10
octobre 2001 - Cameroon infonet
Médicaments sur Internet: Dangereuses
portes ouvertes vers une automédication sans frontières.
L’utilisation
de l’Internet augmente l'accès général du public à l'information
partout dans le monde.
Le commerce électronique se développe et transcende les frontières
des Etats.
Le secteur pharmaceutique n'échappe pas à cette transformation profonde.
Certains sites Internet, notamment américains, proposent la vente
en ligne de médicaments, favorisant ainsi le recours à une automédication
sans limites. Ce qui engendre de nouveaux problèmes de santé publique...
Liège,
le 9 Octobre 2001 : L’automédication est l’utilisation de médicaments
hors prescription par les patients, principalement de leur propre
initiative et sous leur responsabilité.
Les raisons qui conduisent à l’automédication sont diverses :
· la reprise d’un ancien remède qui a permis de soulager ses souffrances
dans le passé.
· les influences des amis et du voisinage.
· les politiques d’austérités et d’allégement budgétaire de certains
gouvernements en matière de sécurité sociale.
En effet, le déremboursement de certains médicaments ouvre la porte
à la publicité sur ce type de produits.
· la publicité sur les médicaments autorisés par les législations
dans certains pays, participe à une commercialisation à outrance
de médicaments.
· de nombreuses personnes se sentent de plus en plus capables de
prendre en charge leur propre santé, voire de préserver un capital
santé...
Pour
rappel, selon la Pharmacopée Européenne, « On entend par médicament,
toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés
curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales
» « Toute substance ou composition pouvant être administrée à l’homme
ou à l’animal en vue d’établir un diagnostic ou de restaurer ou
modifier des fonctions organiques chez l’homme ou l’animal est également
considérée comme médicament »
Le consommateur potentiel de médicament que nous sommes, remarquera
que cette définition, aux allures de compromis, est à l’origine
de la confusion sur ce que nous entendons par « médicament ».
Elle favorise l’émergence de nouveaux concepts : Nutriments et Alicaments,
vendus hors circuit traditionnel (pharmacie).
En plus, cette définition ne fait pas explicitement allusion aux
effets indésirables, toxiques et dangereux du médicament. La vente
de médicaments via l'Internet participe à la promotion de l’automédication.
Cette toile géante qui relie des millions d'internautes et abolit
les frontières, comporte des dangers incontestables.
La "Cyberpharmacie" pose de nouvelles questions et lance des défis
multiples. Mais en plus, elle permet aux médecins et aux pharmaciens
irresponsables et, en fait, à tout le monde, d'agir quasiment sans
risque de poursuites.
Des dérapages sont à craindre et aucun contrôle n'est possible.
L'origine exacte des médicaments proposés, les qualités et les quantités
de principes actifs annoncés dans ces médicaments ne sont pas garanties.
Si nous ajoutons à cela les problèmes liés à la contrefaçon de médicaments,
nous allons tout droit vers une réalité plus qu’alarmante.
Conscient du sérieux problème de santé publique qu'engendre cette
libre circulation des médicaments sur le web, certains pays mieux
organisés, notamment ceux de l'Union Européenne, essayent sans grand
succès pour le moment, de trouver des solutions : tenter d'éliminer
les opérateurs qui ne sont pas sérieux, sensibiliser les consommateurs
à ce problème et faire en sorte que les professions concernées tiennent
compte de la situation et fassent au mieux.
Le but ultime est d'harmoniser les législations et les règlements
au niveau international.
Mais le chemin est encore long et parsemé d'embûches d'autant plus
que de colossaux intérêts économiques et financiers sont en jeux.
En
1999, la consommation de médicaments sans prescription en Europe
s’est élevée à 12,30 milliards d’Euros, soit 12,5% de l’ensemble
du marché pharmaceutique européen.
Dans les pays du Sud, particulièrement en Afrique subsaharienne,
qui pâtissent pour beaucoup d'entres eux, de systèmes de corruption
doublés d'une absence dramatique de politiques de contrôle et de
qualité du médicament, d'une absence de système de maîtrise de production
et de diffusion du médicament, de contrefaçon courante de médicaments
qui concourent au développement de circuits criminels et maffieux
nationaux, voire internationaux, autant dire qu'en plus des "pharmacies
gazon ou trottoirs", des catastrophes sont inéluctables avec la
"Cyberpharmacie".
Quelle
soit souhaitée, naturelle ou dirigée, l’automédication présente
des risques réels pour la santé des patients.
Elle engendre également un coût important en terme budgétaire pour
la société. Autant le médicament peut être utile, voire indispensable
pour soigner certaines maladies, autant il peut être à l’origine
de sérieux problèmes de santé pour son utilisateur.
Le patient doit donc non seulement disposer d’informations appropriées
mais également comprendre l’indication exacte, la posologie, la
conservation, les effets indésirables, les contre-indications, les
interactions possibles entre les médicaments.
Une collaboration nécessaire entre prescripteurs (médecins, vétérinaires,
dentiste), pharmaciens et industrie pharmaceutique, en somme de
tous les professionnels de la santé, doit concourir à cet objectif
dans l’intérêt de la santé publique.
Cela passe aussi par une réelle volonté politique de la part des
gouvernants, notamment par la création, le soutien et/ou le renforcement
de programmes de promotion, d'information, d’éducation et de formation
en matière de santé.
André Honba, Pharmacien
Lire
l'article original: www.cameroon-info.net/
|