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SANTE URBAINE : A la recherche d’une stratégie adéquate - Sud quotidien - Sénégal - 20/06/02

En l’an 2025, 61 % de la population mondiale vivra en milieu urbain, notamment dans les pays en développement. Un changement radical puisque, " pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, une majorité de la population vivra en milieu urbain. Même l’Afrique, encore très largement rurale aujourd’hui, comptera une majorité de citadins de moins de trente ans ". Cet accroissement explosif associé au gigantisme qui caractérise le développement des mégapoles aura de graves incidences sur la santé des populations urbaines, notamment dans la partie sub-saharienne du continent. C’est pour contrer l’obstacle majeur de l’inégalité d’accès aux soins qu’un séminaire sur la santé urbaine se tient depuis avant–hier, mardi 18 juin à l’hôtel Novotel de Dakar.

Pendant trois jours, des responsables politiques, des responsables sanitaires et des techniciens des pays en développement, des partenaires au développement, des représentants d’organisations non-gouvernementales entre autres, vont proposer des stratégies pour l’amélioration de la qualité et l’accès aux soins des plus démunis en milieu urbain, permettant de tirer toutes les leçons utiles pour passer à l’action.

elon les estimations de l’Oms en effet, l’effectif total de la population mondiale passera de 5,2 milliards à 7,8 milliards de personnes entre 1990 et 2020 ; pendant cette même période, la population urbaine mondiale va doubler et c’est dans les pays en développement que cette augmentation sera la plus forte. Cet accroissement explosif associé au gigantisme qui caractérise le développement des capitales aura une incidence grave sur la santé des populations urbaines notamment en Afrique sub–saharienne. Les villes accueillent une proportion croissante des populations les plus exposées à des risques nouveaux et accrus comme la pandémie du Sida dont l’ampleur prend des proportions alarmantes. Cette situation oblige à s’interroger sur l’efficacité globale du système de santé en milieu urbain. L’initiative de Bamako, focalisée essentiellement sur l’accès durable à un paquet de soins essentiels pour les femmes et les enfants en milieu rural, n’a guère été appliquée en milieu urbain. Cependant, dès la fin des années 80, les expériences initiées par la Coopération française dans plusieurs capitales africaines ont mis en évidence des problèmes de santé spécifiques au milieu urbain. Ces problèmes concernent le coût excessif des services, la mauvaise qualité de l’offre, l’irrationalité des itinéraires thérapeutiques des malades, et la faible solidarité autour de la prise en charge des épisodes morbides.

En effet, fait remarquer le ministre de la Santé et de la prévention, le Pr. Eva Marie Coll Seck, " si dans les villes, l’accès géographique aux structures de santé est généralement plus aisé qu’en milieu rural, la question de l’accès financier et de l’utilisation des services s’y pose avec autant sinon plus d’acuité ". Et le ministre d’ajouter: " Ceci est particulièrement vrai pour les groupes les plus vulnérables, qui viennent de plus en plus nombreux grossir les populations de nos villes ".

Après reconnaissance de la complexité du problème de la santé en milieu urbain, elle a annoncé l’approche pluridisciplinaire de la recherche qui ne s’intéresse pas seulement aux aspects purement médicaux de la qualité des soins, mais examine également avec beaucoup de finesse les aspects socio-économiques et anthropologiques. L’amélioration de la qualité des soins et l’accès aux soins de santé, notamment pour les démunis, constitue pour le ministre de la Santé et de la prévention, une priorité de la politique de santé du Sénégal, et " est inscrite comme telle dans notre programme national de développement sanitaire ".

Prise en charge de la santé urbaine à Dakar

La ville de Dakar a toujours accordé une priorité à sa politique de développement sanitaire et social, inscrivant son action dans une dynamique de lutte contre la pauvreté.
Selon Ousmane Thiaw, spécialiste, " cet engagement sans réserve s’est manifestement traduit par la mobilisation d’importantes ressources financières qui lui ont permis de construire, d’équiper et de gérer un patrimoine d’infrastructures de huit centres de santé, vingt–neuf postes de santé et trois maternités urbaines ; ce qui lui vaut aujourd’hui d’occuper une place de choix dans le dispositif de couverture sanitaire et sociale de la région de Dakar, voire au niveau national ".

Cependant, ajoute-t–il, la ville de Dakar a dès 1996, élaboré et mis en œuvre une stratégie appelée " référence horizontale " et a mis l’accent sur une action sociale individuelle et/ou catégorielle en faveur des plus démunis, principalement au profit des groupes les plus vulnérables que sont les enfants en situation difficile, les personnes du troisième âge, etc.

Démocratiser l’accès à la santé

" Il n’existe pas encore dans les villes de politiques de santé urbaine qui prennent en compte chacun des acteurs et qui se donnent comme priorité l’éthique et la justice dans l’accès à la santé " a constaté Isaline Greindl, de l’Ecole de santé publique de l’Université libre de Bruxelles, Elle estime que la participation des habitants aux prises de décision reste marginale parce que " la voix des populations est encore trop peu exprimée, trop peu écoutée et trop peu entendue ".

Dans une étude intitulée " Dialogue entre acteurs et accès à la santé : regards sur les pratiques de santé dans quatre villes du sud ", le chercheur belge fait remarquer qu’on ne peut pas encore vraiment parler de bonne gouvernance en santé urbaine. En effet, la proximité du pouvoir central rend plus difficile le développement d’initiatives locales. Il s’y ajoute, poursuit-elle que " la collaboration entre les acteurs est insuffisante et ne permet pas de développer une approche cohérente de la santé ". Les politiques sectorielles ne prennent pas suffisamment en compte les contextes urbains et de manière plus globale la santé n’est pas inscrite comme une priorité dans les politiques de développement urbain. Ces différentes contraintes contribuent ainsi à accroître les injustices et l’exclusion des populations les plus pauvres par rapport à la santé.

Pour Isaline Greindl, " la démocratie repose sur la participation des populations, la bonne gouvernance des villes et la promotion de partenariat entre tous les acteurs ". La lutte contre la discrimination et contre la pauvreté est une partie intégrante, selon elle, des approches proposées et constitue aujourd’hui l’un des objectifs majeurs d’une vraie démocratie. Ainsi, pour aborder et gérer la complexité de la question de la santé en ville, de nouvelles formes de gouvernance basées sur un partage du pouvoir entre tous les acteurs doivent être envisagées. Ismaïla SARRE

Lire l'article original : www.sudonline.sn/archives/20062002.htm

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