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Le centre hospitalier de Diamniadio menacé de coma - Le soleil - Sénégal - 19/06/02

Situé à la sortie de la région de Dakar, en bordure de l’axe routier le plus fréquenté du pays et non loin de la voie ferrée, le centre hospitalier de Diamniadio vit, depuis près de deux ans, un calvaire, devant l’afflux quotidien de malades et la rareté de plus en plus accentuée des ressources financières. La population a décidé de lancer ainsi un SOS en direction des décideurs politiques et des bonnes volontés.

Quand on construisait, il y a un peu plus de cinq ans, le centre hospitalier “Elisabeth Diouf” de Diamniadio, à une quarantaine de km de Dakar, tout le monde avait applaudi du fait de son emplacement stratégique sur la route nationale n°1, axe le plus fréquenté parmi les routes du Sénégal, puisqu’étant la seule voie de sortie de la capitale qui mène vers toutes les régions de l’intérieur, aussi bien du centre, du sud que du nord. De nombreux accidentés pouvaient y trouver un point proche pour y recevoir rapidement des soins médicaux.

Mais, depuis un peu moins de deux ans, l’hôpital, qui est en fait un “centre de santé”, est dans une situation difficile pour plusieurs raisons, notamment institutionnelle et financière. Il fonctionne sans dotation budgétaire de la part de l’Etat et de la collectivité dans laquelle il se situe. Le système de recouvrement de coût n’arrive même pas à assurer convenablement la moitié des besoins de fonctionnement (renouvellement des stocks de médicaments et de consommables, maintenance des équipements, etc.)

Pour la petite histoire, c’est la fondation “Solidarité Partage” de la présidente Elisabeth Diouf qui avait mis sur pied ce “petit” hôpital. D’ailleurs, c’est elle-même, accompagnée du président Abdou Diouf qui l’avait inauguré, le 20 décembre 1996. L’hôpital était doté au début de différents services comme la radiologie, le bloc chirurgical, médecine, maternité, chirurgie dentaire, laboratoire, morgue, des logements pour le personnel, etc. Il y a également une mosquée et une église, qui ne fonctionnent pas encore.

Les visiteurs d’un temps, qui viennent à l’hôpital, n’ont pas le temps, ou préoccupés qu’ils sont par les douleurs qu’ils cherchent à soulager… Les deux lieux de culte restent donc désespérément fermés. Idem pour la morgue dont les lavoirs funéraires sont recouverts d’une couche de poussière.

“Nous n’avons même pas de quoi payer un jardinier pour nous entretenir les plantes ornementales qui débordent maintenant sur les allées, et les murs commencent à se lézarder faute d’entretien”, nous a confié Fara Mansour Mendy, chargé de la sécurité et servant aussi comme aide à la radiologie. Seuls lui et quelques-uns de ses collègues infirmiers “civils” ont accepté de nous glisser quelques mots sur les raisons de leur inquiétude en fait justifiée. Le médecin-chef, médecin capitaine, le Dr Tierno Oumar Sako, qui a pris fonction, il y a de cela seulement deux semaines, s’est replié tactiquement derrière l’obligation de réserve.

“Nous sommes militaires et si vous voulez des informations vous pouvez contacter la DIRPA”, nous a-t-il dit. Il a succédé à d’autres médecins militaires, notamment les capitaines Drs Ibrahima Socé Fall et Cheikhou Camara.

Tout le personnel médical et paramédical de l’hôpital est paradoxalement militaire, donc des fonctionnaires de l’Etat, qui font “fonctionner” la structure, sans dotation budgétaire de l’Etat. Les militaires sont composés d’un médecin, d’une chirurgien-dentiste, d’agents d’administration, d’infirmiers et de chauffeurs. Seule la maternité est dirigée par une jeune sage-femme, Mlle Marie Diouf, aidée de matrones issues de la communauté rurale. Elle a été recrutée en novembre 2001 par l’hôpital pour faire fonctionner la maternité de 16 lits, qui reçoit chaque jour entre 10 à 15 femmes pour des consultations prénatales et des demandes de conseils en planification familiale.

“Actuellement, le bloc chirurgical n’est pas fonctionnel et nous sommes obligés de référer rapidement les cas urgents vers Rufisque, Dakar ou Thiès”, nous a confié la sage-femme, qui ne travaille que du lundi au vendredi.

Au début, tout marchait à peu près bien, avec l’appui de l’entreprise privée “Pétrosen”, qui a soutenu matériellement et financièrement la structure sanitaire. “Pétrosen” a décidé un bon matin de tout arrêter. Cela a été le début des difficultés. Des trois ambulances, seule une est en état “précaire” de marche. “Les équipements de la radiologie sont obsolètes et nous n’avons pas d’appareil pour sécher les films des radiographies”, nous a encore confié M. Mendy. “Ce qui fait que nous les (ndlr : les films) mettons au soleil. Donc, quand il y a de la pluie ou s’il fait nuit, nous ne pouvons rien faire. Je me rappelle du déraillement du train, en l’an 2000, durant le Magal de Touba. Cela s’était passé près de Diamniadio. De nombreux blessés auraient pu être sauvés si on avait du matériel adéquat. Tous les hôpitaux de Dakar, Thiès et Diourbel ont reçu à cette époque une partie des 500 millions de francs CFA pour soutenir les urgences médicales et chirurgicales. On a oublié l’hôpital de Diamniadio, pourtant situé à un point névralgique de la circulation routière et ferroviaire. Et c’est le cas encore. On nous achemine presque chaque jour des blessés de la circulation et nous n’avons rien en échange de la part de l’Etat après avoir donné les premiers soins avec le peu dont nous disposons”.

Sur un autre plan, les travailleurs “civils”, au nombre de 24, dont la plupart s’occupent de l’administration comme secrétaire, de l’entretien, de l’hygiène hospitalière et de la sécurité, n’ont quasiment pas de statut. Ils reçoivent leurs salaires (entre 50 et 60.000 FCFA par mois) sans bulletin, sans cotisation à l’IPRES et à la sécurité sociale. Ils ne sont pas vaccinés contre les risques d’infections nosocomiales et n’ont pas de matériels de protection. IDEM pour les préposés à la radiologie, qui manipulent des produits toxiques à longueur de journée.

Selon un agent qui a voulu garder l’anonymat : “nous avons fait des démarches pour susciter un engouement de la population de Diamniadio pour leur structure qui n’a pas de comité de santé”, a ajouté M. Mendy. C’est ainsi que des démarches ont été timidement faites pour instituer une participation communautaire aux recouvrements des coûts. C’est aussi ainsi que le ticket de consultation a été fixé à 500 FCFA. Ce ticket, acheté dès l’entrée est valable trois jours durant et le malade devra se munir d’un autre ticket pour les jours suivants.

“Les populations de la localité de Diamniadio et des villages qui la polarisent sont très défavorisées, et de nombreuses familles y vivent au-dessous du seuil de pauvreté”, nous explique M. Mendy. “Nous ne pouvons pas leur demander plus, alors que les malades nous viennent de nombreuses zones dont Ponty Village, Yène, Sébikotane, Bargny et même de Thiès ou Mbour, parce que nous pratiquons les recouvrements les moins élevés”, a-t-il poursuivi, en insistant aussi sur le fait que leur structure s’investit comme toutes les autres dans les programmes de santé publique de routine ou spéciaux comme le Programme élargi de vaccination, les journées de vaccination contre la polio et sur les micronutriments, la planification familiale, la tuberculose, le paludisme, etc.

Pendant l’hivernage, et peu de mois après, nous recevons beaucoup de cas de paludisme et les salles sont submergées par des malades de tous les âges”, a indiqué un infirmier. Durant le premier trimestre de 2001, l’hôpital a enregistré 42 tuberculeux. L’hôpital reçoit aussi beaucoup d’enfants malades en pédiatrie. En mai dernier, 25 enfants ont été hospitalisés en pédiatrie. FARA DIAW

Lire l'article original : www.lesoleil.sn/archives/article.CFM?articles__id=14919&index__edition=9612

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