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Dr Renaud NG MAN SUN, directeur de la Aids Unit : «Nous pouvons contrôler la progression du sida» - L'express - Ile Maurice - 15/05/2005
La hausse du nombre de séropositifs est préoccupante. Même si elle touche principalement les toxicomanes, il faut craindre une féminisation des cas. D’où la nécessité d’affiner le système de surveillance de la maladie.

L'express : Trois cent trente et un nouveaux cas de sida de janvier à avril, alors qu’en 2004, 535 nouveaux cas avaient été enregistrés. Peut-on parler « d’épidémie », comme le fait l’association Pils ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : C’est un fait que le nombre de séropositifs est en très forte hausse, mais il faut cependant se garder de parler d’épidémie. Ce que l’on peut dire désormais avec certitude, c’est qu’il nous faut intensifier notre campagne auprès des partenaires des toxicomanes. Je m’explique : sur les 331 cas dont vous parlez, 308 sont des toxicomanes (93 %). Et la proportion de porteurs du virus VIH est de quatre hommes pour une femme. En outre, les toxicomanes qui se shootent sont en grosse majorité des hommes.
Comme ces personnes ont des relations sexuelles suivies avec des partenaires, il faut craindre dans les prochaines années une « féminisation » des porteurs du virus, jusqu’à atteindre une certaine parité entre le nombre de cas masculins et féminins. Une campagne de prévention agressive doit donc être entreprise vis-à-vis des partenaires des toxicomanes qui utilisent des seringues.

L'express : L’Organisation mondiale de la santé estime qu’il faudrait multiplier par dix les chiffres officiels pour connaître le nombre réel de porteurs du virus…

Docteur Renaud NG MAN SUN : Comparons ce qui est comparable. En Afrique, où le dépistage est difficile et le traitement peu accessible, il est normal que les chiffres officiels soient grossly underestimated. Mais, là aussi, il faut être lucide. Au Botswana, par exemple, il y a officiellement 300 000 cas. Si on multiplie ce chiffre par dix, cela ferait trois millions de personnes contaminées, alors que le pays ne compte que 1,5 million d’habitants. À Maurice, grâce au travail de dépistage et de surveillance et grâce à la collaboration autorités - ONG, le nombre total de personnes contaminées ne doit pas être très supérieur aux chiffres officiels.

L'express : Et pour les donneurs de sang ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Nous remarquons, depuis peu, des cas de porteurs du virus chez les donneurs de sang. Mais il n’y a pas lieu de généraliser et de paniquer, vu que sur les 40 000 tests effectués lors de dons de sang, nous avons relevé seulement dix cas de VIH. C’est dix cas de trop, mais ce n’est pas encore une épidémie.

L'express : Les toxicomanes sont-ils vraiment une population à risque ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : La moyenne des porteurs du virus dans les centres est de 21 %, soit 55 personnes sur 264 toxicomanes qui utilisant des seringues suivant les programmes offerts par les centres. Cela veut dire qu’un de ces toxicomanes sur cinq est séropositif. Le risque est là, mais nous sommes encore dans une période où l’on peut agir pour empêcher une explosion.

L'express : Quelle est la situation en prison ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Nous proposons un test de dépistage facultatif à tout nouvel arrivant. De janvier à avril dernier, sur 1 388 tests effectués, nous avons eu 192 cas positifs (14 %). Comme les toxicomanes forment plus de 80 % des prisonniers, il est normal que leur nombre soit important. Mais nous constatons que le pourcentage est en légère baisse. C’est encourageant.

L'express : Et le dépistage chez les femmes enceintes ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Là également, il ne faut pas parler d’épidémie. Près de 18 000 tests ont été effectués et 18 cas de VIH détectés. Si cette tendance va en augmentant, nous devrons agir en conséquence. Si toutefois épidémie il y avait, nous aurions les mêmes statistiques qu’au Botswana et en Afrique du Sud (70 %). Il nous faut poursuivre et affiner notre système de surveillance de la maladie.

L'express : On parle peu de Rodrigues…

Docteur Renaud NG MAN SUN : Nous avons recensé quatre cas de VIH à Rodrigues, trois femmes enceintes et un homme. Mais il ne faut pas baisser la garde : il y a de nombreux Rodriguais qui vivent à Maurice et parmi eux, il existe un certain nombre de porteurs du virus.

L'express : Comment lutter contre la propagation du virus ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Nous parlons d’ABC. A pour abstinence ; B pour Be faithful, la fidélité ; et, C pour condomize, utiliser les préservatifs. On constate qu’environ 5 millions de personnes contractent le virus chaque année, et ce chiffre est plus ou moins constant, malgré toutes les campagnes menées et le fameux ABC… Cela veut dire que les personnes ne changent pas de comportement. Croyez-vous que si l’on inonde le monde de préservatifs, le nombre de nouveaux cas va diminuer ? Qu’importent la campagne et le moyen proposé, tout cela doit être accompagné de l’éducation au changement de comportements des personnes.
« Sur les 40 000 tests effectués lors de dons de sang, nous avons relevé dix cas. Ce n’est pas encore une épidémie. »

L'express : La coalition « urgence VIH » demande aux autorités de mettre en place un programme de distribution de seringues. Qu’en pensez-vous ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : C’est une des solutions que l’on devrait proposer comme moyen pour réduire la propagation du virus parmi les toxicomanes. Mais tout programme de distribution de seringues doit faire partie d’un package. Il ne faut pas seulement s’attaquer aux conséquences, mais aussi voir les causes de la toxicomanie. Les autorités doivent s’assurer que l’offre de drogue sur le marché soit réduite au minimum. Puis, empêcher que de nouvelles personnes deviennent dépendantes. Et pour celles qui sont déjà toxicomanes, il faut leur proposer un traitement bien précis pour les réhabiliter. Puis, pour la minorité qui continue à se droguer, il faut mettre en place un protocole d’échange de seringues. Je précise : échange et non distribution. Il est impératif de mettre les vieilles seringues hors circuit et d’en donner de nouvelles. Cet échange se passerait dans des centres agréés, où il y aurait un accompagnement du toxicomane, et où le lieu devient un vrai espace de dialogue. Bizin guide dimunn-la ki pe rod simin la limyer. Tout doit être planifié et réfléchi.

L'express : Que nous réserve l’avenir ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Il faut maintenir notre vigilance, car nous devons nous attendre à ce que la part de femmes touchées par le virus augmente. Ce qui s’est passé ailleurs devrait nous intéresser : en Thaïlande, en 1990, il y avait 140 000 nouveaux cas dépistés. 90 % avaient contracté le virus avec des prostituées, 5 % par des toxicomanes et 5 % par leurs conjoints. Dix ans plus tard, on recensait 20 000 nouveaux cas par an, 15 % contaminés par des prostituées, 20 % par des toxicomanes, 50 % par les conjoints et 15 % par transmission de la mère à l’enfant. Ici aussi, il faudrait poursuivre notre travail agressif sur le terrain, il ne faut jamais baisser la garde…
Nous avons néanmoins quelques signes positifs : 40 femmes partenaires de toxicomanes séropositifs ont fait le test et nous n’en avons dépisté que trois séropositives. Si nous accompagnons bien les partenaires des toxicomanes, nous devrions pouvoir « contrôler » la progression de la maladie.

L'express : Si demain, des changements intervenaient au niveau de la loi, serez-vous capables de participer à ce programme de distribution de seringues ?

Docteur Renaud NG MAN SUN : Oui, presque tout de suite. Notre unité travaille déjà avec les toxicomanes et nous leur proposons l’accompagnement moral nécessaire. Nous avons une double mission : la prévention et le traitement du virus VIH/Sida. Nous avons trois médecins et de treize infirmiers très dynamiques et dévoués. Nous sommes prêts à relever le défi.

Propos recueillis par Erick BRELU-BRELU

Le sida en chiffres
Au 31 mars, 238 femmes et 1 026 hommes vivaient avec le virus du sida à Maurice. Pour les quatre premiers mois de l’année, 285 nouveaux cas ont été dépistés. Cet accroissement des cas découverts est dû, selon les spécialistes, à une présence soutenue sur le terrain et des moyens plus importants employés pour la détection.
Le nombre de tests pratiqués est en constante hausse. Près de 90 000 personnes ont subi les deux tests (rapides) Elisa pour détecter si elles sont atteintes du virus. Si ces résultats sont positifs, on pratique alors un autre test de confirmation, le Power Western Plot. Si le résultat est toujours positif, on procède à un quatrième test, mais cette fois-ci sur un deuxième échantillon du patient. Ces tests sont gratuits.
Selon la coalition « Urgence VIH », un sidéen coûte Rs 140 000 au minimum par an à l’État : Rs 60 000 pour les rétroantiviraux, Rs 12 000 les quatre tests CD4, Rs 16 000 quatre tests sanguins, Rs 30 000 pour 15 jours d’hospitalisation et Rs 22 800 pour une année de pension.

Lire l'article original : http://www.lexpress.mu/display_search_result.php?news_id=41900

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