A
l'instar de la communauté internationale, le Burkina Faso a célébré
le 1er décembre dernier, la Journée mondiale de lutte contre
le Sida. Les manifestations officielles de la journée se sont déroulées
cette année à Orodara, le chef-lieu de la province du Kénédougou,
sous la présidence du ministre de la Santé qui est aussi
le 1er vice-président du Conseil national de lutte contre le Sida
et les Infections sexuellement transmissibles (CNLS-IST). Placé
sous le slogan :"Vivez et laissez vivre", la Journée
mondiale de lutte contre le Sida 2002, s'inscrit dans une campagne mondiale
contre le VIH/Sida 2002-2003 avec pour thème "Stigmatisation
et discrimination".
"L'isolement me tue ; j'ai peur de ta réaction ; rassure-moi
qu'aucune pierre ne me sera dorénavant jetée", a lancé
avec désarroi à Orodara, le représentant du Réseau
national pour une grande implication des personnes infectées par
le VIH/Sida au Burkina Faso (REGIPIV-BF). Plus que dans toute autre maladie,
c'est le regard des autres qui déstabilise le plus, les personnes
vivant avec le VIH/Sida. Une triste réalité sur tous les
continents qui justifie la campagne mondiale contre le Sida 2002-2003
axée sur la stigmatisation, la discrimination et les droits de
la personne humaine. L'objectif de la campagne est de prévenir,
de réduire et d'éliminer la stigmatisation et la discrimination
associées au VIH/Sida, où qu'elles se produisent et sous
toutes ses formes. Les causes de la stigmatisation et de la discrimination
sont généralement la mauvaise compréhension de la
maladie, les mythes concernant la transmission du VIH, les préjugés,
l'insuffisance des traitements, la manière irresponsable dont les
médias parlent de la maladie, le fait que le Sida soit incurable,
les craintes sociales concernant la sexualité, les peurs liées
à la maladie et à la mort. Quant aux conséquences
de la stigmatisation et de la discrimination, elles sont catastrophiques.
Elles constituent de sérieux obstacles à la prévention
des nouvelles infections, à la fourniture d'une prise en charge,
d'un soutien et d'un traitement adéquats. Il en résulte
sur les personnes infectées, des sentiments de culpabilité
et de honte entraînant la dépression, la perte de l'estime
de soi et le désespoir.
Le secrétaire permanent du CNLS-IST, Joseph André Tiendrébéogo,
a fait observer que sous d'autres cieux, la stigmatisation et la discrimination
ont un visage que l'on peut identifier et combattre parce que la plupart
des personnes infectées sont connues et assument courageusement
leur maladie avec l'appui de leur famille et de leur communauté.
Ce qui n'est pas le cas en Afrique et particulièrement au Burkina
Faso où le phénomène est plus cruel et plus insidieux.
C'est en effet dans sa propre famille que la personne infectée
subit souvent sa première exclusion, étant devenue la honte
de la famille. Cette exclusion se poursuit au sein de sa communauté
et dans son milieu de travail où la personne infectée ou
tout simplement soupçonnée comme telle, devient un véritable
paria. Le secrétaire permanent du CNLS-IST, a encouragé
les associations de lutte contre le Sida et plus particulièrement
les associations de personnes vivant avec le VIH, à ne pas baisser
les bras face à ces réalités. Il a invité
les hommes à plus de solidarité et de générosité
envers les personnes infectées et affectées par le Sida.
Le représentant du REGIPIV-BF s'est quant à lui félicité
des initiatives prises au niveau national ces dernières années
pour soulager les malades. Il s'agit de la création d'un fonds
de solidarité envers les malades et orphelins du Sida, de l'achat
des médicaments anti-rétroviraux au profit des malades par
certaines personnes et de la disponibilité des médicaments
contre les infections opportunistes grâce à l'appui de partenaires.
Il a déploré cependant la discrimination actuelle dans l'accès
aux soins et aux traitements qui font que "les médicaments
sont dans la capitale et les malades dans les provinces". Le représentant
du REGIPIV-BF a ensuite recommandé au CNLS-IST, de soutenir l'organisation
dans les plus brefs délais la formation d'au moins un médecin
par CHR et par district sanitaire à la prescription rationnelle
des ARV pour qu'un suivi médical correct soit offert aux personnes
vivant avec le VIH, de veiller à la mise en place d'un système
d'information à jour sur l'évolution de la maladie et des
nouvelles molécules disponibles, de soutenir le REGIPIV dans la
mise en place d'un groupe communautaire de lobbing pour l'accès
aux soins conseils, traitements, d'établir un partenariat entre
les mouvements associatifs et les laboratoires privés pour des
tarifs négociés des examens biologiques et enfin de renforcer
le soutien des associations à base communautaires.
Dans son discours à l'occasion de cette journée mondiale
Sida, le ministre de la Santé, Alain Bédouma Yoda, a rappelé
que le gouvernement burkinabè a souscrit à la déclaration
d'engagement des Nations unies sur le VIH/Sida. C'est ainsi que le gouvernement
s'attèle à la mise en œuvre d'un certain nombre de
recommandations, notamment celles relatives à la lutte contre toute
forme de discrimination et à la promotion des droits des personnes
infectées et affectées. Le ministre de la Santé a
aussi souligné l'engagement personnel du président Blaise
Compaoré qui a pris la tête du Conseil national de lutte
contre le Sida et qui n'a pas hésité à poser sur
une affiche avec une personne vivant avec le VIH/Sida pour témoigner
sa solidarité aux personnes infectées.
"Cette implication du premier responsable de l'Etat doit constituer
pour nous le levain qui amplifie nos actions de cette lutte contre le
Sida" , a conclu le ministre Yoda.
La campagne mondiale de lutte contre le Sida, c'est traduire le consensus
mondial sur la nécessité de lutter contre l'isolement et
l'exclusion des personnes infectées. "Nous devons vivre et
accorder aux personnes infectées ou affectées par le VIH,
le droit de vivre comme nous en refusant toutes les formes de discrimination
et de stigmatisation à leur égard et en rejetant leurs droits"
, martèle l'ONUSIDA.
Hamado NANA
AIB/Houet
Lire l'article original : http://www.sidwaya.bf/sitesidwaya/sidawaya_quotidiens/sid2002_03_12/sidwaya.htm
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