Les
conférences internationales sur le sida ont quitté ces dernières
années le champ de la science pour se transformer en tribune de
revendications. Une tribune où ne sont applaudis que ceux qui pensent
comme les personnes atteintes du Vih. Des personnes à qui on ne
doit rien reprocher, mais qui, elles, ont tous les droits pour critiquer,
huer, casser des stands etc. La
14e conférence sur le sida à Barcelone n’a pas échappé à ce scénario.
Mais un homme qui “ n’applaudit pas parce que les autres applaudissent
”, a demandé hier à la cérémonie de clôture de la 14e édition de
ce grand rassemblement que l’on arrête de critiquer et d’accuser
les autres sans se remettre en cause.
En
effet, selon l’ancien Président de l’Afrique du Sud, “ beaucoup
de personnes critiquent les gouvernements, les sociétés pharmaceutiques…
c’est vrai, mais n’oublions pas notre faute. Chacun doit se demander
ce qu’il a fait pour la lutte et ce qu’il a à apporter à la lutte
”. De l’avis de M. Nelson Mandela, la grande difficulté dans la
vie, ce n’est pas d’influencer les autres, mais de corriger nos
propres erreurs. “ Il est bon, dit-il, de critiquer, mais il faut
examiner les stratégies que nous utilisons ”.
La 14e conférence sur le sida à Barcelone aura été celle de la grande
manifestation de colère des activistes. Qui ont cloué au pilori
tous les pays du G8 dont les représentants (au pouvoir) ont été
conspués. Ceux qui ne l’ont pas été, c’est qu’ils ne sont plus au
pouvoir. C’est le cas de M. Bill Clinton qui a été très ovationné,
quand le ministre actuel de la Santé du même pays, M. Tommy Thompson,
n’avait pas droit à la parole à cause du chahut. La 14e conférence
sur le sida de Barcelone a été fort peu riche en contenu scientifique,
parce que rien de vraiment nouveau n’est venu changer la grisaille.
L’accent a été mis sur le plaidoyer pour la recherche de financement.
Aussi la 14e conférence a-t-elle été une tribune de démonstration
de sympathies des hommes politiques à la cause.
Et pourtant aucune proposition concrète de dons ou d’augmentation
de parts à payer au fonds mondial n’a été fait pour apaiser la colère
des activistes. Les hommes politiques ont fait preuve de “ beaucoup
d’éloquence ”, pour paraphraser M. Mandela, pour qui cette verve
est inutile si rien n’est fait sur le terrain. “ Je demande aux
leaders, aux responsables de descendre sur le terrain. Lorsqu’un
leader est convaincu et engagé, sa réponse est plus convaincante
”. M. Mandela est déçu à l’instar des activistes parce que les choses
n’ont pas évolué depuis Durban. “ Depuis Durban où je me suis adressé
à vous, on m’a dit qu’il y a eu six millions de décès. Et que d’ici
20 ans, 70 millions de personnes mourront, à moins qu’on entreprenne
quelque chose ”.
Et
pourtant Barcelone s’est terminée comme Durban, toujours sur des
notes d’espoir et de promesses, sans aucune décision d’actions concrètes.
Un nouvel engagement est venu s’ajouter aux autres déjà faits. Celui
d’atteindre le nombre de trois millions de personnes à mettre sous
traitement d’ici à 2003 dans les pays les plus touchés. Cette promesse
et notamment le nombre avancé a été contestée par les activistes
qui, par la voix de M. Jerry Anderson, directeur exécutif de l’association
des personnes vivant avec le Vih aux USA, se sont interrogés : “
Qui va recevoir le traitement ? Qui ne le recevra pas ? Sur quoi
va-t-on se baser pour faire les choix ? Et puis si on peut prendre
trois millions, pourquoi ne pas en prendre six millions… ” ?
La
conférence de Barcelone que tous s’accordent à qualifier de militant
et hautement politique, a estimé que, vu que le Vih/Sida tue plus
que les guerres et les catastrophes récentes, il devra être accordé
à sa lutte autant de moyens que pour la sécurité et la défense des
territoires contre le terrorisme. Les USA qui dépensent 1,8 milliard
de dollars par mois pour la campagne militaire en Afghanistan, ont
été invités à faire autant pour le sida. Pour l’ex-président américain,
Bill Clinton, qui a présidé avec M. Nelson Mandela la cérémonie
de clôture de la 14e conférence sur le sida à Barcelone au palais
Saint Jordi, son pays doit payer sa part d’argent pour cette lutte.
“ Nous devons, a-t-il dit, déterminer notre part et il faut la payer
cette part. Les pays en développement doivent voir combien ils peuvent
payer et nous envoyer la facture, la différence. ” En attendant,
l’ancien Président des USA promet d’associer son image à la lutte
contre le sida et d’utiliser sa voix pour faire le plaidoyer à toutes
les tribunes où il se trouvera. Barcelone a passé la main à Bangkok,
en Thaïlande, pour l’organisation de la 15e conférence internationale
sur le Sida en 2004. B. ZEGUELA Envoyée spéciale
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l'article original : www.fratmat.co.ci/story.asp?ID=12159
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