassurent

Le centre de dépistage volontaire et anonyme de Kaolack semble perdu dans la ville. Implanté dans l’enceinte de Caritas, à deux pas de l’hôtel Dior, le centre à l’allure d’un bâtiment anonyme, inoccupé. Juste une plaquette qui renseigne sur sa vocation. La sobriété et le silence qui l’entourent ajoutent à la crainte des éventuels clients. Deux dames, au commerce agréable, sont les seuls permanents de la cellule Sida services de l’Association catholique de lutte contre le sida, créée en 1992. La décentralisation des activités de cette association a profité à la région de Kaolack qui a accueilli la première unité régionale ouverte le 1 er décembre 2001. Madeleine Senghor, l’une des techniciennes, déroule aux visiteurs les activités du centre, qui dispose d’une salle d’attente, d’un laboratoire et d’un bureau. Ces activités se résument à accueil, conseil, prévention et dépistage volontaire, anonyme et gratuit. « Nous nous occupons également de l’accompagnement des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). L’accompagnement comprend une prise en charge psychosociale, médicale et spirituelle des malades. L’assistance est faite pour permettre aux malades d’acquérir un traitement notamment contre les maladies opportunistes. Le soutien spirituel ou moral apporté est spécifique aux croyances de chaque malade », renseigne Mlle Senghor. Une volonté de« relever la dignité humaine », souvent bafouée pour certaines PVVIH est le soubassement de la philosophie de l’accompagnement.

Parcours du combattant

La simplicité de l’ « itinéraire du client » n’en cache pas moins un parcours du combattant. « Le client nous exprime l’objet de son déplacement. Si celui-ci n’est pas lié au dépistage, nous l’orientons. Mais s’il veut se dépister, nous lui soumettons un questionnaire pour la préparation. Si son déplacement est lié au dépistage, nous lui attribuons un numéro d’anonymat. L’entretien que nous avons avec lui est centré sur les risques réels et les motivations qui le poussent à faire le test. Nous le préparons aussi au résultat du test », indique Mlle Senghor. Le prélèvement peut ainsi être opéré dans le labo doté d’une chambre froide, d’une centrefigeuse pour séparer le sérum. Des tubes de prélèvement des aiguilles sont bien disposés sur des étagères. Le datamine permet de faire des tests rapides. Le tube est doté de deux traits qui confirment ou infirment de la séropositivité. Le client est fixé sur son sort quelque dix jours après le prélèvement. Aucun résultat n’est donné au téléphone. Et lors de la phase annonce, Mlle Senghor et Mme Ndiaye reviennent sur les anonymats. Un résultat négatif donne lieu à des remerciements formulés au client qui est « aidé à prendre conscience des risques ultérieurs ». « Si le résultat est positif, poursuit Madeleine Senghor, nous commençons par lever l’anonymat pour la pise en charge et un traitement à base d’anti-rétroviraux. L’engagement du client est requis avant que nous ne lui fassions une lettre d’orientation. La levée de l’anonymat est obligatoire pour un traitement sous ARV, mais la personne peut refuser de donner son identité. La délivrance d’un résultat positif est particulièrement difficile, mais nous n’avons pas encore connu de réaction agressive. Il n’est pas facile d’apprendre un tel résultat, mais si la personne a été bien préparée dans la phase pré-test, tout se passe bien ».

25 TESTS MENSUELS

L’objectif de 30 tests par mois semble avoir été atteint même si un minimum de 25 clients est enregistré mensuellement. Le centre a accueilli 505 clients depuis son ouverture. Des clients qui viennent souvent de façon spontanée ou sur recommandation d’autorités médicales de la région. « La plupart de nos clients sont âgés entre 18 et 35 ans du fait de la forte sensibilisation de cette tranche d’âge. Nous accueillons également des adultes. Il faut remarquer qu’il y a plus de femmes que d’hommes qui acceptent de faire le test. Après une année de fonctionnement, 60 cas ont été testés positivement. La ville est touchée par la pandémie », révèle Mme Ndiaye.

Le Centre se distingue aussi dans la prévention dans le milieu scolaire. Seulement, il n’y a pas de volet préservatif dans son fonctionnement conformément à l’esprit de l’église qui prône l’abstinence et la fidélité. Les techniciennes aimeraient voir un rush de clients. Elles se sont faites à l’idée que « certaines personnes préfèrent être dans le doute que de se savoir séropositives ». Le centre, acquis grâce à un financement de FHI dans le cadre d’un projet qui prend fin en décembre 2004, espère accueillir un nombre important de personnes.

Le centre de dépistage volontaire et anonyme de Kaolack semble perdu dans la ville. Implanté dans l’enceinte de Caritas, à deux pas de l’hôtel Dior, le centre à l’allure d’un bâtiment anonyme, inoccupé. Juste une plaquette qui renseigne sur sa vocation. La sobriété et le silence qui l’entourent ajoutent à la crainte des éventuels clients. Deux dames, au commerce agréable, sont les seuls permanents de la cellule Sida services de l’Association catholique de lutte contre le sida, créée en 1992. La décentralisation des activités de cette association a profité à la région de Kaolack qui a accueilli la première unité régionale ouverte le 1 er décembre 2001. Madeleine Senghor, l’une des techniciennes, déroule aux visiteurs les activités du centre, qui dispose d’une salle d’attente, d’un laboratoire et d’un bureau. Ces activités se résument à accueil, conseil, prévention et dépistage volontaire, anonyme et gratuit. « Nous nous occupons également de l’accompagnement des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). L’accompagnement comprend une prise en charge psychosociale, médicale et spirituelle des malades. L’assistance est faite pour permettre aux malades d’acquérir un traitement notamment contre les maladies opportunistes. Le soutien spirituel ou moral apporté est spécifique aux croyances de chaque malade », renseigne Mlle Senghor. Une volonté de« relever la dignité humaine », souvent bafouée pour certaines PVVIH est le soubassement de la philosophie de l’accompagnement.

Traitement sous anti-rétroviraux à Kaolack : Pertinence d'une décentralisation

Le choix de la ville de Kaolack pour le traitement sous ARV n’est pas fortuit. La position géographique, une ville carrefour, et son importance démographique en a fait le « premier maillon de la décentralisation de l’initiative sénégalaise d’accès aux anti-rétroviraux (ISAARV) depuis l’implantation de son centre de dépistage en décembre 2001 », souligne le Dr Abdoulaye Mamadou Bâ, médecin-chef des maladies infectieuses et coordonnateur du Comité régional de l’ISAARV de l’hôpital régional El Hadj Ibrahima Niass. En l’absence de données fiables, la région est vue comme l’une de celles qui présentent le taux de prévalence le plus élevé du pays. Déjà en l’an 2000, un bulletin épidémiologique mentionnait 14 mille séropositifs à Kaolack contre 20 mille à Dakar et 8 mille à Thiès. Parmi les 14 mille personnes vivant avec le VIH, on dénombre 13.600 adultes et 400 enfants de moins de 15 ans. Six mille femmes sont séropositives ». Le taux de prévalence du VIH/sida de 1.8 de la région est supérieur à la moyenne nationale, (1.4). Le médecin rapporte que bientôt une «étude sur la séro-prévalence sur la base des données de la banque de sang, des laboratoires régional et de l’hôpital et au centre de dépistage sera entreprise».

Le Dr Bâ révèle que 153 cas sont déjà enregistrés sur la filactive de sa structure. «Cette filactive est composée de personnes qui connaissent leur statut sérologique et adhèrent aux conditions de prise en charge. L’adhésion à ces conditions veut simplement dire que le patient accepte son statut et d’honorer, avec régularité, les rendez-vous avec tout le respect et le consentement éclairé. Evidemment, de notre côté, nous sommes garants de la confidentialité », révèle le coordonnateur. La prise en charge est pluridisciplinaire puisqu’elle est œuvre de cliniciens, biologistes, pharmaciens et acteurs sociaux pour l’accompagnement psycho-social. Elle s’applique aux malades qui donnent un «consentement éclairé » dès la phase pré-test. Le Comité se penche sur l’ «éligibilité ou non du client après une enquête sociale et une analyse biologique». «A ce jour, nous sommes à 40 cas sous traitement ARV et nous espérons doubler ce nombre d’ici la fin de la première semaine du mois de mai (NDLR : l’entretien a eu lieu au début du mois de mai). Nous avons envoyé 25 prélèvements à Dakar pour la numération des CD4.

Le traitement ARV n’est jamais une urgence et il convient de connaître le taux de CD4 avant de l’appliquer et de s’entourer de toutes les garanties avant de le démarrer. La maladie peut faire l’objet de trois classifications, A, B et C. Au stade A, il est asymptomatique et si le CD4 est inférieur à 200 par millimètre cube, il faut appliquer le CD4. Au stade B, on dit que la maladie est pauci-symptomatique. Mais au stade C on parle de sida clinique et, là, quelque soit le taux de CD4, il faut mettre en route un traitement. En définitive, on peut retenir que si le taux de CD4 est supérieur à 350 par mm 3 aux stades A et B, on peut simplement surveiller le malade pour guetter éventuellement la chute du taux et ménager les affections opportunistes », souligne le Dr Bâ.

Le Comité régional de lutte contre le sida intègre un volet dépistage dans son programme. « Nous incitons ceux qui viennent nous voir à aller se faire dépister au centre. C’est une recommandation du Conseil national de lutte contre le sida et de la division contre le sida que d’encourager les patients à un dépistage et de faire de la prévention dans tous les centres», rappelle M. Bâ.

Le grand défi du Comité régional est de parvenir à une prise en charge des jeunes personnes vivant avec le VIH. Jusqu-là, cette prise en charge n’est effective que pour les personnes adultes. «Nous avons entrepris de l’intégrer dans nos activités aussi bien pour les enfants que dans la prévention de la transmission mère-enfant. Ce qui explique la tenue prochaine d’un séminaire à l’intention des pédiatres, des gynécologues, des sages-femmes et des pédiatres de la région avec l’appui de la division IST/sida. Nous enregistrons des cas isolés d’enfants de 10, 2 et 2 ans et démi qui sont séropositifs », note Abdoulaye Mamadou Bâ. Il rassure sur le « stock d’ARV qui ne souffre pas de pénurie ni de dysfonctionnement ». Les malades sur la filactive « sont très conscients de leur situation, essaient de ne point propager la maladie et prennent leurs responsabilités avec courage et lucidité ».
Une large sensibilisation est menée dans le Plan d’action du Comité.

Des rapports sexuels de plus en plus protégés

Les activités du centre régional d’éducation pour la santé (CREPS), logé à la Région médicale de Kaolack, se confondent avec la célébration d’événements spéciaux. Ces événements ont trait à la célébration de journées mondiale de la santé, de l’allaitement maternel, du sida…

Seulement, le Centre développe des activités permanentes, à en croire Mbaye Sall, un éducateur pour la santé. Parmi ces activités, il note la « communication de masse et interpersonnelle, la production de spots radio, l’organisation de manifestations culturelles de conférences, d’expositions dans les quartiers ». La supervision et la formation sont à compter au chapitre des initiatives du centre. Les IST et le sida ont amené l’équipe du CREPS à développer des séances d’information, éducation et communication dans les bars et les milieux des professionnels du sexe. « Nous utilisons une boîte à images pour expliquer notre démarche et un sexe en mannequin pour la démonstration du port du préservatif. En appoint, nous avons deux prostituées comme relais pour répondre aux questions de l’assistance », souligne M. Sall. Les « rencontres de solidarités sociales des groupements féminins » et baptisés « sandi jamra » et les associations sportives et culturelles ont été la cible de l’équipe de Mbaye Sall pour la sensibilisation. « Nous répondons également aux sollicitations qui nous soumises, mais nous devons essayer d’atteindre le maximum de jeunes possibles étant entendu qu’on peut comparer les jeunes, une couche vulnérable aux IST et au sida, aux homards qui, le temps de changer de carapace, sont sans défense. Les jeunes doivent être encadrés pour une bonne maturation. Les avortements sont consécutifs à l’immaturité physique et psychologique.

Tout en prônant l’abstinence, il convient de développer des occupations saines et ludiques, car autrement les jeunes vont s’intéresser au sexe », suggère M. Sall. Dans un langage teinté d’humour et un argumentaire qui puise ses expressions dans la tradition orale wolof, il s’époumone sur le sida «une nouvelle maladie mortelle, sans remède ni vaccin. Elle interpelle tout le monde. Quand on ne fait pas partie de la solution, on fait partie des problèmes».

La solution, le Centre de conseil pour adolescent du CDEPS de Kaolack veut en faire partie. L’objectif, révèle Galaye Yade, le coordonnateur de Kaolack, est de « sensibiliser les adolescents pour qu’ils changent d’attitude et de comportement en vue de devenir des adultes responsables ». Le travail s’effectue à deux niveaux : prévention et stratégies de changement. Au premier niveau la sensibilisation est faite de causeries, conférences autour des points d’information carrefour. L’équipe de M. Yade offre des services, notamment par un traitement si le sujet présente le VIH.Au delà, des relais pour la sensibilisation des pairs, le CDEPS a initié l’installation de Club ados, de 25 membres, et qui sont présentement de 15. « Notre objectif est de monter 100 Clubs ados à travers lesquels nous pourrons sensibiliser directement tout en essayant de responsabiliser les jeunes. Par ailleurs, nous faisons de la référence.

Autrement dit, quand nous ne pouvons pas prendre en charge la demande de l’adolescent qui nous sollicite, nous l’orientons vers les structures appropriées suivant nos critères : l’anonymat, la confidentialité, la gratuité. Nous devons aussi ménager la sensibilité des adolescents. C’est ainsi qu’il y a une écoute téléphonique », révèle Galaye Yade. Le Centre distribue des préservatifs tout en mettant un accent sur leur utilisation et l’abstinence. « Le taux de prévalence, soutient M. Yade, de la région reste une inconnue. On peut dire qu’il est alarmant. D’aucuns parlent de 2 %, mais ce taux doit être en-deça de la réalité. Seulement, nous pouvons afficher un certain optimisme vu que nous connaissons souvent une rupture de préservatifs. Ce qui veut dire que les jeunes protègent de plus en plus leurs rapports sexuels ».

CENTRE DE SANTÉ DE KASNACK : Confidences de « la mère des prostituées »

Le Centre IST du district de Kasnack est connu pour le travail qu’il abat. Il est un détour obligé pour ceux qui veulent cerner la réalité du sida et des IST. Son ouverture, en 1976, lui a valu une expérience dans le suivi des prostitués et des adolescents. «Le constat qui a guidé à l’ouverture du Centre est l’importance de la prostitution à l’époque de l’ONCAD. Il s’y ajoute que beaucoup de professionnelles de sexe se plaignaient de maladies. Nous avons intégré le sida dans nos priorités et un volet dépistage», soutient Goundo Fofana, la responsable du Centre. Le taux de prévalence du sida se situe entre 35 et 40 % chez le millier de prostituées suivies. Bon nombre de jeunes seraient compris dans ce lot. Pourtant, les membres du corps médical ne cessent de déployer des efforts pour prévenir et sensibiliser. « Nous avons multiplié les séances pour inciter et insister sur l’utilisation des préservatifs, du dépistage, des modes de prévention. Les gens ne sont pas systématiquement portés vers le dépistage». « Le volet sensibilisation est important pour que celles qui sont déjà des séropositives ne versent pas dans la clandestinité. La fourniture de préservatifs peut varier mensuellement entre 28 et 40 pour une femme », assure le Dr Jean-Claude Boucal. Il est à noter que l’ « âge minimal et légal pour l’exercice de la prostitution est de 21 ans». « Il convient néanmoins de noter que les prostitués sont mieux informés sur le sida que la population générale. Cela est certainement du au volet éducation, développé en collaboration avec la région médicale. Il y a encore beaucoup de choses à faire. Je pense que nous ne parlons jamais assez du sida », souligne M. Boucal. Au Centre de Kasnack, le dépistage est systématique pour la surveillance sentinelle. « La fréquentation du Centre anonyme de dépistage n’est pas ce qu’elle devrait être. C’est pourquoi nous devrons continuer à sensibiliser et à descendre dans les bars, les maisons closes en vue d’atteindre également la clientèle des prostituées », avise Mme Fofana. Celle-ci, devenue une « mère » des prostituées, soutient avoir vu trois générations d’une même famille (grand-mère, mère, fille) avoir recours à la prostitution. Ou encore quatre sœurs de même père et même mère se livraient au métier. Elle trouve des explications pour ces « soutiens de famille qui sont souvent divorcées avec des enfants en charge ou abandonnées par leurs époux… »

CONFLIT GENRE : Quand les jeunes en parlent…

« Le paludisme est plus dangereux que le sida puisqu’il fait plus de victimes que le sida ». La boutade est d’un élève de 4ème au cours d’une discussion sur le sida tenue avec treize autres de ses camarades (garçons et filles), tous élèves et âgés entre 15 et 25 ans, au CDEPS de Kaolack. Au-delà de la possibilité de vérifier une telle assertion sous nos tropiques, l’assertion de Zacharia Dramé a le mérite d’éclairer la compréhension de la plupart des jeunes sur le sida. Ousseynou Niang ne manque pas de lui répliquer que la «maladie virale qu’est le sida expose notre système immuno-défense». Parlant des modes de protection contre la maladie, nos interlocuteurs sont unanimes à parler de rapports sexuels protégés. La protection se ferait avec du «protec» défini par d’autres comme un « condom » ou encore un «genre de toile mouillé et bien gardé pour qu’il ne se déprime pas». Le préservatif est aussi dénommé, en langage codé, «oreille d’enfant» et «chaussette». Comme pour mettre en exergue une virilité soudain découverte, les jeunes garçons se laissent aller sur le mode d’utilisation pendant que les filles restent silencieuses. Elles écoutent ébahies, l’air innocent, la discussion, à nouveau passionnée, opposant soudain deux clans de garçons. Elle porte sur le doublement du préservatif pour «maintenir les chances de ne pas contracter une maladie où encore de ne pas engrosser la partenaire». « Cela est déconseillé. Il faut simplement respecter les prescriptions. Il n’est donc point utile de le doubler », calme celui qui semble en connaître plus que ses camarades. Pour le préservatif féminin, les jeunes filles déclarent en avoir appris la commercialisation même si elles ne l’ont encore jamais vu ni utilisé. Il a « la forme du bombon polo », soupçonne l’une d’elles. Si les jeunes filles sont d’avis qu’il faut attendre le mariage pour passer à l’acte sexuel, afin de préserver sa virginité, certains garçons les taxent d’être de «veilles ringardes». C’est reparti pour des échanges sur la perte de la virginité. Et l’hymen, convoqué pour éclairer sur la virginité, est disséqué par les jeunes. La morale et la tradition sont également mises à profit, par les unes, pour expliquer la « déception, le manque de respect éventuel d’un mari qui se rendrait compte que sa dulcinée a déjà perdu la virginité ». « Il est faux de parler de préservation de virginité alors que de nos jours, tout le monde sait que l’âge du premier rapport sexuel est très précoce aussi bien chez les garçons que chez les filles », lâche l’un des garçons. Les filles campent sur leurs positions et se font à l’idée « qu’il est possible d’avoir un copain sans entretenir des relations sexuelles ».

Des medias solidaires

«Contribuer à renforcer les connaissances des jeunes sur les questions liées au VIH, amener les jeunes à être plus réceptifs aux messages de prévention et à s’approprier des actions de prévention ». Tels sont, entre autres, quelques objectifs des termes de référence de la campagne mondiale «Médias-Jeunes/sida» du Projet Youth Net. Une campagne, dénommée encore « Rester en vie », qui a conduit le Conseil national de lutte contre le sida (CNLS) et le FHI à élaborer une stratégie visant à «donner la parole aux jeunes pour freiner l’infection». Elle s’est traduite par un protocole entre FHI et certaines stations radio de la ville de Kaolack. «Le protocole était d’une durée de six mois et s’est terminé au mois de mars dernier. En ce qui nous concerne, nous avons réalisé des émissions en ciblant les adolescents et en décentralisant l’antenne pour aller dans les marchés hebdomadaires. Cette émission est animée par le médecin-chef. Selon l’actualité, celui-ci se penchait sur un thème bien spécifique », souligne El Hadji Guissé, le directeur de la station régionale de Sud-Fm. Le partenariat avec FHI a permis de « renforcer nos capacité de multiplier les informations ». La démarche de la radio s’est traduite par un « engouement populaire » à en croire son directeur. Pour les six émissions réalisées au studio, M. Guissé se réconforte du nombre d’appels reçus. L’effort de la radio ne s’est pas arrêté qu’à la production et la diffusion de 240 spots. Sa contribution est évaluée à un million de francs CFA. Une somme équivalente à celle que doit lui remettre FHI. Un contrat similaire, mais de trois mois, a été signé avec la station Dunyaa qui avait également une émission hebdomadaire sur la santé. «Cette émission interactive a eu un succès retentissant au vu du nombre d’appels téléphoniques. Avec FHI, nous avons développé des jeux-concours pour inciter les jeunes à participer davantage », signale Adama Edouard Ndiaye, le chargé des programmes.

 

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